Pour Marine Tondelier et sa veste verte, ces législatives 2024 signent un retour gagnant

Marine Tondelier s’est imposée comme une figure importante à gauche. (Zakaria Abdelkafi/AFP)
ZAKARIA ABDELKAFI / AFP Marine Tondelier s’est imposée comme une figure importante à gauche. (Zakaria Abdelkafi/AFP)

PROFIL - Elle porte l’une des vestes les plus célèbres de France. De couleur verte s’il vous plaît, comme le combat pour l’écologie. Un compte X a même été monté à la hâte afin de recenser toutes les apparitions publiques de cette « petite veste verte préférée de Marine Tondelier, la boss des Écologistes, trop bien sapée, qui va faire gagner le Nouveau Front populaire le 7 juillet » dixit sa bio. Au-delà de cet accessoire fétiche qu’elle ne quitte plus et qui fait sa marque de fabrique, contribuant à la hype qui s’accentue depuis dimanche soir, la secrétaire nationale des Écologistes est saluée pour son ton offensif contre l’extrême droite, en faveur du barrage républicain ou pour l’unité de la gauche.

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Jusque-là peu connue des Français, celle qui a remplacé Julien Bayou à la tête des Verts en 2022 est devenue en quelques jours une figure incontournable du Nouveau Front populaire. Ses nombreuses interventions à la télé et à la radio ont contribué à en faire un personnage central, animé par des colères, de la joie et parfois, de la tristesse. C’est elle que France Inter invite dans sa matinale, la plus écoutée du pays, au lendemain du premier tour des élections législatives. C’est elle que TF1 reçoit dans son journal de 20h, le plus regardé de France, ce mardi soir. Libération a même titré : « L’écologiste Marine Tondelier, trait d’union et révélation de la gauche ». Le média engagé Bon Pote estime que « dans l’effondrement moral de la classe politique actuelle, Marine Tondelier fait beaucoup de bien ».

L’émotion de Marine Tondelier sur France Inter

Comment expliquer cet enthousiasme soudain pour une personnalité qui, il y a un mois encore, était décriée en interne pour une campagne des européennes calamiteuse, en lien avec la tête de liste Marie Toussaint ? Ses mots forts et percutants, facilement déployables sur les réseaux sociaux, l’ont aidée à percer le mur du son médiatique. Dimanche soir, à 20h53, elle prend les devants et lance le hashtag Nouveau Front républicain. Clin d’œil évident au Nouveau Front populaire, crée deux semaines plus tôt. Partout où on lui tend un micro, Marine Tondelier martèle ce même message. Et interpelle les poids lourds macronistes sur leur capacité à faire bloc contre le RN.

Quand elle succède à Bruno Le Maire dans les studios d’Inter lundi matin, elle sonne la charge avec virulence et émotion. « Ce que vient de faire Bruno Le Maire, c’est un comportement de lâche et de privilégié. C’est hors-sol, lunaire et pas à la hauteur de l’Histoire », fuse-t-elle en ravalant des larmes. Le ministre de l’Économie venait de dire qu’il refusait de choisir entre LFI et le RN. La séquence est vue 2,4 millions de fois sur Instagram. Un carton.

Son émotion ce matin-là est forcément liée à son histoire personnelle. L’extrême droite, elle connaît. Native d’Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), où elle vit encore aujourd’hui, comme ses parents et ses grands-parents, Marine Tondelier met un point d’honneur à se présenter à chaque élection. Aux élections législatives, elle était la suppléante d’une candidate socialiste éliminée au premier tour face à Marine Le Pen.

Dans le dispositif calé en amont du premier tour par le NFP, la cheffe des écolos était censée participer au débat d’entre-deux-tours. Manuel Bompard (LFI) et Olivier Faure (PS) la première semaine, Marine Tondelier et Fabien Roussel (PCF) la deuxième.

C’était sans compter sur le piège tendu par le patron du RN Jordan Bardella qui, lundi matin sur les coups de 11h, a proposé de débattre avec Jean-Luc Mélenchon, qu’il juge être le leader officieux de la coalition de gauche. « Après ce premier tour, deux choix s’offrent aux Français. Je suis donc prêt à débattre, projet contre projet, avec Jean-Luc Mélenchon. Les Français veulent de la clarté », déclare-t-il devant le siège de son parti. Ni une ni deux, Marine Tondelier lui répond : « C’est à mon tour de représenter notre coalition. Dois-je comprendre que vous n’osez pas débattre avec moi ? » Un message qui restera lettre morte, le leader d’extrême droite préférant la snober.

« Rare femme cheffe de parti invisibilisée »

Elle interprète ce refus de débattre avec elle comme une volonté de ne s’adresser « qu’à des hommes ». « Le RN et les femmes : CQFD », écrit-elle sur X. Avant de lancer un mot d’ordre, repris partout : « Où sont les femmes ? »

« Les femmes ont leur place en politique et doivent être représentées notamment dans les grands moments de l’Histoire où, trop souvent, elles ont été invisibilisées », écrivent les Verts dans un communiqué. Sandrine Rousseau lui emboîte le pas, considérant que « le Nouveau Front populaire ne peut pas être représenté que par des hommes dans tous les débats. C’est impossible en fait. »

Ce à quoi une dizaine d’artistes, actrices et écrivaines ont répondu par une tribune dans Libération. Juliette Binoche, Vanessa Springora, Camille Kouchner et Pénélope Bagieu notamment estiment que le refus de Jordan Bardella d’affronter Marine Tondelier, « rare femme cheffe de parti invisibilisée et même silenciée », « révèle une réalité inquiétante sur le rapport de l’extrême droite aux femmes et à leur représentation en politique. L’invisibilisation des femmes n’est pas une option. »

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La séquence politique actuelle est l’occasion inespérée pour l’ancienne collaboratrice de Cécile Duflot de rebondir. Ces derniers mois, son nom est resté en travers de la gorge de nombreux sympathisants de gauche pour qui Marine Tondelier était égal à refus de faire une liste commune aux européennes. « Non, c’est non. Il faut arrêter de faire les forceurs », avait-elle déclaré en direction notamment de La France insoumise.

Les écolos se sont finalement pris une gamelle (5,5 %) et ne sont plus que cinq élus, le seuil minimum, au Parlement européen. Dans son camp, certains demandaient l’organisation d’un congrès exceptionnel à l’automne, espérant ainsi pouvoir obtenir sa tête. Las, l’épisode des derniers jours semble avoir joué en sa faveur. Marine Tondelier peut remercier Emmanuel Macron, la dissolution l’a aidée à sauver sa peau.

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