Le Mali se retire de l'ONU avec effet immédiat ? C'est faux

La mission de l'ONU (Minusma) déployée plus de dix ans au Mali s'est définitivement retirée de son territoire au 31 décembre 2023. Dans ce contexte, de nombreuses publications diffusées sur les réseaux sociaux prétendent depuis quelques jours que le Mali est sorti de l'ONU "avec effet immédiat", mais c'est faux : les autorités maliennes ont confirmé à l'AFP que le Mali est toujours membre des Nations Unies.

"Le Mali se retire de l'ONU avec effet immédiat", prétendent de nombreuses publications diffusées des centaines de fois sur Facebook et X depuis le 12 avril 2024, photographie d'un homme en tenue militaire à l'appui (1,2,3...)

<span>Capture d'écran prise sur Facebook le 18 avril 2024</span>
Capture d'écran prise sur Facebook le 18 avril 2024

Ces messages sont principalement relayés par des compte basés en Côte d'Ivoire, dans un contexte de grande défiance, en Afrique de l'Ouest, envers les organisations internationales et les puissances occidentales.

En commentaire, plusieurs internautes se félicitent de cette prétendue décision malienne, certains avançant que "l'ONU c'est la France" :

<span>Capture d'écran prise sur Facebook le 18 avril 2024</span>
Capture d'écran prise sur Facebook le 18 avril 2024

Ces assertions virales sont cependant infondées : le Mali n'a pas décidé de se retirer des Nations Unies, a confirmé à l'AFP le service de presse du gouvernement malien. La junte au pouvoir a toutefois acté la sortie du pays de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'ouest (Cedeao) et le retrait progressif et total de la mission onusienne (Minusma) présente sur son territoire depuis des années .

Pas de retrait du Mali de l'ONU

Les publications diffusées sur les réseaux joignent à leurs allégations la photographie d'un homme en tenue militaire.

En effectuant une recherche d'image inversée à l'aide du moteur de recherche Google, nous avons retrouvé plusieurs articles de presse francophone dans lesquels ce visuel est utilisé (1,2,...).

<span>Capture d'écran prise sur le site du Monde le 18 avril 2024</span>
Capture d'écran prise sur le site du Monde le 18 avril 2024

Il s'agit du colonel Abdoulaye Maïga, porte-parole de la junte militaire au pouvoir, également ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation (lien archivé ici).

L'AFP a cherché, à l'aide de mots clés, si une telle information a été rapportée ces derniers jours dans la presse locale, nationale et internationale. Mais aucun média n'a consacré d'article au prétendu retrait du Mali de l'ONU. Aucune trace de cette décision, non plus, sur les sites et comptes officiels des autorités maliennes.

Pour le confirmer, l'AFP a pris contact avec le service de presse du gouvernement malien, le 17 avril.

Ces messages relèvent de la "fake news", a déclaré Fatoumata Maiga, chargée de communication du porte-parole du gouvernement du Mali. "Si le Mali quittait l'ONU, ce n'est pas de cette manière que ça va se gérer ; vous l'auriez su par des voies beaucoup plus appropriées", a-t-elle ajouté.

Sortie de la Cedeao, retrait de la mission de l'ONU

le 29 janvier dernier, en même temps que le Burkina Faso et suivi par le Niger, la junte malienne a cependant acté le retrait du pays de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cedeao) (lien archivé ici).

La Cedeao, organisation économique régionale de 15 pays, s’est opposée aux coups d’État ayant successivement porté au pouvoir les militaires au Mali, au Burkina Faso et au Niger, imposant de lourdes sanctions économiques au Niger et au Mali.

En août, elle est allée jusqu'à menacer d'intervenir militairement au Niger pour y rétablir l’ordre constitutionnel et libérer le président  Mohamed Bazoum renversé.

Le dialogue est désormais pratiquement rompu entre l’organisation et les régimes de Bamako, Ouagadougou et Niamey, qui ont créé l'Alliance des Etats du Sahel (AES) et accusent leurs voisins d’agir sous l’influence de "puissances étrangères", en premier lieu la France, ex-puissance coloniale dans la région.

<span>Les forces armées allemandes Bundeswehr qui ont servi dans le cadre de la mission de l'ONU au Mali, MINUSMA, après avoir atterri sur la base aérienne militaire de Wunstorf, dans le nord de l'Allemagne, le 15 décembre 2023</span><div><span>RONNY HARTMANN</span><span>AFP</span></div>
Les forces armées allemandes Bundeswehr qui ont servi dans le cadre de la mission de l'ONU au Mali, MINUSMA, après avoir atterri sur la base aérienne militaire de Wunstorf, dans le nord de l'Allemagne, le 15 décembre 2023
RONNY HARTMANNAFP

Par ailleurs, si le Mali n'a absolument pas décidé de se retirer des Nations Unies, la junte au pouvoir a accéléré le départ de la Minusma, mission de l'ONU déployée pendant dix ans sur son territoire (lien archivé ici).

La Minusma "a achevé son retrait du pays d'ici le 31 décembre" 2023 comme convenu avec les militaires au pouvoir au Mali, avait alors déclaré le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres dans un communiqué.

La fin de la Minusma met un terme à un engagement débuté en 2013 face à la propagation du jihadisme qui menaçait la stabilité d'un Etat pauvre et fragile, et qui persiste aujourd'hui.