Européennes 2024 : Jean-Luc Mélenchon, accusé de « faire du Trump », persiste (à tort) sur les radiations

Jean-Luc Mélenchon photographié lors d’un meeting à Toulouse samedi 1er juin.
ED JONES / AFP Jean-Luc Mélenchon photographié lors d’un meeting à Toulouse samedi 1er juin.

POLITIQUE - Le chef de file de la France insoumise demande des excuses. Dans un tweet publié ce mercredi 5 juin, Jean-Luc Mélenchon dénonce un article écrit par Libération, qui revenait sur les accents complotistes d’une déclaration faite en meeting samedi 1er juin à Toulouse. Face aux militants, le triple candidat à l’élection présidentielle a laissé entendre que de nombreux électeurs étaient radiés des listes électorales avant les élections européennes, et notamment dans les quartiers populaires, cœur de cible de la stratégie de la France insoumise.

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Même accusation concernant la propagande électorale. « Pourquoi les professions de foi n’arrivent pas dans les quartiers populaires ? Pourquoi elles sont posées sur les boîtes aux lettres quand ce n’est pas directement mises dans la poubelle tandis que dans les beaux quartiers tout arrive bien dans la belle enveloppe bien collée… Des fois, il manque des bulletins dedans », a-t-il martelé, annonçant que le groupe LFI à l’Assemblée nationale allait demander une commission d’enquête pour se pencher sur les conditions d’organisation du scrutin.

Cette sortie, qui a fait tiquer plusieurs observateurs politiques, ne pose pas la question de l’organisation des élections, comme l’expliquent ses soutiens a posteriori. Elle laisse entendre que ceux qui seraient tentés de glisser un bulletin Manon Aubry dans l’urne risquent d’être entravés administrativement par un système ayant intérêt à silencier leurs votes. D’où cette accusation en « trumpisme » faite dans Libération ou ailleurs. En riposte, l’état-major insoumis a brandi l’exemple de Toulouse, par la voix notamment de François Piquemal, député LFI de la Haute-Garonne.

Sur le réseau social X (anciennement Twitter), il a partagé mardi soir la capture d’un article de La Dépêche, titré ainsi : « Après la mise en garde de Jean-Luc Mélenchon, LFI constate 10 000 radiations sur les listes électorales à Toulouse ». En commentaire, l’élu insoumis fait directement le lien entre ces radiations et des visées politiques, puisqu’il cite « les magouilles » du maire (ex-LR) de la ville rose, Jean-Luc Moudenc.

C’est en reprenant ce tweet que Jean-Luc Mélenchon s’est emporté ce mercredi, en réclamant des excuses de la part de l’auteur de l’article de Libération. « Le petit-bourgeois parisien qui commente depuis son bureau des réalités du terrain qu’il ne connaît pas doit savoir reconnaître sa faute », a-t-il cinglé, estimant donc que l’article utilisé par François Piquemal confirmait les propos qu’il a tenus samedi. Des propos qui, rappelons-le, attribuaient à ces radiations une dimension politique visant à entraver le vote LFI.

Décès et changements d’adresse

Sauf que, dans un autre article de La Dépêche, mais également chez la branche toulousaine du site Actu, la mairie donne les détails de ces radiations constatées par LFI, expliquant que celles-ci n’ont rien d’anormal. « Sur ces 9 901, une seule radiation l’a été à l’initiative de la mairie de Toulouse. C’était le cas d’une électrice dont le changement d’adresse nous a été remonté. Le reste des radiations correspond aux décès, environ 3 000 à Toulouse et à des déménagements. Le chiffre de presque 10 000 radiations est donc parfaitement cohérent par rapport au solde naturel de la commune puisqu’en plus des décès, on enregistre environ 15 000 changements d’adresse à Toulouse sur une année. Sur ces 15 000 mouvements, seulement une partie concernent des personnes qui quittent la commune », a expliqué Sacha Briand, adjoint au maire de Toulouse en charge des élections.

Un point sur le fonctionnement des radiations s’impose. Comme on peut le lire ici, l’Insee procède à des radiations d’office, quand il s’agit d’une décision judiciaire, d’un décès ou d’un changement de bureau de vote. Puis, la mairie peut radier des électeurs en application de l’article L18 du code électoral. Ces radiations sont décidées par la commission de contrôle communale. Sur quels critères ? « Si votre motif d’inscription n’est plus valable parce que vous n’habitez plus la commune, ou que vous n’y payez plus d’impôts locaux, ou encore que vous n’y dirigez plus de société », lit-on sur le site service-public.fr.

Précision importante : « avant de vous radier, le maire doit vous demander de lui fournir, dans les 15 jours, la preuve que votre inscription sur les listes de sa commune est toujours bien justifiée ». Ce qui signifie qu’il est peu probable, bien que cela puisse arriver à la marge, qu’un électeur découvre le jour du vote avoir été radié du jour au lendemain sans en avoir été informé. Autre donnée importante, les électeurs radiés à l’initiative des communes sont bien moins nombreux que ceux radiés en raison d’une nouvelle inscription (529 913 contre 2 198 360).

On notera par ailleurs qu’il n’y a jamais eu autant d’électeurs inscrits sur les listes électorales en France. Pour ces élections européennes, on compte 49,5 millions d’électeurs, soit 1,8 million d’électeurs de plus qu’à la présidentielle de 2022. Et pour revenir au cas toulousain, le nombre d’électeurs radiés compte pour moins de 4 % du corps électoral, qui totalise 265 172 votants. Un poids bien moindre que celui du soupçon de la manipulation électorale.

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