HLM : ce que veut changer le gouvernement et ce qu'en pensent les associations

Le ministre délégué chargé du Logement, Guillaume Kasbarian, veut la fin du logement social à vie avec un contrôle régulier de la situation des locataires.

Le ministre délégué au Logement, Guillaume Kasbarian veut mettre fin au logement social à vie (Photo by Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre délégué au Logement, Guillaume Kasbarian veut mettre fin au logement social à vie (Photo by Ludovic MARIN / AFP)

Vers un chamboulement sur le marché des HLM, les habitations à loyer modéré ? Le ministre délégué chargé du Logement veut bousculer les règles qui régissent actuellement le marché.

Dans une interview accordée au quotidien Les Échos, Guillaume Kasbarian détaille des éléments du projet de loi qui doit améliorer l'offre de biens abordables et être présenté le 7 mai en conseil des ministres.

  • Ce que le ministre veut changer pour les HLM

Il faut "réinterroger la pertinence à occuper un logement social de ceux qui ont largement dépassé les plafonds de revenus, ont pu hériter, ont parfois une résidence secondaire en possession, et dont le patrimoine, c'est le sens de la vie, a évolué", a notamment déclaré le ministre, estimant que "quand on a 5,2 millions de logements sociaux en France et 1,8 million de ménages qui candidatent légitimement pour y entrer, est-il normal qu’ils soient empêchés de le faire alors qu’il y a des gens au sein du parc social dont la situation a largement changé depuis qu’ils se sont vu attribuer leur logement ?".

En clair, il veut imposer aux bailleurs sociaux, qui gèrent les HLM, une évaluation régulière de la situation "personnelle, financière et patrimoniale" des locataires. "Cela permettra d’abord d’interroger le renouvellement du bail. Et ensuite d’interroger le niveau des loyers", affirme-t-il.

Selon le ministère du Logement, plus de 8% des locataires de HLM ne seraient plus éligibles à un logement s'ils en faisaient la demande aujourd'hui en raison de l'évolution de leurs ressources.

  • Ce qui existe déjà

Il existe déjà un contrôle des ressources des locataires. Chaque année, les locataires de HLM doivent répondre à une "enquête ressources" pour attester de leur situation économique. Le bailleur peut augmenter le loyer en cas de revenus importants voire résilier votre bail lorsque l'enquête ressources montre que deux années de suite, le total des revenus annuels des occupants de votre logement sont supérieurs à un certain montant, comme le prévoit une loi votée en 2009.

Ce montant maximum équivaut à 1,5 fois le revenu maximum pour obtenir un logement social PLS, précise le site services publics. Le montant à ne pas dépasser varie selon la commune de votre logement. Par exemple, le montant à ne pas dépasser pour une personne seule est de 50 785 euros en Île-de-France et de 44 151 en province. Le détail est disponible sur service-public.fr.

À noter que l'obligation de quitter son logement ne s'applique pas aux personnes en situation de handicap, aux plus de 65 ans ainsi que si, dans le délai de 18 mois accordé pour quitter son logement, les revenus sont redevenus inférieur au plafond.

Enfin, les locataires d'un HLM situé en quartier prioritaire de la politique de la ville ne sont pas concernés par le plafond de revenus. Des critères qui pourraient donc être amenés à évoluer.

  • Ce qu'en pensent les associations

L'idée avancée par Guillaume Kasbarian a été très fraichement accueillie par les associations. L’Union sociale pour l’habitat, dirigée par l’ancienne ministre écologiste Emmanuelle Cosse, appelle le ministre à "ne pas céder à la démagogie" en soulignant que cette "notion de 'logement à vie' si elle peut être efficace médiatiquement, n’a pas de réalité juridique", puisqu'il existe une enquête ressources annuelle qui peut aboutir à une résiliation du bail.

Si l'Union sociale pour l'habitat reconnaît que "le ministre a raison de reconnaître la réalité de la file d’attente des demandes de logements sociaux", elle estime qu'il a tort de considérer que c’est en insécurisant les locataires du parc social qu’on palliera les insuffisances de la politique du logement que nous constatons depuis 2017 ", ajoute Emmanuelle Cosse dans ce communiqué.

"Plutôt que produire du logement social, Kasbarian préfère réduire le parc HLM et pour gagner de la place propose de déloger les locataires les moins précaires ! Opposer les classes populaires entre elles et épargner les plus riches et la spéculation immobilière. Stop le cynisme", dénonce de son côté sur X la Confédération Nationale du Logement, association de défense des droits des habitants et des locataires.

Du côté de la Fondation Abbé Pierre, on rappelle aussi par la voix de Manuel Daumergue, que le bail à vie en HLM n’existe pas avant de souligner que "le parc HLM compte beaucoup moins de logements vides que le parc privé, beaucoup moins de sous-occupation et zéro résidence secondaire".

  • Les chiffres à retenir

Selon l'Union sociale pour l'habitat, un tiers des ménages ne sont pas propriétaires et peuvent prétendre à un logement social compte tenu de leurs revenus. Dans son rapport 2023, l'Union sociale pour l'habitat estime que 3% des ménages logés en HLM sont susceptibles d’être assujettis au supplément de loyer de solidarité, leurs revenus ayant augmenté, depuis leur entrée dans le parc, au-delà des plafonds de ressources.

À l'inverse, 61% des ménages logés par les organismes ont des revenus inférieurs à 60% des plafonds de ressources, et un peu plus de 40% des locataires HLM ont des ressources inférieures au seuil de pauvreté national (contre 15% pour l’ensemble des ménages).