La France a « plus d’un an de retard » sur ses politiques climatiques, alerte le Haut Conseil pour le Climat

Sur la politique énergétique ou encore l’adaptation au changement climatique, le gouvernement est très en retard.

Difficile de cacher un tel décalage. Malgré ses efforts, la France accumule non pas quelques mois mais « plus d’un an de retard » dans ses politiques climatiques, alerte le Haut Conseil pour le Climat (HCC) ce jeudi 20 juin. Dans son rapport annuel écrit bien avant la dissolution de l’Assemblée nationale, l’organisme indépendant chargé d’évaluer l’action climatique du gouvernement se dit « vivement préoccupé ».

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Les experts estiment que ce délai « fragilise la crédibilité de la politique climatique de la France ». La liste des textes qui se font attendre est longue : « ni la loi de programmation énergie et climat (LPEC), ni la Stratégie française énergie et climat (SFEC), ni le 3e Plan national d’adaptation au changement climatique (PNAC), n’ont été formellement adoptés », pointe entre autres le Haut Conseil pour le Climat. Or ces textes constituent l’essentiel du cadre de la politique climatique nationale.

Le gros des retards signalés par le HCC concerne la transition énergétique. Difficile en effet d’ignorer le retard qui concerne la loi de programmation énergie et climat, censée définir les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Ce texte qui aurait dû être voté en juillet 2023 a finalement été abandonné au mois d’avril 2024. Le ministre de l’Énergie Roland Lescure avait alors expliqué manquer d’une majorité pour adopter la loi. « À l’Assemblée, il y a une vraie guerre de religion entre pro nucléaire et pro énergies renouvelables. Or, nous avons vraiment la volonté d’être efficaces, rapides et de donner de la lisibilité », avait déclaré son entourage au Monde.

Faute de mener ce texte à son terme, le gouvernement doit a minima présenter la troisième Programmation pluriannuelle de l’énergie. Ce cadre détermine la proportion de renouvelable, de nucléaire et de fossiles dans le « mix » énergétique français… pour la période 2024-2033. Mais sa publication n’est pas prévue avant la fin de l’année 2024 ; si le gouvernement ne change pas…

Les mois de retard s’accumulent aussi concernant le troisième volet du Plan national d’adaptation au changement climatique, qui doit permettre de préparer la France aux conséquences d’un réchauffement mondial de +1,5 °C en 2030, +2 °C en 2050 et +3 °C en 2100. Après des consultations internes, le ministère de la Transition écologique a finalement promis qu’un texte contenant une cinquantaine de mesures serait prêt « au début de l’été ».

Malheureux concours de circonstances : sa présentation prévue début juin a finalement été annulée par la dissolution surprise de l’Assemblée nationale. La décision d’Emmanuel Macron suite au score historique de l’extrême droite aux élections européennes a en effet mis en suspens tous les textes de loi et commissions qui étaient cours dans l’enceinte du Palais Bourbon.

La tempête politique à laquelle a laissé place la dissolution fragilise d’autant plus l’avenir de ces dossiers en retard sur le climat. La montée du Rassemblement national inquiète ainsi toute une partie de la communauté scientifique : « Le RN n’a aucune ambition en termes de lutte contre le changement climatique. C’est le vide », souffle le climatologue du Giec Jean Jouzel. « Le changement climatique ne va pas disparaître parce qu’on l’ignore », tacle également Valérie Masson Delmotte dans les colonnes du Monde, membre du Haut Conseil pour le climat et ancienne vice-présidente du groupe de travail n° 1 du Giec.

L’avenir du Haut Conseil pour le Climat lui-même paraît incertain dans un scénario où le Rassemblement national accéderait à l’Élysée. L’organisme indépendant avait été créé par Emmanuel Macron en novembre 2018 dans le but de renforcer l’ambition de la France sur le climat. Or plusieurs de ses recommandations, notamment sur les éoliennes ou la transition agricole, vont à l’encontre du programme du parti de Jordan Bardella.

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