De A comme adolescence à S comme San, l'œuvre d'Orelsan décortiquée dans un "dictionnaire critique"

Faire le pont entre littérature et rap. À 25 ans, Nicolas Krastev-Mckinnon, agrégé de lettres modernes et étudiant à l'ENS de Lyon, s'est lancé un pari: parcourir la carrière d'Orelsan sous la forme d'un dictionnaire.

Après un premier essai consacré à l'artiste belge Damso, publié à compte d'auteur en 2022, l'auteur réitère l'expérience avec Orelsan, Dictionnaire critique (JCLattès), publié ce mercredi, qui explore l'univers du rappeur de Caen à travers une quarantaine de mots sélectionnés avec soin. Un moyen pour ce spécialiste des œuvres d'Emil Cioran et de René Char de fusionner ses deux passions: la littérature et le rap.

"Le rap a toujours été partie intégrante de mon travail et de ma vie. J'ai grandi à la fois en lisant des textes littéraires et en écoutant des rappeurs, donc le lien de parenté entre les deux m'est apparu absolument évident", assure Nicolas Krastev-Mckinnon à BFMTV.com.

"Lire un texte de rap, pour moi, c'est comme lire une page d'un poème, il s'agit simplement d'une oralité différente, plus contemporaine", poursuit-il.

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"Saisir une œuvre en mouvement"

Bercé dans son adolescence par des artistes tels que Booba, Dooz Kawa, Hugo TSR, IAM ou Damso, Nicolas Krastev-Mckinnon s'attaque ici à un autre de ses rappeurs préférés, Orelsan, "l'un des plus grands paroliers du rap français", selon l'écrivain.

"Le but, avec ce livre, c'était de saisir une œuvre en mouvement et Orelsan a une carrière quasi complète avec beaucoup d'histoires à raconter, donc mon choix s'est porté sur lui assez naturellement", affirme-t-il.

"Et c'était aussi une façon pour moi de parler de quelqu'un que tout le monde connaît d'une manière neuve et de toucher un lectorat plus grand", ajoute Nicolas Krastev-Mckinnon.

Pour réaliser ce dictionnaire, Nicolas Krastev-Mckinnon s'est plongé pendant plusieurs mois dans l'analyse de la discographie d'Orelsan, des biographies de l'artiste mais aussi dans les deux saisons du documentaire Montre jamais ça à personne, réalisé par Clément Cotentin, le frère d'Orelsan.

"J'essayais de saisir les différences entre les albums, de montrer ce que dégageait en profondeur chaque disque, de percevoir les thèmes récurrents, sa façon de se positionner, de parler de lui tout en parlant de l'époque et de tisser des fils, dessiner des réseaux de sens", détaille l'auteur.

"Force poétique" du rap français

Plutôt que d'opter pour une biographie ou une analyse de textes, Nicolas Krastev McKinnon a choisi une approche alphabétique pour évoquer l'histoire et le propos d'Orelsan. On y retrouve ainsi des éléments de la carrière du rappeur expliqués à travers des mots clefs tels que "Adolescence", "Liberté d'expression", "La fête est finie", "Caen", "Skread" ou encore "Travail".

"Je suis assez attaché aux fragments, au fait de faire un texte en plein de petits bouts qui s'assemblent et qui serait de l'ordre du puzzle à reconstituer, qui ne serait pas une lecture linéaire et assez autoritaire", confie Nicolas Krastev-McKinnon.

"Grâce au dictionnaire, je mêle le biographique à des analyses littéraires et anecdotes. Ça permet d'offrir une lecture plurielle de la carrière d'un artiste et de donner la liberté au lecteur de se promener dans cet univers, d'entrer par une porte ou une autre et de ne pas simplement suivre un fil", indique l'auteur.

À travers les différentes entrées de cet ouvrage, Nicolas Krastev McKinnon espère faire découvrir ou redécouvrir Orelsan aux lecteurs mais également mettre en avant la "force poétique" du rap français.

"Certaines chansons de rap peuvent contenir des phrases aussi belles qu'un vers de Racine", conclut l'auteur avant d'ajouter: "je souhaite lutter pour réhabiliter les rappeurs aux yeux de tous et montrer en quoi le rap porte un message poétique fort".

Article original publié sur BFMTV.com