Dette : le débat sur le dérapage du déficit public tourne au concours Lépine jusqu’au sein du camp Macron

Alors que les partis rivalisent de propositions, le camp présidentiel s’oppose à nouveau sur l’opportunité de taxer les entreprises qui réalisent des « superprofits » ou versent des « superdividendes ».

POLITIQUE - À la recherche des milliards perdus. L’exécutif s’active, depuis plusieurs jours, pour trouver la parade au dérapage du déficit public de la France dont l’ampleur doit être dévoilée et officialisée par l’Insee mardi 26 mars.

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La préoccupation, palpable au plus haut sommet de l’État, semble redoubler depuis la semaine dernière et une réunion organisée par Emmanuel Macron à l’Élysée avec les pontes de son camp. En toile de fond : une situation plus délicate encore que prévu, avec un déficit qui pourrait atteindre 5,6 % du PIB… Loin des prévisions de Bercy établies à 4,9 %.

Dans ce contexte, le gouvernement s’attache à défendre son bilan cloué au pilori et cherche à mettre les oppositions à contribution pour trouver les moyens de « compléter » les efforts budgétaires déjà réalisés, selon le vocable d’Emmanuel Macron. Un débat qui tend à se transformer en concours Lépine et met à nouveau en exergue les désaccords fiscaux au sein du camp présidentiel.

La droite veut toucher au chômage, la gauche taxer les riches

À droite, Éric Ciotti propose de faire des économies en piochant dans le « modèle social trop généreux avec les allocations » et en visant – à nouveau – les droits des personnes sans emploi. « Ce modèle social encourage trop souvent le non-travail. Il faut réduire les critères d’indemnisation du chômage pour reflécher beaucoup de Français vers le travail », a ainsi proposé le président des Républicains, ce dimanche 24 mars sur CNews.

Celui qui décrit le chef de l’État comme « l’homme qui valait 1 000 milliards d’euros de dette » plaide également pour « limiter le cumul des allocations sociales » et « mieux lutter contre les dérapages de ce système ». « Il faut réduire nos dépenses publiques, diminuer notre modèle social, et arrêter de le faire financer par le travail », martèle-t-il, en reprenant des antiennes de son camp.

À gauche, on veut plutôt taxer les riches. L’eurodéputée Aurore Lalucq, porte-parole de la liste PS-Place Publique aux élections européennes, a appelé Bruno Le Maire à « sortir de son idéologie », samedi, sur BFMTV, qui consiste depuis sept ans à « ne pas toucher aux impôts mais à réduire un certain type de dépenses publiques qui concernent toujours les plus faibles ».

Au contraire, selon elle, « il faut aujourd’hui taxer les super profits et les super riches ». « On ne peut pas avoir d’un côté 30 % du PIB donnés aux grandes entreprises sans conditionnalité et de l’autre côté dire que l’on ne va pas augmenter les impôts alors qu’on a un problème d’augmentation de la dette et des déficits », a-t-elle plaidé, à l’unisson des formations de gauche désireuses d’imposer davantage les plus aisés, notamment depuis la crise liée à la pandémie de Covid-19.

La majorité se divise encore

Dans ce contexte, le camp présidentiel se divise à nouveau. La présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a évoqué la piste d’une contribution des plus grands pourvoyeurs de dividendes, vendredi 23 mars, dans un entretien au Figaro.

Une idée défendue par plusieurs chapelles au sein de la majorité, du MoDem à l’aile gauche de Renaissance… mais écartée par Bruno Le Maire cinq heures plus tard sur BFMTV : pas question de « dévier de notre ligne économique », a répondu le numéro 2 du gouvernement. En réalité, l’exécutif – qui se fait fort de n’augmenter aucun impôt depuis 2017 – semble pour l’instant vouloir activer principalement le levier de la maîtrise des dépenses publiques pour redresser les comptes.

Dix milliards d’euros de coupes ont déjà été passées mi-février dans le budget 2024. Mais il faudra compléter « dans toutes les actions utiles de la dépense publique », a indiqué Emmanuel Macron, vendredi, en visant notamment les dépenses sociales ou des collectivités locales.

Problème : à trop couper dans les dépenses, cela aura un « impact sur le pouvoir d’achat », « la situation des entreprises et l’investissement » et donc à terme la croissance, risquant de plonger le pays dans une « spirale d’austérité », selon les mots de l’économiste Mathieu Plane à l’AFP. Pour l’instant, le concours ne donne pas de gagnant.

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