Bronchiolite, grippe, Covid-19: les hôpitaux seront-ils débordés pendant les fêtes?

Bronchiolite, grippe, Covid-19: les hôpitaux seront-ils débordés pendant les fêtes?

Une situation tendue. L'ensemble de la métropole est en situation épidémique pour la bronchiolite, cinq régions (Provence-Alpes-Côte d'Azur, Occitanie, Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté et Grand Est) sont placées en niveau d'alerte épidémique pour la grippe et le Covid-19 progresse, selon le dernier bulletin de Santé publique France. De quoi craindre que les hôpitaux soient débordés pendant les fêtes?

Dans certaines régions, cette triple épidémie commence à mettre les services d'urgences en difficulté. Notamment dans le Grand-Est. L'Agence régionale de santé (ARS) a ainsi activé la semaine dernière le plan blanc dans le Haut-Rhin et le Bas-Rhin. En Occitanie, la situation est également compliquée. L'Observatoire régional des urgences (Oru) de cette région a ainsi placé ses 43 services d'urgences en rouge.

Dans le détail, l'Oru Occitanie réalise chaque semaine une "météo" des services d'urgences de la région. Une évaluation hebdomadaire qui prend en compte le nombre et la durée des passages aux urgences, mais aussi le nombre d'hospitalisations, de lits disponibles ou fermés ou encore l'activité de la régulation.

"Depuis plusieurs semaines, on assiste à une augmentation croissante du nombre de passages aux urgences", observe pour BFMTV.com Hervé Mourou, médecin coordinateur de l'Oru Occitanie. En l'occurrence: +2% la semaine dernière. "Cela ne paraît pas beaucoup mais ça s'ajoute aux hausses des semaines précédentes. Et ça fait beaucoup de patients."

"La semaine dernière, nous avons dépassé l'activité de 2022 à la même époque. C'est significatif."

La "superposition" des épidémies

L'épidémiologiste Mircea Sofonea pointe la conjonction de ces trois épidémies. "La superposition (Covid-19, bronchioloite, grippe, NDLR) est relativement forte", explique-t-il sur BFMTV. Quelle sera la situation dans les prochains jours ou les prochaines semaines? "C'est très difficile de se projeter." Un flou qui vient notamment de la circulation active d'un sous-variant d'Omicron: JN.1, considéré comme beaucoup plus transmissible que la grippe.

"Il y a encore, quatre ans après le début de la pandémie, plusieurs vagues de Covid-19 chaque année", pointe Mircea Sofonea, chercheur et maître de conférences en épidémiologie et évolution des maladies infectieuses à l'université de Montpellier. "On est loin de ce qui avait été dit, au moment de l'arrivée d'omicron, sur le fait que la situation allait se normaliser."

De quoi, potentiellement, mettre encore un peu plus sous tension les hôpitaux en période de fêtes, pointe Bruno Mégarbane, chef du service de réanimation à l'hôpital Lariboisière (AP-HP).

"C'est un moment où le brassage de la population est plus important", explique-t-il sur BFMTV. "Le risque de transmission des infections virales, notamment respiratoires, est donc plus élevé."

6.700 fermetures de lits

Si cette configuration est relativement courante chaque hiver, la situation pourrait cependant devenir critique cette année du fait de la réduction du nombre de lits dans les hôpitaux, s'inquiète encore Bruno Mégarbane. "Nous abordons encore une fois ces épidémies avec difficulté."

L'ancien ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, avait promis de "rouvrir plusieurs milliers de lits d'ici la fin de l'année" mais leur nombre n'a cessé de baisser. Plus de 6.700 fermetures de lits rien que pour l'année 2022, selon le bilan de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees).

L'effondrement capacitaire est quasi-constant depuis le début des années 2000, selon les données de l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé. Les soignants dénoncent d'ailleurs régulièrement ces fermetures de lits, qui saturent les services, mettent les équipes sous pression et accentuent les tensions dans les services d'urgences.

Au total, près de 29.800 lits ont été supprimés sur la période fin 2016-fin 2022, correspondant en majorité à la présidence d'Emmanuel Macron. Soit beaucoup plus que sous son prédécesseur François Hollande (-15.000 entre fin 2012 et fin 2017) mais nettement moins que durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy (-37.000).

Le pic de la bronchiolite passé

Le Comité de veille et d'anticipation des risques sanitaires (Covars) a alerté jeudi sur la recrudescence des maladies respiratoires en France. Ses membres ont ainsi recommandé d'intensifier la campagne de prévention du Covid-19 et des infections respiratoires et le retour des mesures barrières.

C'est également l'appel de Bruno Mégarbane, le chef du service de réanimation à l'hôpital Lariboisière (AP-HP). Car si quelque 5 millions de personnes ont été vaccinées contre le Covid-19, "cela ne représente que 27% des personnes cibles", déplore ce médecin. Le public concerné est composé des 65 ans et plus, des personnes atteintes de comorbidités, des personnes immunodéprimées et leurs proches ainsi que des femmes enceintes.

"Ces virus-là ne vont pas disparaître", met en garde Bruno Mégarbane. "Nous avons la chance de disposer de moyens efficaces pour prévenir les risques, pour éviter de faire une forme plus grave, de se retrouver à l'hôpital et d'augmenter la pression sur les soignants, réduisant la qualité de la prise en charge."

Un élément positif tout de même dans le contexte actuel: un asynchronisme des épidémies par rapport à l'année dernière. Car si la France entière est en situation épidémique pour la bronchiolite, le pic est passé. En revanche, en ce qui concerne la grippe, "nous entrons dans l'épidémie", met en garde Bruno Mégarbane. Deux régions (la Normandie et la Bretagne) ne sont d'ailleurs pas encore en phase pré-épidémiques.

"L'inconnu, c'est jusqu'à quel niveau la grippe va diffuser cette année", conclu le spécialiste.

Article original publié sur BFMTV.com