Juge morte en pleine audience à Nanterre: l'autopsie exclut une mort liée "au stress" ou à "la fatigue"

La magistrate présidait une audience lorsqu'elle s'est brusquement effondrée. (PHOTO D'ILLUSTRATION) - Alain Jocard
La magistrate présidait une audience lorsqu'elle s'est brusquement effondrée. (PHOTO D'ILLUSTRATION) - Alain Jocard

La mort brutale de la juge Marie Truchet en pleine audience, le 18 octobre dernier, est devenue un symbole de l’état de délabrement de la justice en France. Après ce tragique événement, les magistrats ont multiplié les initiatives pour dénoncer leurs conditions de travail, appelant à la grève le 22 novembre et annonçant le dépôt d'un recours devant le Conseil d’État.

Seulement, les conclusions de l’autopsie de la magistrate - que BFMTV a pu consulter - révèlent que cette femme de 44 ans est morte d’un "accident vasculaire cérébral (AVC) massif", résultant non pas du "stress" ou de la "fatigue importante" liés à sa fonction, mais plutôt de "son état de santé très sévère."

Marie Truchet s’est effondrée, le 18 octobre à 17h48, alors qu’elle présidait une audience de comparutions immédiates au tribunal judiciaire de Nanterre, dans les Hauts-de-Seine.

Des "ennuis de santé" et une maladie génétique

Dans les conclusions de l’autopsie réalisée le lendemain, le médecin-légiste explique que la juge présentait "un tableau médical très pathologique" auquel s’ajoutait une "susceptibilité cardiaque très importante."

Des "ennuis de santé" que les proches de la magistrate ont d’ailleurs confirmé aux enquêteurs, évoquant notamment la maladie génétique dont elle souffrait. "Un stress et une fatigue importante ne paraissent pas être à l’origine de cet AVC", conclut donc le légiste, non sans avoir noté qu’une "intervention plus rapide des secours n’aurait pas permis de sauver la victime."

Chargé de la procédure ouverte pour rechercher les causes de la mort, le parquet de Nanterre confirme à BFMTV que les premières investigations ont mis en évidence des "troubles de santé significatifs en lien avec le décès", tout en indiquant que ceux-ci doivent encore être "précisés" avant que le dossier ne soit, officiellement, clôturé.

"Le révélateur de la surcharge de travail des magistrats"

Le 25 octobre, alors que ces premiers résultats de l’enquête n’étaient pas connus, des rassemblements avaient été organisés dans de nombreux tribunaux de France. Lors de ces hommages, plusieurs magistrats ont dressé un lien entre les conditions de travail dans le monde judiciaire et le décès de Marie Truchet.

"Dans cette tempête, Marie était là. Solide, motivée et toujours souriante. Elle a hurlé avec nous. Nous avons écrit au Garde des Sceaux. Mais il ne s’est rien passé. (…) Nous avons été abandonnés. Marie est tombée, elle ne s’est jamais relevée", écrivaient dans une lettre ouverte ses collègues de Nanterre.

Il y a quelques jours, certains d’entre eux ont créé l’Association des magistrats du tribunal judiciaire de Nanterre et ont diffusé un communiqué annonçant le dépôt d’un recours devant le Conseil d’État pour "obliger Éric Dupond-Moretti à s’expliquer et pour exiger des renforts", après avoir rappelé que leur collègue était morte "d’épuisement."

"C’est vrai que nous ne connaissons pas exactement les causes de sa mort", admet l’un de ceux qui a participé à cette initiative. "Mais Marie Truchet est devenue un symbole. Le révélateur de la surcharge de travail des magistrats."

Un passage aux urgences quelques jours avant le drame

Ce que personne ne conteste. Qualifiée "d’exemplaire" et "d'’impliquée" par ses proches, Marie Truchet passait, en effet, ses journées à écoper un bateau percé de toutes parts. "Elle voulait résorber son stock de dossiers tout en assurant les audiences et en remplaçant les collègues absents", raconte une magistrate. "Ces deux derniers mois, elle avait décliné les invitations à déjeuner de sa mère pour rédiger des jugements, même le week-end."

Sauf que cette abnégation ne semble pas être à l'origine directe de sa mort. Surtout que, dans son rapport, le médecin-légiste explique ainsi que, quelques jours avant le drame, la juge est passée aux urgences hospitalières de Port-Marly (Yvelines) où une "tension élevée" avait été relevée. Mais Marie Truchet avait quitté l’hôpital en raison "de l’attente trop importante."

Article original publié sur BFMTV.com