"On a besoin de neuf": après la loi immigration, l'idée d'un remaniement revient sur la table

Entre trêve des confiseurs et crainte de se faire éjecter du casting gouvernemental. Après des jours de crise politique liée à la loi immigration, les ministres et les députés ont beau être en vacances, l'hypothèse d'un remaniement est dans toutes les têtes.

"On aura du mal à se dire qu'après une séquence qui nous a mis autant en difficulté, on ne change rien à notre dispositif politique. On a besoin de neuf", résume un député de la majorité à BFMTV.com.

Élisabeth Borne sur la sellette

Sérieusement secouée par un texte aux accents très droitiers qui n'a pas été voté par près d'un quart des parlementaires Renaissance à l'Assemblée nationale, l'avenir d'Élisabeth Borne semble pour l'instant incertain.

La Première ministre a beau assuré d'avoir "le sentiment du devoir accompli" et semble décider à s'accrocher à son poste, peut-elle encore continuer encore plusieurs mois à Matignon? Dans les rangs de la majorité, les avis divergent.

"Elle a fait passer les retraites, la loi immigration. Elle n'a pas démérité loin de là. Elle est loyale, elle mouille la chemise", assène l'un des poids lourd de la majorité.

"Elle est au travail mais elle commence à fatiguer. C'est normal au bout de 18 mois à la tête du gouvernement mais ça donne envie de tester autre chose", juge l'un de ses collègues d'Horizons.

Gérald Darmanin et "une stratégie qui a échoué"

Autre ministre qui pourrait faire les frais d'un nouveau casting gouvernemental: Gérald Darmanin. En première ligne sur la loi immigration depuis l'automne 2022, l'année finit avec un goût amer pour le ministre de l'Intérieur. Discrédité auprès de la droite après des semaines de négociation, le locataire de la place Beauvau a dû se retirer de ses échanges avec les LR pour laisser la main à Élisabeth Borne.

"La stratégie qu'il a mise en place depuis des mois a échoué. On ne peut pas se dire autre chose. Ca doit nous interroger", relate un conseiller ministériel.

Mais dans un gouvernement qui manque d'incarnation, Emmanuel Macron peut-il vraiment se passer de l'un de ses rares ministres connus du grand public ? Il a en tout cas refusé sa démission mi-décembre, après l'adoption d'une motion de rejet de la loi immigration qui avait stoppé net les débats.

Des ministres réticents sur la loi immigration qui ont "un peu agacé"

Le président pourrait également se pencher sur le sort d'une poignée de ministres qui ont fait savoir leur désaccord la semaine dernière sur le texte immigration.

Plusieurs membres du gouvernement se sont réunis autour de Clément Beaune, le ministre des Transports, faisant planer pendant quelques heures le spectre d'une démission collective, avant même le vote des députés.

"On est un certain nombre à avoir été un peu agacé. On était les pieds dans la boue pour trouver une issue et eux se réunissent et font savoir qu'on ne respecterait pas les valeurs de notre mouvement. Ce n'est pas correct", tance un député Renaissance.

Finalement, seul Aurélien Rousseau, en charge de la Santé, a finalement été au bout et quitté le gouvernement. Pour l'instant, c'est Agnès Firmin-le Bodo qui était jusque là sa numéro deux qui le remplace.

La fenêtre de tir du 17 janvier

À peine nommée, elle est déjà fragilisée. Cette ancienne pharmacienne est visée par une enquête judiciaire pour avoir reçu des cadeaux "sans les déclarer" du laboratoire Urgo.

"On ne la voit pas durer à ce poste avec ce genre de situation. Mais la question est plus large. Est-ce qu'Emmanuel Macron fait sortir ceux qui ont fait savoir qu'ils n'étaient pas contents ? C'est quand même très probable", analyse l'ancien conseiller de François Hollande Gaspard Gantzer.

Avec une éventuelle date pour un président qui n'apprécie que rarement de prendre des décisions sous la pression: le 17 janvier. Ce jour-là, la justice scellera l'avenir politique du ministre du Travail Olivier Dussopt, jugé pour des faits de favoritisme quand il était député-maire d'Annonay.

"Macron a horreur de suivre la tradition politique"

En cas de condamnation, cet ancien pilier des socialistes devra plier bagage. De quoi ouvrir donc une fenêtre pour faire évoluer le casting ministériel. Mais jusqu'à l'automne dernier, c'était plus la rentrée de septembre 2024 qui tenait la corde pour un éventuel remaniement d'ampleur, quelques semaines après les Jeux olympiques et des élections européennes qui s'annoncent délicates pour l'Élysée.

"La logique voudrait plutôt que le président prenne acte de résultats électoraux et de la fin des JO. Mais on sait qu'il a horreur de suivre la tradition politique et qu'il préfère souvent choisir d'autres moments pour marquer des points", décrypte l'ancien conseiller de Nicolas Sarkozy à l'Élysée, Julien Vaulpré.

Le président a de son côté promis de fixer "un nouveau cap" dans les prochains jours et a évoqué un grand "rendez-vous avec la Nation" en janvier.

Article original publié sur BFMTV.com