Législatives : pouvoir d'achat, fiscalité, dépense publique... Que proposent le RN, le Nouveau Front populaire et la majorité ?

Les représentants des trois principaux blocs étaient invités à détailler leurs propositions devant le patronat ce jeudi. Le point sur leur programme.

Boris Vallaud et Eric Coquerel ont représenté le Nouveau Front Populaire lors d'un échange avec le patronat (Photo by JULIEN DE ROSA / AFP)
Boris Vallaud et Eric Coquerel ont représenté le Nouveau Front Populaire lors d'un échange avec le patronat (Photo by JULIEN DE ROSA / AFP)

L'heure était au grand oral pour les trois blocs politiques principaux qui vont se présenter face aux électeurs lors des élections législatives des 30 juin et 7 juillet prochains. Ce jeudi, Jordan Bardella et Éric Ciotti pour le RN, Éric Coquerel et Boris Vallaud pour le Nouveau Front Populaire, Bruno Le Maire pour "Ensemble" ainsi qu'Édouard Philippe (dont le parti Horizons est membre de la majorité) étaient invités à détailler le volet économique de leur programme en cas d'arrivée à Matignon au soir du 7 juillet. Le point sur leurs différentes propositions.

  • Le pouvoir d'achat

Le pouvoir d'achat est au coeur des préoccupations des Français lorsqu'ils votent, comme l'ont révélé plusieurs enquêtes menées avant les élections européennes, dont un sondage Ipsos Sopra Stéria qui le plaçait en tête des sujets pris en compte pour décider du candidat pour lequel les électeurs allaient voter, rapporte Public Sénat.

Dans la continuité de son action, la majorité souhaite augmenter le montant de la prime dite "Macron", versée par les entreprises, en augmentant son plafond à 10 000 euros par an, sans charge ni impôt. À destination des retraités, on compte aussi la revalorisation des retraites, indexées sur l'inflation.

Gabriel Attal a annoncé une réduction des factures d'électricité de 15% l'hiver prochain, une mesure que les experts jugent facilitée par la baisse des prix sur le marché, mais aussi par la réforme du amrché européen de l'électricité.

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Parmi les autres mesures proposées en faveur du pouvoir d'achat, "des achats groupés" de fournitures scolaires pour en baisser le prix jusqu'à 15 %, l'extension de la "complémentaire santé publique à 1 euro par jour" aux "3 millions de retraités, étudiants, indépendants, demandeurs d'emploi qui aujourd'hui n'ont pas de mutuelle privée et sont au-dessus du seul de la CMU-C", ou encore le doublement des véhicules électriques en leasing social, avec priorité donnée aux soignants, c'est-à-dire la possibilité pour les ménages modestes d'accéder à une voiture électrique pour environ 100 euros par mois.

Interrogé sur les baisses d'impôts, Édouard Philippe s'y est dit favorable à une condition : qu'il y ait en face "une baisse réelle des dépenses publiques".

Du côté du RN, l'amélioration du pouvoir d'achat passerait par la possibilité offerte aux entreprises d'augmenter les salaires sans que ça pèse sur [leur] activité", en permettant "jusqu'à 10% de hausse de salaire exonérées de cotisations patronales", a déclaré Jordan Bardella face au patronat.

Autre proposition, la réduction de la TVA sur les énergies, et le carburant en les passant de 20 % à 5,5 %. La baisse de TVA promise sur les produits de première nécessité se fera quant à elle "dans un second temps".

Le Nouveau Front Populaire a ciblé le pouvoir d'achat des ménages comme le coeur de son programme. Parmi les propositions, augmenter le SMIC à 1600 euros net, une hausse de 10 % du point d'indice des fonctionnaires, un blocage des prix des biens de première nécessité dans l'alimentation, l'énergie et les carburants par décret ou encore l'indexation des salaires sur l'inflation.

Au-delà des salaires, l'énergie est aussi un des moteurs d'augmentation du pouvoir d'achat, l'alliance a gauche voulant revenir sur la hausse de la taxe gouvernementale et l'annulation la hausse programmée du prix du gaz au 1er juillet.

  • Les dépenses publiques

Alors que la forte hausse de la dette publique inquiète certains économistes, le niveau des dépenses publiques est au coeur des débats politiques depuis plusieurs mois à droite, et s'immisce dans la campagne des législatives

Si le programme présenté par Gabriel Attal n'évoque pas la question des dépenses publiques en vue des élections législatives, Bruno Le Maire, ministre de l'Économie a rappelé sa détermination en cas de victoire à poursuivre le redressement des finances publiques de la France, épinglée par la Commission européenne pour son lourd déficit public.

Pour rétablir les comptes publics, l'exécutif prévoyait un effort budgétaire de 20 milliards supplémentaires en 2024, puis encore 20 milliards en 2025, excluant toute hausse d'impôts, avant la dissolution de l'Assemblée nationale.

Jordan Bardella veut remettre de l'ordre dans les comptes publiques, évoquant "beaucoup de pistes d’économies à faire dans la dépense publique", notamment en luttant contre la fraude et l'immigration, qui représente selon lui "un coût considérable pour les finances de l'Etat", a-t-il déclaré devant le patronat. À noter néanmoins que l'impact sur les finances publiques est considéré comme faible par les économistes.

Sur la réforme des retraites, le RN ne cesse de changer d'avis, entre abrogation de la loi fixant le départ à 64 ans, statut quo comme Jordan Bardella l'a rappelé devant le patronat ou départ à 60 ans comme le promettait Marine Le Pen en 2022. Seule certitude rappelée au fil du temps : permettre un départ plus tôt pour les carrières longues.

"Il faut davantage de dépenses publiques", a affirmé Manuel Bompard sur Franceinfo lundi 17 juin. "Ça veut dire qu'il faut augmenter les recettes", a-t-il expliqué, défendant une taxe sur les superprofits qui générerait selon lui 15 milliards d'euros ainsi qu'un impôt de solidarité sur la fortune renforcé.

Dans le programme de l'alliance de gauche, ce sont avant tout les aides à destination des entreprises qui sont évoquées pour réduire les dépenses publiques. Les aides ou les exonérations accordées par l'État aux entreprises sont "quasiment sans conditions aujourd'hui", a affirmé Éric Coquerel, et "il faut les réorienter différemment", expliquait-il à l'invitation des principales organisations patronales. "Nous prioriserons, dans les aides de l'État, les entreprises qui créent de l'emploi, les entreprises qui payent bien leurs salariés", a affirmé Éric Coquerel.

Sur la réforme des retraites, le NFP propose d'abroger la loi fixant le départ à 64 ans, revenant ainsi à 62 ans, avant d'envisager la retraite à 60 ans au terme de négociations internes au parti du NFP, tous n'étant pas accordés sur la question.

  • La fiscalité

Ce que propose la majorité

La ligne directrice, qu'Édouard Philippe a qualifié de "pro-business" devant le patronat, revient à réduire les dépenses publiques et ne pas augmenter les impôts des entreprises. Parmi ses mantras répétés devant les organisations patronales, "ne pas pressurer d'impôts les entreprises" et leur "garantir un environnement le plus stable possible". Gabriel Attal a préconisé une baisse des charges pour les bas salaires au-dessus du Smic pour "désmicardiser" la France. Le Premier ministre a annoncé se fixer une "règle d'or budgétaire", en promettant d'inscrire dans la loi le fait de ne pas augmenter l'impôt des Français.

Édouard Philippe s'est aussi déclaré favorable à une "règle d'or" empêchant "d'augmenter la pression fiscale au-delà d'un certain taux" et "peut-être aussi de créer une règle juridique qui contraint l'État […] à ne pas laisser dériver la dépense publique".

Ce que propose le Rassemblement national

Le RN envisage une exonération de cotisations patronales sur les salaires (inférieurs à trois fois le smic) qui ont été augmentés d'au moins 10 %, mais veut aussi ouvrir une discussion sur le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (le CICE). Enfin, le RN veut remplacer l'IFI (impôt sur la fortune immobilière) – par un impôt sur la fortune financière.

"Nous entendons engager, dès l'automne, des États généraux de la simplification" pour les entreprises françaises, a assuré Jordan Bardella. "Je laisserai douze mois [aux entreprises], secteur par secteur, filière par filière, pour dresser un état des lieux des contraintes qui pèsent sur la croissance", a-t-il expliqué.

Ce que propose le Nouveau Front Populaire

Le NFP, quant à lui, propose une nouvelle progressivité de l’impôt sur le revenu, qui serait doté non plus de cinq mais de 14 tranches, pour baisser l’impôt sur le revenu des moins favorisés pour concentrer l’effort de solidarité chez les plus riches.

Dans son programme, le Nouveau Front Populaire a affiché sa volonté d'"abolir les privilèges des milliardaires", et promet de "rétablir un impôt de solidarité sur la fortune (ISF)", supprimé en 2018, qui sera "renforcé avec un volet climatique".

Il prévoit de rétablir une mesure de lutte contre l'exil fiscal des contribuables, l'"exit tax" ; de supprimer la "flat tax", un taux de prélèvement forfaitaire unique sur les revenus du capital ; et, au niveau européen, de "taxer les plus riches" et "généraliser la taxation des superprofits". L'impôt sur l'héritage sera réformé avec l'instauration d'"un héritage maximum".

Le programme propose une "taxation renforcée des transactions financières" et de "soumettre à cotisation (pour les retraites) les dividendes, la participation, l'épargne salariale, les rachats d'action, les heures supplémentaires", en plus de "créer une surcotisation sur les hauts salaires". "Avec de la justice fiscale, on peut baisser les impôts des PME", a avancé Boris Vallaud. "On peut les protéger" et "leur réserver un certain nombre de marchés", a-t-il poursuivi à destination du patronat.