Gaza : sécurité, météo, camions... comment la jetée américaine pour l’aide humanitaire tombe à l’eau

Cette image satellite fournie par Maxar Technologies montre une vue rapprochée de la partie restante de la jetée construite par les États-Unis sur la côte de Gaza, le 29 mai 2024.
- / AFP Cette image satellite fournie par Maxar Technologies montre une vue rapprochée de la partie restante de la jetée construite par les États-Unis sur la côte de Gaza, le 29 mai 2024.

GAZA - La jetée construite en mai à Gaza par les États-Unis avait pour but affiché de faciliter l’acheminement d’aide humanitaire dans le territoire palestinien. Mais depuis son installation, c’est presque tout l’inverse, avec des déboires qui s’enchaînent.

Premier soutien militaire d’Israël, Washington a installé cette jetée face aux sévères restrictions imposées par Tel-Aviv à l’acheminement terrestre de l’aide vers l’enclave palestinienne, ravagée par huit mois de guerre. Mais jusque-là, seulement 4 100 tonnes d’aide ont été acheminées dans la bande de Gaza via cette jetée qui a coûté 230 millions de dollars, loin de « l’augmentation massive » de livraisons promise par le président américain Joe Biden.

• Un manque de camions

Pour le moment, la jetée n’a été utilisable qu’une douzaine de jours depuis son entrée en service le 17 mai, note The Guardian. La plupart du temps, l’aide arrivant par voie maritime a dû être laissée dans une gare de triage établie sur la plage, faute de camions pour la distribuer aux entrepôts de Gaza en raison de l’insécurité.

Sur l’ensemble de la période d’exploitation de la jetée, seuls 250 camions de nourriture et d’autres formes d’aide humanitaire sont arrivés par le corridor maritime, soit moins de la moitié de ce qui aurait été acheminé à Gaza en une seule journée avant la guerre.

• Une météo exécrable

Joe Biden avait annoncé en mars l’établissement de cette jetée par des troupes américaines travaillant au large de Gaza. La construction s’est achevée début mai, mais les conditions météo ont fait qu’elle n’a été mise en service qu’au 17 mai.

Une semaine plus tard, la houle avait provoqué le désamarrage de quatre vaisseaux américains participant à l’opération. La jetée avait ensuite été endommagée trois jours plus tard par d’exécrables conditions météo et avait dû être transportée dans le port israélien d’Ashdod pour être réparée.

Remise en opération le 7 juin, elle avait été de nouveau transportée à Ashdod le 14 à cause d’une mer anormalement houleuse. Les livraisons d’aide ont finalement repris cette semaine dans la nuit de mercredi à jeudi, a annoncé le Pentagone.

• Une absence de sécurité

L’opération américaine a fait face à d’autres difficultés, notamment avec l’annonce le 10 juin par le Programme alimentaire mondial de la suspension de ses livraisons d’aide via la jetée, « jusqu’à ce que soit menée une évaluation des conditions de sécurité » pour son personnel.

Interrogé alors sur les raisons de cette interruption, le porte-parole du secrétaire général de l’ONU avait évoqué l’opération israélienne deux jours plus tôt qui avait libéré quatre otages à Gaza, et qui selon le ministère de la Santé du Hamas a fait plus de 270 morts. Plus de dix jours après cette suspension, les livraisons du PAM n’ont toujours pas repris.

« Les travailleurs humanitaires et les camions ne peuvent pas circuler en toute sécurité en raison des bombardements continus sur Gaza », déclare de son côté Ziad Issa, responsable de la politique et de la recherche pour l’organisation caritative britannique Action Aid, auprès du Guardian. L’armée israélienne a affirmé faire une « pause tactique » dimanche 16 juin pour permettre un couloir d’aide à travers le sud de la bande de Gaza. Mais selon Ziad Issa, « nous n’avons pas vu de différence ».

Tsahal n’est pas la seule menace pour l’acheminement de l’aide. Les camions qui traversent la bande de Gaza ont été bloqués à plusieurs reprises par des bandes armées, de plus en plus puissantes, dans les rues en ruine des villes de Gaza à mesure que la guerre se poursuit.

L’Unrwa, l’agence de secours des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, compte elle sur la police palestinienne pour assurer la sécurité de ses convois d’aide, mais celle-ci est considérée par Tsahal comme un bras du Hamas, donc comme une cible légitime. En leur absence, il existe un vide sécuritaire.

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