Présidentielle américaine : comment Kamala Harris pourrait remplacer par défaut Joe Biden

Alors que l’état de santé de Joe Biden inquiète, le nom de sa vice-présidente émerge progressivement pour le remplacer dans la campagne présidentielle.

Alors que le président des États-Unis Joe Biden inquiète les démocrates en multipliant les absences et maladresses, Kamala Harris pourrait le remplacer dans la course à la Maison blanche.

ÉTATS-UNIS - Il y a quelques jours encore, l’hypothèse ne méritait pas que l’on s’y attarde. Et pourtant, depuis le débat télévisé désastreux de Joe Biden face à Donald Trump le 27 juin, l’éventualité de voir le président des États-Unis remplacé comme candidat démocrate dans la course à la Maison Blanche paraît nettement plus sérieuse. Et le nom de sa vice-présidente Kamala Harris est de plus en plus cité.

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En multipliant les absences et les maladresses, Joe Biden inquiétait déjà depuis des mois dans son propre camp. Mais son débat face à Donald Trump, mêlant bégaiements, discours décousus et regards perdus dans le vide, a confirmé les interrogations sur sa capacité à gouverner, et par conséquent ouvert la voie à de potentiels remplaçants. Joe Biden aurait lui-même évoqué auprès d’un proche la possibilité de se retirer, a révélé le New York Times ce mercredi. La Maison Blanche a très vite démenti.

Dans ce contexte fébrile, un nom émerge timidement pour le remplacer : « après avoir profondément réfléchi ces derniers jours, je crois fermement que notre meilleure voie à suivre est Kamala Harris. (...) Elle est prête pour ce poste », a lancé lundi le démocrate Tim Ryan, ancien membre de la Chambre des représentants, dans une tribune publiée dans le journal Newsweek. « Nous avons un groupe de personnes qui pourraient faire un meilleur travail, y compris la vice-présidente Kamala Harris », a renchéri ce mercredi 3 juillet l’ex-secrétaire au Logement Julián Castro sur MSNBC.

« Beaucoup de gens aimeraient faire une déclaration comme celle-ci, mais ils craignent de faire quoi que ce soit qui pourrait rendre la tâche encore plus difficile au président Biden », estime le représentant démocrate Lloyd Doggett.

C’est justement l’impasse dans laquelle se trouve la vice-présidente, qui mène depuis plusieurs jours un exercice d’équilibriste délicat. Au lendemain du débat, Kamala Harris a ainsi défendu Joe Biden sans pour autant ignorer la faiblesse de son discours, « lent au démarrage ». « Elle voulait reconnaître ce que tout le monde voyait », rapporte l’un de ses proches collaborateurs au journal Politico.

Pour ne pas s’empêtrer dans des justifications hasardeuses sur l’état de santé du président, l’élue californienne a recentré sa prise de parole sur un démenti des fake news propagées par Donald Trump lors du débat, combinant deux objectifs en apparence difficilement conciliables : défendre la crédibilité de Joe Biden tout en préparant le terrain pour sa propre candidature éventuelle, sans pour autant la déclarer officiellement.

Au micro de CBS News ce mardi, elle s’est à nouveau dite « fière » d’être la « colistière » du président. « Joe Biden est notre candidat, nous avons battu Donald Trump une fois et nous allons le battre à nouveau », a-t-elle affirmé.

C’est également la position martelée jusqu’à présent par le porte-parole de campagne, Kevin Munoz, qui a réaffirmé le même jour : « le président Joe Biden est notre candidat, la vice-présidente Kamala Harris est notre colistière, et nous gagnerons en novembre ».

Dans l’hypothèse où Joe Biden viendrait à se retirer de l’élection – une piste jusqu’ici évacuée par son entourage et le président lui-même –, il peut le faire jusqu’à la convention d’investiture démocrate prévue début août, dans cinq semaines, qui doit théoriquement permettre de l’investir officiellement. Pour autant, retirer sa candidature « serait compliqué et ouvrirait la porte à des bouleversements politiques », rappelle le New York Times.

Car les statuts du parti ne prévoient pas de remplaçant de facto. Et le président ne pourrait pas obliger les délégués du congrès à soutenir le candidat de son choix, même s’il s’agit de sa vice-présidente. En revanche, en tant que colistière, cette dernière pourrait utiliser les fonds déjà collectés par son comité de campagne, ce qui lui donne un avantage.

Kamala Harris bénéficierait également de soutiens importants, à commencer par celui de l’influent Jim Clyburn. « Je la soutiendrai si Biden devait se retirer », a ainsi affirmé mardi le représentant démocrate de la Caroline du Nord, en insistant sur le fait que « si Biden décide de ne pas se présenter, Harris doit être le choix du parti ».

Mais alors que l’enjeu principal du scrutin reste, pour les démocrates, d’empêcher une nouvelle arrivée au pouvoir de Donald Trump, les sondages estiment que Kamala Harris aurait du mal à convaincre assez d’électeurs. Selon une étude publiée ce mardi par CNN, la vice-présidente ne remporterait que 45 % des voix face à Donald Trump, contre 47 % pour l’ex-président américain. C’est tout de même mieux qu’un scénario Biden-Trump, avec respectivement 43 % et 49 % des intentions de votes.

L’actuelle vice-présidente arriverait ainsi à récolter un peu plus de voix que le locataire de la Maison blanche grâce à sa popularité parmi les électeurs démocrates, en particulier les femmes, les jeunes et les électeurs noirs. À l’inverse, faire le choix d’un homme blanc pour remplacer Joe Biden pourrait se solder par une baisse dans les sondages pour le parti démocrate, analyse Politico. Plusieurs noms émergent pourtant : Josh Shapiro, gouverneur de Pennsylvanie, Gavin Newsom (Californie), J.B. Pritzker (Illinois) ou encore Andy Beshear (Kentucky).

Le nom du secrétaire aux transports Pete Buttigieg, candidat à la présidentielle en 2020, ressort également, tout comme celui du sénateur Cory Booker du New Jersey, rapporte le New York Times. Quelques têtes féminines tirent enfin leur épingle du jeu : Gretchen Whitmer (Michigan) ou la sénatrice Amy Klobuchar du Minnesota. Tous restent moins identifiés que la vice-présidente du pays.

Cet écart de popularité est même flagrant, comme le montre un récent sondage de Politico : 41 % des électeurs démocrates placent Kamala Harris comme candidate favorite pour une primaire démocrate en 2028, tandis que Pete Buttigieg, le secrétaire d’État aux transports, arrive en deuxième position avec 15 %, suivi par Gavin Newsom, avec 14 %.

Avec un tel écart, et face aux inquiétudes concernant l’état de santé de Joe Biden, Kamala Harris se dessine progressivement une place de remplaçante par défaut. Alors qu’il s’entretient mercredi avec les gouverneurs démocrates du pays, le président prendra la parole dans une interview diffusée sur ABC en deux parties, vendredi et dimanche. La Maison blanche promet également une conférence de presse « en solo » la semaine prochaine.

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