Voter RN, ni-ni ou blanc? Les cadres et électeurs LR face à l'absence de consigne du parti

Voter pour un candidat de gauche? Donner sa voix au parti présidentiel? Se tourner vers le Rassemblement national? Ou bien voter blanc? Dans les circonscriptions où le candidat des Républicains a été battu au premier tour des élections législatives, le second tour ce dimanche 30 juin s'annonce délicat pour les cadres et électeurs du parti. Officiellement, pas de consigne de vote: aux électeurs et électrices LR de trancher dans l'isoloir.

La direction par intérim des Républicains a ainsi écrit dans un communiqué: "Là où nous ne sommes pas présents au second tour, considérant que les électeurs sont libres de leur choix, nous ne donnons pas de consigne nationale et laissons les Français s'exprimer en conscience", indique le parti qui a recueilli 10,74% des voix au premier tour.

• Pas de front républicain

Le parti refuse donc de participer à un front républicain. Une ligne signée par des ténors et figures importantes des Républicains.

Parmi celles-ci: François-Xavier Bellamy, le vice-président exécutif du parti, Jean-François Copé, le maire LR de Meaux et membre de la commission nationale d'investiture, Daniel Fasquelle, le maire du Touquet et membre du conseil stratégique de LR, mais aussi Annie Genevard, la députée sortante de la cinquième circonscription du Doubs (arrivée en tête avec 35,20% suffrages), Gérard Larcher, le président du Sénat, Bruno Retailleau, le président du groupe LR au Sénat ainsi que Laurent Wauquiez, président de la région Auvergne-Rhône-Alpes arrivé en tête dans la 1re circonscription de Haute-Loire.

Un front républicain refusé par le parti qui pourrait cependant lui être profitable dans certains cas. Laurent Wauquiez, par exemple, affrontera le candidat RN en duel après le désistement de la candidate écologiste pourtant qualifiée pour le second tour.

Mais cette ligne a ses limites. Car l'eurodéputé fraîchement réélu François-Xavier Bellamy a tout de même précisé sur TF1 dès dimanche soir que "le danger qui guette notre pays aujourd'hui, c'est l'extrême gauche".

Des propos à teneur similaire pour le sénateur Roger Karoutchi, vice-président du Sénat et vice-président de la commission nationale d'investiture. "Dans le cas d'un duel entre un LFI et de l'autre un candidat de l'arc central, moi, je voterai pour l'arc central", précise-t-il à Public Sénat. "Je pense qu'il faut nuancer ce communiqué et être un peu plus clair. Moi, je ne voterai jamais pour LFI".

• Voter pour le RN?

Une situation qui pose de véritables cas de conscience pour certains électeurs LR. "Sérieusement, pour la première fois de ma vie, je suis en train de me poser la question: 'est-ce qu'il faut voter Rassemblement national?'" s'interroge un sympathisant au micro de BFMTV.

D'autres ont déjà fait leur choix. Comme cette électrice qui assure que, bien que ses grands-parents aient été déportés et que "ça fait mal de devoir voter pour le RN", "c'est moins pire (sic) que l'extrême gauche". Un autre indique à BFMTV que même si "on sait très bien que le RN, sur le plan économique, c'est peut-être pas les plus crédibles", il ajoute que ses représentants "incarnent une autorité que LR a perdue". "C'est aussi ça que l'électeur recherche."

Sur les réseaux sociaux, beaucoup de sympathisants du parti se rangent ainsi derrière Éric Ciotti, le président contesté des Républicains, et appellent d'ores et déjà à voter pour l'extrême droite. "Alliance avec le RN seule solution", écrit un internaute sur Facebook. "Je donnerai ma voix au RN", poursuit une autre. "Contre la gauche et contre le macronisme qui nous a mis à genoux. Je vote RN." "Honte à vous de ne pas demander de voter contre la gauche", poursuit une sympathisante en réaction au communiqué des Républicains. "Un seul mot d'ordre, tous à droite."

Brice Saint-Cricq, candidat LR malheureux de la 3e circonscription des Landes, assure par exemple qu'il lui est impossible de voter pour un candidat soutenu par la gauche. Au second tour ce dimanche, ses électeurs et électrices auront le choix entre Boris Vallaud, pour le Nouveau Front populaire, et la candidate du RN Sylvie Franceschini. Dans un communiqué, s'il ne donne pas de consigne de vote, il rappelle avoir "du respect pour les électeurs du RN qui, pour se faire entendre, ont choisi les urnes plutôt que la rue".

• Ni LFI, ni RN

Un point de vue que ne partage pas Valérie Pécresse, la présidente de la région Île-de-France et ex-candidate LR à la présidentielle de 2022. Pas question pour elle de donner sa voix au RN, laissant la porte ouverte aux interprétations. "J'apporterai mon soutien aux candidats qui se battent contre la montée du RN et de la LFI dont j'ai la conviction que l'arrivée au pouvoir conduirait notre pays au désordre et à la faillite", a-t-elle écrit sur X.

Une ligne ni LFI, ni RN que partage également Jean-François Copé, le maire de Meaux et membre du conseil stratégique des Républicains. "Pas une voix ne doit aller au RN mais pas une voix ne doit aller non plus à LFI", a-t-il affirmé dimanche sur le plateau de BFMTV. "Pour le second tour, ma position est claire: ni extrême droite, ni extrême gauche", a abondé sur France 2 Florence Portelli, la vice-présidente des Républicains.

De là à voter pour un candidat d'Ensemble, le parti de la majorité présidentielle? "Mon combat sera de tout faire pour empêcher de livrer la France aux fossoyeurs de son avenir: le Rassemblement national et La France insoumise", a écrit sur X Gérard Larcher. Si le président du Sénat ajoute que "chacun des électeurs s'exprimera en conscience, en fonction de la diversité des situations locales", il précise que pour sa part, il soutiendra "les candidats de la droite et du centre".

Xavier Bertrand, le président de la région Hauts-de-France, a lui déclaré sur RTL que "faire barrage, ce n'est pas un programme" et qu'il "n'y a aucune fatalité à voir le RN obtenir la majorité absolue" et il a appelé à voter pour "tous les candidats qui ne sont pas les extrêmes, LFI et Rassemblement national".

• Une autre voie?

D'autres n'excluent pas de voter à gauche. C'est le cas Pierre Bédier, président du conseil départemental des Yvelines, qui a quitté LR quand Éric Ciotti a annoncé une alliance avec le Rassemblement national. Il a annoncé sur X soutenir le candidat écologiste Benjamin Lucas, arrivé en tête sous l'étiquette du Nouveau Front populaire (44,92%) face au candidat RN Cyril Nauth (30,97%) dans la 8e circonscription des Yvelines.

"Entre un candidat social-démocrate intelligent et sympathique et un personnage antipathique, incompétent, sûrement pas démocrate et pas sûrement social, le choix est vite fait. En ce qui me concerne je voterai Benjamin Lucas", écrit cet ancien député UMP et secrétaire d'État sous la présidence de Jacques Chirac. Et ajoute: "Je préfère la qualité des Hommes au vice des idéologies."

• Le vote blanc

Pour certaines figures de la droite, un second tour qui verrait s'affronter un candidat d'extrême droite et un autre du Nouveau Front populaire représente un choix impossible. "En cas de duel RN/Nouveau Front populaire, ma position personnelle est nette: vote blanc", écrit dans un communiqué publié sur X la présidente des Pays de la Loire Christelle Morançais, ex-LR et proche d'Édouard Philippe.

Article original publié sur BFMTV.com