Péter Magyar, ancien allié devenu rival de Viktor Orbán, rejoint le PPE au Parlement européen

Péter Magyar, ancien allié devenu rival de Viktor Orbán, rejoint le PPE au Parlement européen

Le parti de Péter Magyar, principal adversaire politique du Premier ministre hongrois Viktor Orbán, rejoint le Parti populaire européen (PPE). La formation des chrétiens-démocrates au Parlement européen a pourtant abrité jusqu'en 2021 le parti Fidesz du dirigeant hongrois.

Le PPE a ouvert ses portes au parti Respect et liberté (Tisza) de Péter Magyar lors d'un vote à Bruxelles mardi. Les sept eurodéputés de Tisza élus lors des élections européennes de juin siégeront donc au sein du plus grand groupe politique du Parlement européen.

Péter Magyar, un ancien membre du gouvernement nationaliste de Viktor Orbán, a choqué au début d'année le pays en dénonçant un "État mafieux", dévoilant son expérience personnelle de la corruption et de la machine de propagande du gouvernement.

Il a mené la campagne de Tisza obtenant un score sans précédent de 30 % des voix et portant un coup au Fidesz de Viktor Orbán qui reste cependant le plus grand parti du pays.

L’opposant politique avait précédemment déclaré qu'il ne prendrait pas son siège de député européen, mais il a fait marche arrière lundi en soumettant sa décision à un vote public sur son profil Facebook. Péter Magyar assumera finalement son mandat d'eurodéputé.

Indépendamment de sa décision, Péter Magyar s’engage à continuer à défier la mainmise du Premier ministre sur le pouvoir. "Je travaillerai pour le changement en Hongrie", promet-il.

"Le changement a commencé, et c'est le début de la fin pour le parti Fidesz", assure Péter Magyar.

"Je suis fier que nous ayons été conduits vers le PPE, le plus grand groupe du Parlement européen, où nous pouvons réellement représenter les intérêts des citoyens hongrois. Il (Viktor Orbán) n'a pas cette chance", explique l’opposant, ajoutant que ses eurodéputés viseraient des positions de pouvoir dans les commissions parlementaires afin de façonner la législation de l'UE dans des domaines tels que l'industrie et l'environnement.

Le Fidesz du Premier ministre hongrois est actuellement sans domicile politique au Parlement européen et ses représentants ont donc une influence plus limitée.

Mais surtout, Péter Magyar s'engage à reprendre le combat pour restaurer l'État de droit dans son pays, dont le recul des valeurs fondamentales provoque de vives tensions entre l’UE et Budapest.

"Bruxelles n'a pas vraiment compris la situation en Hongrie. Bruxelles et le Parlement européen ont aidé le Premier ministre Orbán à jouer ce jeu en Hongrie et à utiliser la procédure de l'article 7 et la procédure de l'État de droit à ses propres fins politiques", explique-t-il.

Pendant des années, l'exécutif européen a retenu les fonds destinés à la Hongrie en représailles à des violations persistantes de l'État de droit, ce qui a permis à Viktor Orbán d'alimenter une campagne anti-UE sur la scène nationale.

Péter Magyar affirme que cette situation freine l’élan économique de la Hongrie.

"Nous sommes aujourd'hui le deuxième État membre le plus pauvre d'Europe et, officiellement, le plus corrompu", souligne l’opposant. "Les gens en ont assez de la corruption, des mensonges et de la propagande".

Le président du PPE, Manfred Weber, s’est félicité avant le début de la réunion de voir "qu'un parti qui pose les questions nécessaires en Hongrie rejoigne le PPE".

"C'est un message clair de la part de la population hongroise qui souhaite une autre perspective politique", explique l’élu allemand, en référence à la solide performance de Tisza lors des élections européennes.

Péter Magyar clarifie sa position sur l'Ukraine

Bien qu'il soit aujourd'hui le challenger politique le plus crédible en Hongrie, Péter Magyar est lui-même profondément conservateur et s'est imposé comme une figure d'opposition alternative aux partis centristes et de gauche qui contestent le pouvoir de Viktor Orbán.

Cela signifie qu'il partage en partie la position du Premier ministre hongrois sur la guerre en Ukraine.

"Poutine est un agresseur. L'Ukraine est une victime. Et le peuple ukrainien a le droit de défendre son propre territoire", précise l’opposant. "Mais nous avons partagé la position du gouvernement. Nous n'enverrons pas de troupes ou d'armes en Ukraine depuis la Hongrie".

Le PPE a répété à maintes reprises que tout partenaire, et a fortiori tout membre du groupe, devait être indéfectiblement pro-Ukraine.

La réunion de mardi a vu le groupe PPE accueillir un total de quatorze nouveaux membres, dont sept parlementaires de Tisza ainsi que des élus représentant le Mouvement des agriculteurs-citoyens néerlandais (BBB) et le Nouveau contrat social (NSC), l'Alliance libérale danoise, le Parti de la famille d'Allemagne et le parti tchèque des Maires et des Indépendants.

Il consolide ainsi son statut de plus grand groupe au Parlement européen. Si ces partis rejoignent le groupe parlementaire, ils ne deviennent pas nécessairement membres du parti politique paneuropéen qu'est le PPE.

L'entrée de Tisza dans l'hémicycle intervient trois ans seulement après l’exclusion du Fidesz du PPE, à la suite d'une controverse sur le recul démocratique en Hongrie — un pays qualifié d'"autocratie électorale" dans une résolution du Parlement européen.