Coronavirus : l'Allemagne est-elle vraiment si bonne élève ?
L’Allemagne s’en est jusqu’ici bien sortie avec le coronavirus, affichant un taux de létalité particulièrement bas. Mais un déconfinement trop rapide, sur fond de tensions politiques, pourrait renverser la vapeur.
L’Allemagne fait figure de bonne élève au sujet du nouveau coronavirus. Si le nombre de cas est parmi les plus élevés - 159 912 personnes infectées au 29 avril, plaçant le pays juste après les États-Unis, l’Espagne, l’Italie et la France - le taux de létalité y est particulièrement bas.
Dès le 17 avril, le ministre de la santé allemand, Jens Spahn, affirmait que le Covid-19 était “sous contrôle et gérable”, avec un taux de reproduction - le nombre de personnes infectées par un malade - de seulement 0,7. Une victoire liée à la gestion de l’épidémie ainsi qu’à une bonne préparation. Au début de la crise, le pays comptait 28 000 lits disponibles en soins intensifs, selon France Inter, soit 6 pour 1 000 habitants, l’un des taux les plus élevés du monde. “Nous avons commencé très tôt les tests de diagnostic et à une grande échelle, c'est ainsi que nous avons stoppé l'épidémie”, expliquait le virologue Christian Drosten dans The Guardian, ce 26 avril.
Deux fois moins que l'Allemagnehttps://t.co/Ja3yiqCOuH
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“Une pression politique”
De quoi convaincre les autorités de se lancer dans le déconfinement progressif, qui a démarré outre-Rhin depuis le 20 avril. Mais, après seulement quelques jours de relâchement, le pays craint déjà l’arrivée d’une deuxième vague. “Nous arrivons à ce que j'appelle 'le paradoxe de la prévention'. Les gens estiment qu'on en a trop fait et il existe une pression politique et économique à revenir à la normale”, décrypte, toujours dans The Guardian, le virologue allemand Christian Drosten.
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La politique semble en effet entrer en jeu dans les décisions outre-Rhin. Le pays étant un État fédéral, les 16 Länder disposent de pouvoirs pour décider localement des mesures de précaution, même si elles sont encadrées par un plan national. Et les divergences se font d’ores et déjà remarquer. Les commerces de moins de 800 mètres carrés ont pu rouvrir dans une grande partie du pays, mais Markus Söder, le ministre-président de Bavière, a choisi de repousser cette date. De même, les écoles et lycées doivent rouvrir à partir du 4 mai, sauf en Bavière, où la rentrée sera décalée d’une semaine.
Les mesures strictes imposées par Markus Söder s’opposent à celles d’Armin Laschet, le ministre-président de Rhénanie du Nord-Westphalie. Lui souhaite faire repartir l’économie. Il s’est d’ailleurs battu pour que les frontières avec le Pays-Bas et la Belgique - deux pays voisins de ce Länder - restent ouvertes. Une idée partagée par Wolfgang Schäuble, le président de la Chambre des députés.
La prudence d’Angela Merkel agace
Et si la famille politique d’Angela Merkel a gagné en popularité durant la crise sanitaire, avec une hausse de 10 points dans les sondages en deux mois, le vent commence déjà à tourner pour la chancelière, qui était considérée comme affaiblie avant la crise.
Allemagne : une centaine de personnes interpellées lors d’une manifestation anti-confinement https://t.co/Zy0JIspXsx
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Sa prudence agace notamment à l’extrême droite de l’échiquier politique. Comme le rapporte Le Parisien, l’Alternative pour l’Allemagne (AfD) estime que le gouvernement exagère les risques liés à l’épidémie. Samedi 25 avril, comme c’est le cas depuis plusieurs semaines, une manifestation réunissant l’extrême gauche et la droite identitaire s’est tenue à Berlin, pour défendre une “résistance démocratique” face à un gouvernement qu’ils jugent trop autoritaire.
Les derniers chiffres inquiètent
En réaction, la chancelière a fait part, dans plusieurs médias, de ses craintes qu’un déconfinement trop rapide ne nuise à la lutte contre le virus. Un avis partagé par le virologue Christian Drosten, qui estimait dès le 24 avril dans un journal Néerlandais que le pays était “sur le point de perdre complètement [son] avance sur la maladie”. Et les récents chiffres pourraient bien leur donner raison. Si le taux de létalité reste particulièrement bas en Allemagne, il a tout de même augmenté ces derniers jours, atteignant 3,86% ce 28 avril. Il n’était que de 1% au début du mois.
Le #déconfinement pourrait faire bondir ce taux et des mesures doivent être prises pour limiter sa haussehttps://t.co/VK6PE6nh8e
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Autre chiffre inquiétant, celui du taux de reproduction. Après une chute importante, il est remonté ces derniers jours pour atteindre 1, selon des informations du 27 avril. Ce qui signifie que chaque malade contamine en moyenne une autre personne. Or, selon la chancelière, avec un taux à “1,1, nous pourrions atteindre les limites de notre système de santé en terme de lits en réanimation d'ici octobre, avec un taux à 1,2, nous atteindrons les limites de notre système de santé en juillet. Avec un taux à 1,3 nous y arriverons déjà en juin”. Le passage de 0,7 le 17 avril dernier, à 1 en une dizaine de jours, laisse craindre un rebond de l’épidémie.
“Le virus va continuer à se répandre en Allemagne au cours des prochaines semaines ou mois et cet été”, entraînant un risque de pic de contagion “partout en même temps”, affirmait de son côté le virologue Christian Drosten, sur la chaîne TV publique NDR. Rien n’est donc gagné pour le moment en Allemagne, et la bonne élève pourrait vite devenir bonnet d’âne si une deuxième vague arrivait.
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