Comment gérer les tensions politiques au travail ? Une spécialiste RH partage ses conseils

Mieux vaut privilégier la communication non-violente.
LordHenriVoton / Getty Images Mieux vaut privilégier la communication non-violente.

TRAVAIL - Elles sont devenues inévitables. Depuis l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron le 9 juin dernier, la politique est sur toutes les lèvres… Et le cadre professionnel n’y échappe pas. Mais difficile de plaire à tout le monde (ou de n’être frustré par personne) lors de telles conversations, qui peuvent très vite devenir intrusives ou virer au conflit.

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Alors, comment faut-il réagir lorsque l’on est confronté à des opinions contraires aux nôtres au bureau ? Que dit la loi ? Le HuffPost a demandé à Salma Ben Mahmoud, spécialiste en ressources humaines, comment aborder la situation politique actuelle au bureau en évitant les conflits.

Le HuffPost. Les conversations politiques dans le cadre professionnel sont dures à éviter dans le contexte actuel. Comment faire en sorte de pouvoir aborder ce sujet sensible en évitant les dérapages ?

Salma Ben Mahmoud. Il faut toujours respecter les principes fondamentaux de la libre expression. S’il n’est pas interdit de parler politique au bureau, il faut articuler ses idées sans les imposer aux autres, et sans émettre de jugement sur ses collègues lorsqu’ils s’expriment. Pour éviter justement que les conversations prennent ce tournant-là, je conseillerais de parler de thèmes concrets comme l’emploi ou l’écologie, plutôt que de faire l’apologie de tel ou tel parti. De la même manière, on évite plus facilement le conflit si l’on s’appuie sur les arguments tenus par une personnalité politique, plutôt que de revendiquer ou critiquer la personne directement. Et puis surtout, la règle d’or, c’est que si l’on donne son opinion, il faut accepter l’opinion contraire en réponse.

Le HuffPost. Que faire si je suis mal à l’aise lorsque mes collègues expriment des opinions politiques différentes des miennes ?

Salma Ben Mahmoud. Il y a plusieurs manières de réagir dans ce type de situations, mais la première réaction doit être de ne pas envenimer la conversation. On privilégie par exemple la communication non-violente et au lieu de rentrer dans le conflit, on fait comprendre à nos collègues concernés que le bureau n’est pas forcément le lieu pour faire l’apologie de ses convictions politiques.

Cependant, si des propos tenus vous gênent profondément, il est possible de se diriger vers une personne extérieure, comme votre responsable des ressources humaines ou même votre responsable hiérarchique. Les propos à caractère discriminatoire, sur la religion d’un employé par exemple, sont évidemment interdits par la loi et doivent être dénoncés. Mais dans le cadre d’une discussion politique, le simple fait d’être dérangé par des propos peut justifier une action de votre part. Cela peut par exemple se produire si un collègue ou même votre supérieur hiérarchique fait part ouvertement de ses opinions politiques, non pas une fois au détour d’un café, mais à répétition et avec l’intention de vous convaincre. C’est ensuite à l’entreprise de créer un cadre où tous les employés se sentent à l’aise, et de faire respecter ce cadre en rappelant à leurs obligations ceux qui dépasseraient le règlement intérieur.

Le HuffPost. Comment réagir si l’on me demande de dévoiler mon vote, ou même qu’on essaie de me convaincre de changer mon vote ?

Salma Ben Mahmoud. Poser une telle question à un collègue, outre l’aspect profondément intrusif, peut être un geste de provocation auquel il faut réagir de manière rationnelle plutôt qu’émotionnelle. Par exemple, si l’on vous demande quel bulletin vous avez glissé dans l’enveloppe, il est préférable de répondre que « le secret des urnes fait partie du jeu du vote », plutôt que de dire « ça ne te regarde pas ». Cela permet de désamorcer la conversation calmement, et d’éviter des situations où d’autres viennent se mêler au conflit.

Par contre, influencer consciemment le vote d’un collègue au travail est considéré comme du prosélytisme, ce qui est interdit par la loi. Il faut encore une fois faire la différence avec des paroles qui seraient exprimées sans arrière-pensée à la pause déjeuner, comme exprimer son intention de vote. Mais dans une période cruciale d’entre-deux-tours comme celle-ci, il ne faut pas hésiter à signaler un comportement où une personne affiche son affiliation politique avec l’intention de convaincre ses collègues. Par exemple, un employé qui déposerait des tracts dans l’espace de travail a clairement un comportement illégal, car cela entrave la liberté de penser des uns et des autres, en plus de créer un malaise dans le bureau.

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