Décrypter le cerveau pour faire parler les corps paralysés

Des personnes totalement paralysées parviennent à communiquer grâce à des interfaces informatiques contrôlées par la pensée. Et des neuroprothèses permettent à d'autres patients de retrouver l'usage de certains membres… Décryptage des dernières innovations.

Cet article est extrait du mensuel Sciences et Avenir - La Recherche n°910, daté décembre 2022.

"Veux-tu regarder Robin des Bois de Disney avec moi ?" Ce message adressé à un petit garçon de 4 ans s'affiche sur l'écran scruté par les chercheurs du centre Wyss de Genève (Suisse). Il provient du père de l'enfant, un homme de 34 ans totalement paralysé par la maladie de Charcot, y compris dans ses mouvements oculaires. S'il a réussi à s'exprimer, c'est grâce à un implant cérébral connecté à l'ordinateur.

Ce type de système, nommé interface cerveau-machine ou ICM, permet de contrôler un programme informatique par la pensée. Cette première annoncée en mars a ouvert des perspectives inédites dans le décodage du langage des neurones au profit des patients atteints d'un syndrome d'enfermement (locked-in syndrome) complet, un état où le malade est conscient mais incapable d'effectuer le moindre mouvement.

Ici, les scientifiques ont d'abord implanté deux électrodes dans le cortex moteur du cerveau du patient. S'en est suivie une longue série de tests. Durant plus de cent jours, l'homme apprend à activer ces électrodes, probablement en imaginant un mouvement oculaire, de façon à sélectionner les lettres qui lui étaient énumérées dans l'oreille. Les premiers messages font part de nécessités physiques : "Pas de chemise mais des chaussettes " pour la nuit, et "tête toujours droite ". Puis viennent des pensées moins concrètes : "Je voudrais écouter fort l'album des Tool (groupe de métal californien, ndlr)", demande-t-il le 245e jour. "C'est la première fois qu'on parvient à communiquer avec une personne qui n'a plus de mouvement volontaire et dont l'interface est le seul moyen de communication ", se réjouit le neuroscientifique Jonas Zimmermann, premier coauteur de ces travaux publiés dans Nature Communications.

Objectif : décoder la parole en temps réel

Mais le chemin vers une conversation fluide reste encore long : avec cette écriture mentale lettre par lettre, le patient n'arri[...]

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