Législatives 2024 : Gouvernement « provisoire », « technique », « Assemblée plurielle »… Les mots de l’après 7 juillet

A photograph taken on May 17, 2022 shows a general view of the hemicycle of the French National Assembly in Paris. (Photo by STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)
STEPHANE DE SAKUTIN / AFP A photograph taken on May 17, 2022 shows a general view of the hemicycle of the French National Assembly in Paris. (Photo by STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

POLITIQUE - Le 7 juillet n’est pas encore passé que tout le monde se projette dans l’après. Comment gouverner la France face aux scénarios qui se profilent à l’Assemblée nationale, en particulier l’absence de majorité, même relative ? Les idées ne manquent pas et les termes de « gouvernement technique », « provisoire » et coalition côtoient désormais celui de cohabitation.

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Vaut-il mieux acter un gouvernement pour parer au plus pressé ? Faut-il, au contraire, tenter de faire dialoguer les partis dans une coalition ? Ou alors faire sans eux (ou presque) et miser sur des profils apolitiques ? Dans une logique de barrage républicain à l’extrême droite, tous les autres partis lancent des idées en cas d’absence de majorité absolue ou relative du Rassemblement national.

Certaines options évoquées dans cet entre-deux-tours n’ont jamais été vécues sous la Ve République. Parfois, il s’agit aussi de nuances sémantiques mais stratégiques.

· « Gouvernement technique »

L’option est évoquée en cas d’absence de majorité à l’Assemblée nationale comme une solution pour éviter le blocage politique du pays : un « gouvernement technique », composé de hauts fonctionnaires ou experts sans étiquette partisane.

La France n’en a jamais connu. L’Italie en a connu plusieurs, notamment lorsque l’ex-président de la Banque centrale européenne Mario Draghi a piloté un gouvernement de ce type pendant la crise du Covid. Lui-même haut fonctionnaire affilié à aucun parti, il avait nommé aussi bien des spécialistes (préfet, magistrate…) que des personnalités politiques de tous les bords, sauf d’extrême droite. Il a explosé un an et 5 mois plus tard, au profit de Giorgia Meloni.

La constitution d’un tel ensemble nécessite de nommer à sa tête une personnalité consensuelle, transpartisane, pour ne braquer aucun camp à l’Assemblée nationale. Un immense défi pour le président de la République comme pour les partis en mesure de proposer un nom, au vu de la situation politique française.

· Un gouvernement provisoire, façon de Gaulle ?

Le « gouvernement provisoire », c’est Xavier Bertrand qui « l’appelle de ses vœux » dans une référence à celui mis en place juste avant la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Le président LR de la région des Hauts-de-France le présente comme une équipe qui aurait le soutien, « à l’Assemblée, des hommes et les femmes de bonne volonté, capable de s’ouvrir sur un projet concret » et qui, à la différence d’un gouvernement technique, ne se contenterait pas « d’expédier des affaires courantes. »

Le gouvernement provisoire de la République française (GPRF) s’est construit à partir de juin 1944 autour de Charles de Gaulle. Après des législatives en 1945 où socialistes, communistes et démocrates-chrétiens s’imposent, il intègre des ministres issus de ces bords, ainsi que des personnalités sans appartenance politique comme André Malraux. Remanié au fil des mois, le gouvernement provisoire est dissous en 1946 avec l’entrée en vigueur de la IVe République. Sur son site, l’Assemblée nationale parle aussi de « gouvernement d’union nationale ».

· « Grande coalition » ou « assemblée plurielle »

C’est le terme qu’emploie Yaël Braun-Pivet, ex-présidente de l’Assemblée nationale candidate dans les Yvelines : une « grande coalition allant des LR aux écologistes, socialistes et aux communistes ». Gabriel Attal préfère parler d’une Assemblée « plurielle » composée de « différentes forces politiques » dont les futurs députés macronistes. La ministre de l’Éducation Nicole Belloubet emploie pour sa part les termes de « majorité de compromis » sur la base d’un « arc central républicain » dont la Macronie serait la « troisième force ».

De quoi s’agit-il ? Si les mots diffèrent, l’idée reste similaire : une forme d’accord entre différents partis à l’Assemblée. Encore faut-il savoir comment cela se traduirait au sein du gouvernement. D’autant qu’en théorie, un parti peut soutenir un gouvernement sans y participer.

Le cas d’une coalition ne s’est jamais présenté sous la Ve République, « qui a en fait été pensée exactement en opposition à ce type de système », relève la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina, de l’Université de Rouen auprès de l’AFP. Pour la spécialiste, il s’agirait avant tout de « gouverner a minima », en essayant par exemple de faire passer le budget à l’automne, mais sans grande ambition réformatrice.

Reste à savoir avec qui construire cette coalition. Ce sera la question déterminante, délicate aussi bien sur le plan des idées qu’arithmétique. Sans le RN ni LFI, partis que certains cadres du camp présidentiel excluent en bloc, et a fortiori sans tout ou partie de LR, il s’avérerait quasiment impossible d’aboutir ne serait-ce qu’à une majorité relative conséquente à l’Assemblée. Sans oublier qu’à gauche, la participation ne fait pas l’unanimité et qu’à l’issue du Conseil des ministres, l’exécutif a fait savoir qu’il « n’y a pas et n’y aura jamais d’alliance avec la France insoumise ».

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