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Manque d'informations, deuxième vague et quotidien épuisant : pourquoi le déconfinement peut faire peur

Manque d'informations, crainte du virus, retour à un quotidien épuisant... Pour certains, le déconfinement est source d'angoisse.
Manque d'informations, crainte du virus, retour à un quotidien épuisant... Pour certains, le déconfinement est source d'angoisse.

La France devrait sortir du confinement à partir du 11 mai. Si certains attendent cette date avec impatience, d’autres sont angoissés à l’idée de replonger dans leurs habitudes mais aussi de se confronter au virus.

Pour certains, le 11 mai rime avec liberté et cette date est attendue avec une grande impatience. Pour d’autres, l’idée du déconfinement crée déjà des angoisses.

Lorsque Emmanuel Macron a avancé la date du 11 mai comme porte de sortie du confinement - sous réserve que la situation sanitaire le permette - il a également expliqué que les crèches, écoles, collèges et lycées rouvriraient progressivement à partir de cette même date. De quoi inquiéter tant du côté des parents d’élèves que du personnel travaillant dans les établissements scolaires. “Il ne faudrait pas que chaque école devienne un petit cluster”, s’inquiétait Claire Guéville, professeure et secrétaire nationale responsable du lycée au SNES-FSU, quelques jours après l’annonce du chef de l’État.

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Une peur “archaïque”

Outre les écoles, d’autres lieux peuvent être source d’anxiété, comme les transports en commun, les bureaux, les endroits clos. “Il va y avoir une peur un petit peu générale ou au minimum une espèce d’appréhension”, estime Antoine Spath, psychologue à Paris, qui précise tout de même que ces sentiments varient grandement d’une personne à l’autre.

Un stress complètement lié au contexte, pour le spécialiste. “Le virus est invisible, impalpable, c’est le prétexte suprême pour générer de l’angoisse”, nous explique-t-il. “La peste, et toutes les grandes épidémies qui ont existé, ont généré des angoisses qui sont inscrites dans le patrimoine culturel de tout individu”, poursuit le psychologue. La pandémie de coronavirus fait donc ressortir des “peurs archaïques, ancestrales”, qui peuvent expliquer certaines craintes à la sortie du confinement.

Une sortie trop imprécise

Autre cause d’angoisse : le flou absolu qui règne autour de la sortie du confinement. Si, lors de son allocution du 13 avril, Emmanuel Macron a avancé la date du 11 mai, il ne s’est pas attardé sur les détails. Et les ministres qui ont pris la parole depuis n’ont pas été beaucoup plus précis. Le port du masque sera-t-il obligatoire ? Y aura-t-il suffisamment de matériel ? Qu’aura-t-on le droit de faire ? Combien de temps durera la période de transition avant un véritable retour à la normale ?

“On a vraiment une incertitude générale qui va créer une angoisse et une frustration potentielle par rapport au processus de déconfinement”, nous explique Fanny Parise, anthropologue et chercheur associé à l’université de Lausanne, qui mène actuellement une étude sur le confinement. “Sur les peurs qu’on a pu identifier, il y a vraiment une incertitude par rapport aux discours politiques et sanitaires contradictoires au sujet des équipements (masques, gel...)”, poursuit-elle.

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Les rituels sociaux peuvent également devenir une source de stress. Pourra-t-on à nouveau se serrer la main, se faire la bise, se prendre dans les bras, ou faudra-t-il à l’inverse conserver la distanciation sociale ? “Les individus se posent beaucoup de questions sur l’attitude qu’ils vont avoir par rapport à leurs amis, leur famille ou leurs collègues”, raconte l’anthropologue. Outre la crainte d’attraper la maladie ou de la transmettre, ils s’inquiètent aussi des réactions des autres face à un refus de faire la bise par exemple.

Les habitudes d’avant inquiètent

D’autres encore sont angoissés à l’idée de retrouver, dès la sortie du confinement, le rythme effréné qui était le leur avant. “Les gens se sont rendus compte qu’on pouvait ne rien faire pendant un week-end sans que cela soit mal vu socialement, alors qu’avant, ils étaient un peu dans l’urgence d’avoir forcément une activité”, relate par exemple Fanny Parise. “Ils se demandent pourquoi avoir accepté ce confinement si c’est pour n’en tirer aucune leçon et se retrouver à nouveau fatigués, débordés, soumis à des injonctions sociales”, précise-t-elle.

Avec le confinement, dont la mise en place a été relativement brutale, “nous sommes passés d’une société rapide et ultra-connectée à un temps complètement nouveau, ça amène à se poser des questions”, avance la spécialiste. Évidemment, “il y aura un écart entre les grandes aspirations et le retour des habitudes du quotidien, parce que l’humain a la capacité d’oublier les difficultés passées lorsque tout va bien”, analyse l’anthropologue. “Mais il y aura tout de même des réflexions, qui vont modifier petit à petit la manière de vivre”, avance-t-elle, “je pense qu’il y aura plus d’effets à long terme qu’à court terme”.

Les recherches effectuées par Fanny Parise lui ont appris que les personnes les moins angoissées par le déconfinement sont celles “qui étaient déjà engagées dans un changement de vie”, aussi simple soit-il, comme une nouvelle façon de consommer, la volonté de réduire ses déchets...

Les éclaircissements qui seront apportées par le gouvernement les prochaines semaines devraient permettre d’y voir plus clair et d’apaiser, peut-être, certaines angoisses.

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