Féminicide à Strasbourg: 30 ans de réclusion pour l'ex-compagnon

L'auteur du meurtre de Yasemin Cetindag, victime d'un féminicide survenu en décembre 2020 à Strasbourg, a été condamné à 30 ans de réclusion criminelle (MMDF)
L'auteur du meurtre de Yasemin Cetindag, victime d'un féminicide survenu en décembre 2020 à Strasbourg, a été condamné à 30 ans de réclusion criminelle (MMDF)

L'auteur du meurtre de Yasemin Cetindag, victime d'un féminicide survenu en décembre 2020 à Strasbourg, a été condamné mercredi à 30 ans de réclusion criminelle par la cour d'assises du Bas-Rhin, un verdict accueilli avec satisfaction par les avocats des parties civiles.

L'accusé, âgé de 45 ans, blouson noir sur sweat noir dans son box, n'a pas exprimé de réaction à l'annonce de la décision. Il a néanmoins commenté à voix haute cette décision quelques minutes plus tard, ce qui lui a valu des insultes en provenance de l'auditoire, provoquant un incident d'audience.

"Justice a été rendue", a déclaré Sendegul Aras, avocate de la mère de la victime, saluant une peine "sévère mais juste". "Maintenant nous allons attendre si l'accusé va user de son droit d'appel, en espérant que ce ne soit pas le cas pour que les parties civiles puissent enfin faire leur deuil".

"La fermeté de la décision est à la hauteur du crime commis", a abondé Xavier Metzger, avocat de la sœur de la victime.

La peine prononcée par le tribunal, assortie d'une période de sûreté des deux tiers (contre la moitié en temps normal), est exactement conforme aux réquisitions de l'avocat général, Alexandre Chevrier.

A l'inverse, la défense avait plaidé les "violences volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner", un crime passible de vingt ans de réclusion. Cette alternative a été écartée par la cour, qui a retenu "l'intention homicide" de l'accusé.

"Cette décision me semble sévère par rapport à la sûreté prononcée, mais sur le quantum nous savions que les 30 années étaient encourues", a réagi Caroline Bolla, avocate de la défense. "Pour la façon dont s'est déroulé le procès, j'ai connu des audiences plus sereines", a-t-elle remarqué.

Le 23 décembre 2020, Yasemin Cetindag, 25 ans, mère de quatre enfants, est morte étranglée par son ex-compagnon, dont elle s'était séparée deux mois plus tôt, après dix ans d'une relation chaotique et toxique.

Son corps avait été retrouvé plusieurs jours plus tard, enterré en forêt de Vendenheim, au nord de Strasbourg.

- Interrogations et colère -

Après avoir dans un premier temps nié toute implication dans la disparition de la jeune femme, son ex-compagnon avait fini par avouer ses actes, accablé par les témoignages et les preuves, son ADN découvert sur un couteau, le sang de la victime retrouvé partout dans l'appartement et sur ses chaussures, le bornage téléphonique et son achat d'une grande malle de transport.

Ses enfants avaient assisté à la scène, confiant ensuite à leur grand-mère : "papa a fait bobo à maman", "il a sorti le foulard, il a serré le cou de maman".

Les violences conjugales récurrentes au sein du couple avaient jusque-là donné lieu au dépôt de quatre plaintes et 13 mains courantes, qui n'avaient abouti qu'à un rappel à la loi à l'encontre du conjoint.

"Ce constat peut légitimement susciter des interrogations, de la colère. C'est compréhensible. Est-ce qu'on aurait pu empêcher ce crime ? Est-ce qu'on aurait pu faire mieux ? La question se pose, je ne suis pas en état d'y répondre", a déclaré l'avocat général au cours de son réquisitoire.

"Mais depuis lors, des enseignements ont été tirés, et de cette affaire en particulier. Une priorité absolue est donnée aux violences conjugales, dans ce tribunal comme dans toutes les juridictions", a-t-il assuré.

En moyenne, un féminicide survient tous les trois jours en France. Selon le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti il y a eu 94 féminicides en 2023, contre 118 en 2022.

apz/cbn