Joueurs épuisés, buteurs en panne, leaders défaillants... Pourquoi Didier Deschamps n'est pas le seul responsable de l'Euro poussif des Bleus

A l’image de Daniel Riolo dans l’After Foot sur RMC, de nombreux supporteurs ou suiveurs de l’équipe de France ont réclamé le départ de Didier Deschamps après l’Euro 2024 et la défaite des Bleus contre l’Espagne en demi-finale (1-2) ce mardi à Munich. Impuissants face à la Roja du phénoménal Lamine Yamal, les joueurs tricolores ne disputeront pas la finale du tournoi continental.

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Mais cette cruelle défaite n’est pas de la seule responsabilité du sélectionneur. Idem pour le niveau global de la sélection pendant tout son parcours. Même si le coach français a voulu assumer l’échec des siens ce mardi. "Je ne vais pas donner la responsabilité plus à l’un qu’à l’autre", a assuré Didier Deschamps en conférence de presse. "La responsabilité c’est la mienne."

Mbappé et Griezmann, des leaders offensifs pas au niveau

Didier Deschamps assure être responsable, la réalité du terrain est peut-être un peu différente. Premier buteur de cette demie contre la Roja, Randal Kolo Muani a aussi inscrit l’unique but dans le jeu de l’équipe de France pendant l’Euro (hors CSC). Avant cela, les Bleus ont tenté leur chance à 87 reprises sans faire mouche. Insuffisant pour convaincre véritablement. A l’arrivée, cette tête de l’attaquant du PSG n’aura pas suffi à envoyer l’équipe tricolore en finale. Mais on regrettera plus volontiers les ratés des autres joueurs offensifs de la sélection et notamment Kylian Mbappé.

Capitaine des Bleus, le nouveau joueur du Real a envoyé une belle balle d’égalisation droit dans les tribunes ce mardi. Sans son masque, Kylian Mbappé a probablement livré son meilleur de match de l’Euro 2024, c’est dire… Avec un seul but, sur pénalty, "Kyks" a déçu et n’a pas été le leader offensif que la France attendait.

"T'es bon ou tu n'es pas bon. Je n’ai pas été bon et on rentre à la maison, c’est simple", a reconnu l’intéressé dans un constat sans concession après la défaite contre l’Espagne. "Il faut bien que je me repose. Après, je pars pour une nouvelle vie."

Entré sur le terrain à l’heure de jeu pour tenter de renverser la Roja, Antoine Griezmann n’a rien apporté ou presque. A l’image de son Euro, le vice-capitaine français a déjoué pendant cette demie. Pas aidé par son utilisation par Didier Deschamps pendant la compétition, baladé au milieu comme numéro dix ou comme ailier droit, "Grizou" n’a pas pesé.

"J’ai mal commencé", a-t-il reconnu après l’élimination tricolore. "Après, je me sentais de mieux en mieux, et j’ai fini sur le banc. On reviendra. J’ai essayé de tout donner avec beaucoup de changements tactiques et de position. Il fallait tout le temps s’adapter."

Sur le plan offensif, Didier Deschamps n’est donc pas l’unique responsable de la défaite des Bleus contre l’Espagne. Tout simplement parce que le sélectionneur ne jouait pas et n’a pas été l’auteur des nombreux ratés tricolores.

Des joueurs émoussés physiquement

Impeccables pendant tout le début de l’Euro, les Bleus ont craqué défensivement et même physiquement ce mardi contre la Roja. Au pire moment diront les uns, mais ce manque de fraîcheur s’est clairement fait ressentir dans un match où les partenaires de Rodri et Dani Olmo ont privé la France du ballon (42% de possession pour les Bleus) et ont multiplié les passes (456 passés réussies contre 303 pour la France).

Impériaux contre la Belgique ou le Portugal, les milieux tricolores ont semblé en-deçà de leur niveau habituel pendant la demi-finale et n’ont pas pu tenir la comparaison avec le trio ibérique. Face à la presse après la fin de l’aventure en Allemagne, Didier Deschamps a regretté les soucis physiques connus pendant la montée en puissance des Bleus avant l’Euro.

"Face à une équipe d'Espagne de cette qualité, il faut être au maximum. Je ne vais pas chercher d'excuses mais on a attaqué la préparation, on n'avait pas Aurélien Tchouaméni, Adrien Rabiot s'est blessé, Upamecano est arrivé dans des conditions difficiles", a signifié le technicien. "On a paré au plus pressé en étant le plus efficace possible malgré tout. La marche était un peu plus haute, même si on a eu le bonheur d'ouvrir le score."

Mais si Didier Deschamps n’est pas responsable des ratés offensifs de ses joueurs, c’est lui et son staff qui sont chargés de les préparer sur le plan physique. Si le collectif tricolore avait montré de belles choses dans les matchs précédents, il a été étouffé et comme épuisé contre l’Espagne. Surtout, la responsabilité de Deschamps est directement engagée au niveau du coaching.

Contrairement à la finale du Mondial 2022, le sélectionneur n’a pas changé ses joueurs dès la mi-temps et a attendu l’heure de jeu pour effectuer ses premiers changements. De la même manière, c’est lui a géré les temps de jeu tout au long de cet Euro. Si Aurélien Tchouaméni ou N’Golo Kanté ont moins rayonné qu’à l’accoutumée, c’est aussi parce qu’ils ont enchaîné les minutes. A l’inverse, sept joueurs n’ont pas disputé la moindre minute dont Jonathan Clauss, Ibrahima Konaté, Ferland Mendy, Benjamin Pavard et Warren Zaïre-Emery.

Un contexte extra-sportif pesant

Pas tous au mieux physiquement, certains joueurs de l’équipe de France ont également pu se laisser un peu déconcentrer par des facteurs extra-sportifs. Si leur engagement contre les extrêmes et le RN en marge des élections législatives a été salué par des fans, les Bleus ont peut-être aussi lâché un peu d’influx nerveux en-dehors des terrains. Invités à se positionner par les médias, plusieurs joueurs se sont exécutés et ont suivi avec attention l’évolution de la situation politique en France.

"Vous avez vu que certains avaient publié des choses sur les réseaux sociaux. On n’en a pas parlé entre nous mais je pense que beaucoup de gens étaient soulagés on va dire", a même concédé Adrien Rabiot à la veille de la demi-finale contre l’Espagne. Le contexte pesant en-dehors des terrains a donc pu influer directement ou non sur le jeu des Bleus. De la même manière que les fuites dans la presse ont pu déranger Didier Deschamps.

Quand Antoine Griezmann a reproché la diffusion d’une vidéo de l’entraînement des Bleus sur les tirs au but, le sélectionneur a de son côté cherché à limiter les informations sur ses choix tactiques et sur ses compositions d’équipe. A tel point que le champion du monde 1998 s’est même fendu d’un gros bluff avant le quart contre le Portugal en alignant Eduardo Camavinga dans l’entrejeu et en utilisant Antoine Griezmann au soutien du duo Kolo Muani-Mbappé. Un coup qui a aussi surpris ses joueurs.

"Nous aussi, il nous réserve beaucoup de surprises. On s’est dit qu’on allait jouer en 4-3-3 comme lors des huitièmes de finale et on s’est mis en losange", a souri Ousmane Dembélé en conférence de presse. "C’est comme ça. Après, on s’adapte. On reste solidaire et on se parle sur le terrain."

Poussé par les fuites et les informations des journalistes, Didier Deschamps a dû innover, surprendre et… peut-être aussi un peu décontenancer son groupe tout au long de l’Euro. Plus que la responsabilité d’un seul, et c’est souvent le cas après une élimination, c’est bien en équipe que les Bleus ont perdu et Didier Deschamps n’est pas l’unique responsable. Ensemble dans la victoire comme dans la défaite.

Article original publié sur RMC Sport