Dissolution, législatives, réformes... Ce qu'il faut retenir de la conférence de presse d'Emmanuel Macron

Emmanuel Macron a donné une longue conférence de presse ce mercredi 12 juin, quatre jours après avoir dissous l'Assemblée nationale et provoqué un séisme politique.

L'heure de la grande explication pour Emmanuel Macron. Le président de la République a donné ce mercredi 12 juin une longue conférence de presse, au pavillon Cambon Capucines à Paris, pour expliquer son choix de dissoudre l'Assemblée nationale après la large victoire du RN aux européennes et donner un cap à la campagne de la majorité.

Expliquant sa décision de dissoudre l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron a affirmé avoir "pris acte d’un blocage qui empêchait inéluctablement le gouvernement d'agir". Au Parlement, la majorité relative "a rendu l'action moins lisible et ne nous a pas permis de bâtir des coalitions durables", a-t-il regretté.

À cette conjecture politique s'est ajoutée la victoire du RN aux européennes, "un fait politique majeur qu’on ne saurait ignorer" selon lui. En conséquence, seule la dissolution "permet la clarification des choses", a estimé Emmanuel Macron. "Le retour au peuple souverain est la seule décision républicaine."

Emmanuel Macron a vivement critiqué les alliances qui se négocient à gauche comme à l’extrême droite en vue des législatives du 30 juin et 7 juillet, des “bricolages d’appareils” à ses yeux. "Depuis dimanche soir, les masques tombent et la bataille des valeurs éclate au grand jour", a-t-il déclaré. La dissolution est "une épreuve de vérité entre ceux qui choisissent de faire prospérer leur boutique et ceux qui veulent faire prospérer la France", a ajouté le chef de l'État.

Il pointe des alliances "contre-nature" des "deux extrêmes", à la fois autour du RN et de LFI. "La droite tourne le dos en quelques heures à l'héritage du général de Gaulle, de Jacques Chirac et de Nicolas Sarkozy", a-t-il affirmé, évoquant l'alliance souhaitée par Éric Ciotti entre LR et le RN, qu’il qualifie de “pacte du diable”. Quant à "la gauche républicaine", elle "vient de s'allier avec l'extrême gauche qui s'est rendu coupable d'antisémitisme, de communautarisme, d'antiparlementarisme", a-t-il accusé. "Léon Blum doit se retourner dans sa tombe", a-t-il lancé, en référence au nom de "Front populaire" utilisé par l'alliance des gauches.

Face à ces oppositions, Emmanuel Macron souhaite le rassemblement de ceux qui "auront ensemble su dire non aux extrêmes", "avant ou après" les législatives. "Cette majorité présidentielle actuelle, je souhaite que ses dirigeants puissent aller dialoguer avec des forces et des personnalités qui n'en sont pas membres aujourd'hui”, a-t-il déclaré.

Emmanuel Macron assure qu'il "ne fera pas campagne aux législatives". "Je n'entends pas faire campagne davantage que je l'ai fait en 2017 et en 2022", explique-t-il, jugeant néanmoins "important" de "donner le cap".

Il assure qu'il n'acceptera pas non plus de débat avec Marine Le Pen. Avant les européennes, cette dernière a affirmé qu'elle n'accepterait un face-à-face que si le président mettait sa démission "sur la table". Dans ces conditions, le président dit "non".

Comme il l'avait fait mardi, Emmanuel Macron assure également qu'il ne démissionnera pas après le résultat des législatives. "Je veux tordre le cou à ce canard qui n'a jamais existé, c'est absurde", assure-t-il. "Je me suis soumis à deux reprises aux suffrages des Françaises et des Français", "je n'étais pas tête de liste aux élections européennes", a défendu le chef de l'État, estimant que l'élection présidentielle s'est "jouée en 2022 et pour cinq ans".

Interrogé sur la montée de l’extrême droite, Emmanuel Macron admet sa "responsabilité" de ne pas avoir "apporté une réponse" suffisante aux "inquiétudes". "Si je pensais que j'avais tout bien fait, je ne serais pas là devant vous aujourd'hui, je n'aurais pas fait de dissolution", souligne-t-il.

Il reconnaît une "responsabilité" dans une absence de réponse "assez rapide et radicale" aux "inquiétudes" des Français, comme le "malaise qui existe dans la ruralité" ou le "sentiment de déclassement qui existe dans certains de nos quartiers". Mais il se présente comme un "indécrottable optimiste" et estime que l'arrivée de l'extrême droite au pouvoir n'est pas inéluctable.

Emmanuel Macron promet d'ouvrir "un grand débat" sur la laïcité menant à "des mesures claires" sur une notion qui n’est selon lui "pas bien appliquée". Le chef de l’État veut promouvoir les "rites républicains" pour permettre "une véritable intégration", qui passera inévitablement par une réduction des "discriminations".

Le chef de l’État estime que le gouvernement doit avoir une "réponse renforcée" en matière "de protection de nos enfants et de notre jeunesse". "Aujourd'hui, nos enfants sur le territoire ne sont pas pris en charge de la même manière selon les quartiers dont ils viennent", a-t-il regretté.

Emmanuel Macron estime par ailleurs que "l'addiction aux écrans est le terreau de toutes les difficultés". Il promet des "décisions claires" du gouvernement en la matière:

"D'abord, en ne permettant pas l'usage des téléphones avant 11 ans et surtout, l'accès aux réseaux sociaux et à leur usage avant l'âge de 15 ans", a-t-il détaillé.

Pour "améliorer le quotidien de ceux qui travaillent", le président de la République appelle les entreprises à se saisir davantage des primes exceptionnelles non-imposables, comme la prime dite "Macron".

Après une impopulaire réforme de notre système de retraites, Emmanuel Macron affirme que les retraites resteront bien "indexées sur l'inflation". Le chef de l’État a écarté tout retour en arrière sur le sujet. "Tous ceux qui reviennent sur la réforme des retraites c’est soit un projet d'appauvrissement des salariés, soit d'appauvrissement des retraités", a-t-il estimé. Selon lui, il n’y a pas de "recette miracle" sans "allongement du temps de travail". Pour "une vie plus simple", Emmanuel Macron promet par ailleurs "une stabilité fiscale normative" pour les "trois ans à venir".

D’une manière générale, Emmanuel Macron estime que "l’action du gouvernement devra continuer de s'inscrire dans le sérieux budgétaire, sous peine de céder à l'affaiblissement du pays et l'appauvrissement des épargnants que promettent l'extrême droite et l'extrême gauche". En cas d'élection du RN, "l'accès au crédit coûtera plus cher, le taux pour accéder au logement sera plus cher", assure l'ancien ministre de l'Économie.

Le gouvernement va-t-il renoncer à sa réforme de l'assurance-chômage prévue pour le 1er juillet? "Je pense que cette réforme est bonne, et donc je l'assume", tranche Emmanuel Macron, qui affiche sa volonté de "continuer à lutter contre l'inactivité".Le chef de l’État se dit toutefois prêt à ouvrir des "discussions" pour "construire les modalités" de mise en œuvre du texte.

Emmanuel Macron confirme vouloir "huit nouveaux réacteurs nucléaires". Le 16 janvier, celui-ci avait prévu cette annonce pour l'été. "La France est l'un des pays d'Europe qui a l'énergie la plus décarbonée grâce au nucléaire. Il y a six ans, personne n'était d'accord sur le nucléaire", déclarait-il à l'époque.

Vers un nouveau découpage des régions françaises? Emmanuel Macron dit vouloir "rouvrir" la "question des grandes régions", découpées de manière "arbitraire" selon lui, en donnant “le choix” aux Français. Réformées depuis le 31 décembre 2015, ces 13 nouvelles régions - au lieu de 22 auparavant - “éloignent la décision politique”, selon le chef de l’État. Certaines d'entre elles suscitent encore de vives critiques, à l'image de la région Grand Est, dont l'Alsace souhaite s'émanciper.

Pour "déconcentrer beaucoup plus rapidement" et "ramener plus de simplicité et de liberté sur les territoires", il "entend supprimer un échelon territorial" et entreprendre des "réformes de simplification pour une plus grande vitalité démocratique".

Emmanuel Macron a "décidé de suspendre" le projet de loi constitutionnelle qui a été voté concernant la Nouvelle-Calédonie. "On ne peut pas laisser d'ambiguïté dans la période pour donner toute sa force au dialogue sur place et au retour à l'ordre", a-t-il estimé.

Le projet de réforme, qui a provoqué des violences sans précédent depuis les années 1980 sur le "Caillou", visait à élargir le corps électoral - gelé depuis 2007 - aux scrutins provinciaux, cruciaux sur le territoire. Après les votes du Sénat le 2 avril et de l'Assemblée le 14 mai, le projet devait encore être adopté par le Parlement réuni en Congrès à Versailles.

Article original publié sur BFMTV.com