Loi immigration : qui sont les 14 sénateurs et députés qui ont entre leurs mains l'avenir du texte?

La commission mixte paritaire, qui compte quatorze élus du Sénat et de l'Assemblée, va essayer de se mettre d'accord pour faire aboutir la loi immigration. La droite y est en position de force tandis que la macronie y compte une figure de son aile gauche.

Ce sont sur eux que reposent tous les espoirs de Gérald Darmanin. Une commission mixte paritaire qui réunit sept députés et sept sénateurs va plancher à partir de lundi sur la loi immigration.

Ces parlementaires vont tenter de se mettre d'accord sur une version commune du projet de loi immigration, en ayant comme base de travail le texte voté au Sénat à majorité LR, bien plus dur que la copie gouvernementale présentée par Gérald Darmanin.

La droite en position de force

Le président des sénateurs LR, Bruno Retailleau, y sera présent. Ce proche de François Fillon a nettement poussé sa majorité à étoffer la loi immigration en multipliant les dispositions qui n'y apparaissaient pas. Parmi celles-ci: la fin de l'aide médicale d'État ou la fin du droit du sol. Il va chercher à faire en sorte que la version finale du texte soit la plus proche possible de celle de la chambre haute.

On retrouvera également le président de la commission des lois au Sénat François-Noël Buffet (LR). Cet élu proche de Laurent Wauquiez a signé plusieurs rapports prônant le durcissement des mesures contre l'immigration irrégulière.

Avec eux, la co-rapporteure du texte à la chambre haute Muriel Jourda (LR). Cette avocate de profession s'était notamment illustrée dans la commission d'enquête sur Alexandre Benalla. Elle a défendu lors de la loi immigration plusieurs dispositions comme le conditionnement des minimas sociaux à "cinq années de résidence stable et régulière".

Philippe Bonnecarrère (Union centriste), le second co-rapporteur du Palais du Luxembourg, fera également partie des discussions. Ce sénateur avait demandé le renforcement des conditions de regroupement familial pour les étrangers.

La députée LR Annie Genevard sera également membre de la CMP. Cette proche d'Éric Ciotti a dénoncé "le laxisme" du texte du ministre de l'Intérieur à plusieurs reprises et devrait s'atteler à conserver les apports du Sénat lors des échanges en commission mixte paritaire.

En position de force au sein de la CMP, la droite détient les clefs de l'avenir de la loi. Sera-t-elle intransigeante, quitte à froisser la macronie qui pourrait refuser certaines propositions de la droite?

Ou, à l'inverse, mettra-t-elle de l'eau dans son vin pour parvenir à un accord, au risque d'apparaître comme la béquille du gouvernement? Les ténors de la droite vont phosphorer ces prochains jours pour trouver une position commune.

Élisabeth Borne a en tout cas veillé à arrondir les angles avec Éric Ciotti lors des questions d'actualité au gouvernement. Il a pourtant, tout comme la gauche, voté en faveur de l'arrêt de loi immigration à l'Assemblée samedi.

La majorité présidentielle contrainte à l'équilibrisme

Face aux élus LR, on retrouvera le président de la commission des lois à l'Assemblée Sacha Houlié. Ce représentant de l'aile gauche a longuement ferraillé en amont de l'arrivée du texte dans l'hémicycle pour retoquer les dispositions votées par le Sénat. Ce co-fondateur des Jeunes avec Macron entretient des relations souvent tendues avec Gérald Darmanin.

Il aura à ses côtés le co-rapporteur de la loi à l'Assemblée Florent Boudié. Cet ancien socialiste méconnu du grand public est apprécié de son camp et avait déjà dû gérer les fortes tensions au sein du groupe Renaissance lors de la loi asile-immigration défendue en 2018 par Gérard Collomb, alors ministre de l'Intérieur.

Sera aussi présente la co-rapporteure de la loi Élodie Jacquier-Laforge. La députée Modem, également vice-présidente de l'Assemblée, s'était illustrée en novembre dernier en signant une une tribune en faveur du maintien de l'aide médicale d'État, à laquelle ont mis fin les sénateurs.

Marie Guévenoux, la questeure Renaissance de l'Assemblée, fait également partie du casting. Issue des rangs de la droite, cette députée Renaissance a déjà fortement défendu la précédente loi immigration de la majorité présidentielle.

Dernier membre de la majorité présidentielle, le sénateur Renaissance: Olivier Bitz. Nouveau venu au Palais du Luxembourg en septembre dernier, c'est lui qui avait défendu à la tribune le vote largement majoritaire des macronistes en faveur du texte défendu par les LR.

La macronie s'est divisée en interne avant même l'arrivée programmée du projet de loi dans l'hémicycle et ont profondément revu les dispositions sénatoriales en commission des lois. Sacha Houlié a d'ailleurs déclaré qu'il "serait irresponsable d'aller au-delà de l'ADN politique" de la majorité.

Mais les députés Renaissance devraient avoir à cœur d'éviter un échec à Gérald Darmanin, déjà très fragilisé.

La gauche en farouche opposante

À gauche, on retrouvera la cheffe de file des socialistes au Sénat sur la loi immigration Marie-Pierre de La Gontrie. Cette ancienne adjointe à la mairie de Paris s'est illustrée dans les débats en accusant la droite sénatoriale de "reprendre consciencieusement les propositions de Marine Le Pen".

Elle sera épaulée par la sénatrice socialiste Corinne Narassiguin. Cette ancienne député proche d'Olivier Faure, est elle aussi, très opposée au texte portée par Gérald Darmanin.

La députée insoumise Andrée Taurinya, secrétaire de la commission des lois, va également dire non à tout accord. Elle avait accusé Gérald Darmanin de "vouloir criminaliser les étrangers".

L'ensemble de la Nupes s'est opposée au projet de loi immigration, à l'exception de Fabien Roussel qui avait évoqué une éventuelle abstention. Les membres de la gauche de la CMP devraient s'atteler à empêcher un accord.

Le Rassemblement national en arbitre

Le chef de file des députés RN sur la loi immigration Yoann Gilet sera également membre de la CMP. Ce député du Gard s'est agacé à plusieurs reprises "des mesurettes" contenues dans le projet de loi portée par Gérald Darmanin qui aurait pu déboucher selon lui "sur une submersion migratoire".

Si Marine Le Pen avait un temps appelé à soutenir cette "petite loi" si elle avait de "petits effets" pour les Français, les députés RN ont finalement changé d'avis lundi. En cause: un texte qui aurait "créé une filière d'immigration massive au détriment des Français dans la précarité" pour l'élue Edwige Diaz sur BFMTV ce mardi. Le mouvement pourrait donc s'opposer à un accord.

À l'issue de la commission mixte paritaire, si les parlementaires sont parvenus à se mettre d'accord, la version qui sortira de cet organe sera soumis au Sénat et à l'Assemblée nationale. Peut-il être voté par les députés s'il contient de nombreux ajouts sénatoriaux vu comme "une ligne rouge" par la gauche mais aussi des députés de la majorité présidentielle ? La question est entière.

Si les députés et les sénateurs ne parviennent pas à s'accorder sur un texte commun, le projet de loi immigration sera retiré, comme a déjà fait savoir Emmanuel Macron ce mardi soir lors d'un dîner à l'Élysée.

Article original publié sur BFMTV.com

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