Européennes: les sept principales têtes de liste en grand oral au Medef

Les sept principales têtes de liste aux européennes auditionnées par le Medef, le 18 avril 2024, à Paris (Geoffroy VAN DER HASSELT)
Les sept principales têtes de liste aux européennes auditionnées par le Medef, le 18 avril 2024, à Paris (Geoffroy VAN DER HASSELT)

Alignées sur une scène, les sept principales têtes de liste aux européennes, décidées à convaincre ou conscientes de ne pas être au meilleur endroit pour le faire, ont répondu présentes jeudi pour décrire au Medef leur vision de l'Europe économique.

"On m'a fait savoir que je devais rassurer les milieux économiques", lance d'emblée d'un ton badin Jordan Bardella (Rassemblement national), favori des sondages qui évite parfois ce type de débat.

Cette fois, les numéros un ont eu trois heures pour expliquer leurs positions, à raison de deux minutes chacun sur une huitaine de thèmes (écologie, simplification, formation, énergie...).

Valérie Hayer (Renaissance), représentante du parti du président de la République Emmanuel Macron, chantre de la politique de l'offre chère au patronat, pense incarner "la liste de la cohérence".

L'Europe "ne doit pas être la variable d'ajustement de la mondialisation entre Américains, Chinois, Indiens", selon elle. Elle souhaite "un triple choc, de simplification, d'investissements massifs, publics et privés et de sécurité européenne, en assumant la préférence européenne".

"Les Etats-Unis inventent, la Chine produit et l'Europe réglemente", déplore pour sa part François-Xavier Bellamy (Les Républicains), appelant à "une pause réglementaire" en Europe et à retrouver "la liberté" et "le sens de l'acceptation du risque".

Le contraste est palpable entre les deux souverainistes, Marion Maréchal et Jordan Bardella. La première semble un peu isolée sur la scène, tandis que le favori des sondages, placé par l'ordre alphabétique près de M. Bellamy, échange et plaisante régulièrement avec celui-ci.

Marion Maréchal se dit d'emblée comme "dans le camp des eurocritiques", pas au point cependant, explique-t-elle, "de tomber dans la caricature en imputant intégralement la situation économique de la France aux choix économiques de l'UE".

Elle sait déplaire en critiquant l'idée de recourir à l'immigration pour "pallier nos défaillances économiques": "Défendre les entreprises oui, mais notre identité en priorité", avance-t-elle.

- "Moment hamlétien" -

M. Bardella au contraire, sous le slogan "la croissance, la croissance, la croissance", se veut le héraut de chefs d'entreprises "pris en étau entre la machine à normer, Bruxelles et une machine à surtransposer, Paris".

"Les milieux économiques ont besoin de stabilité et de confiance : sans nos entreprises la France s'éteint; avec, elle peut tout" s'exclame-t-il.

La tête de liste socialiste Raphaël Glucksmann, qui monte en puissance dans les sondages, ne se départit pas de toute la séance de son sourire et d'un certain humour.

Il décrit un "moment hamlétien" de l'Europe, "être ou ne pas être, devenir puissant ou se vassaliser". Pour lui il faut "redevenir un continent de producteurs, avec au cœur de ce projet, la puissance écologique européenne", et un "cap commun", "le made in Europe".

A chaque extrémité du groupe, les têtes de liste écologiste Marie Toussaint et Insoumis Manon Aubry savent que le public ne leur est pas complètement acquis.

"Nous les écolos, on n'est pas là pour emmerder le monde ou vous enquiquiner", lâche Marie Toussaint. Elle égratigne cependant au passage certains "membres du Medef qui se jouent du dérèglement climatique, font comme s'il n'existait pas".

"L'économie ne peut s'affranchir des limites de la planète", estime-t-elle, jugeant que "l'Europe est la bonne échelle pour agir".

"Le dialogue avec toutes les forces économiques de la Nation est toujours fécond", entame pour sa part prudemment Manon Aubry, plaidant pour une économie "qui garantit des conditions de vie dignes et l'habitabilité de notre planète".

Elle n'hésite pas cependant à "casser l'ambiance" en "invitant collectivement" l'assistance de chefs d'entreprises à discuter "d'équité fiscale".

Au total, la séance est courtoise, avec peu d'échanges directs et peu de piques entre concurrents. Mme Hayer cependant, sans les nommer, dénonce des changements de pied de MM. Bellamy et Bardella sur leurs points de vue européens, ou accuse la gauche de n'avoir "pas été au rendez-vous de l'Histoire" en ne votant pas certains textes.

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