Violences contre des journalistes à la marche pour Adama Traoré : une plainte déposée par le journaliste du HuffPost

LIBERTÉ DE LA PRESSE - Pierre Tremblay, journaliste du HuffPost qui a été victime de violences policières le samedi 8 juillet en marge de la marche en mémoire d’Adama Traoré à Paris, a décidé d’entamer des démarches judiciaires suite au coup qu’il a reçu de la part d’un policier membre de la Brav-M. Notre journaliste a formellement déposé une plainte devant l’inspection générale de la Police nationale (IGPN), ce jeudi 13 juillet après-midi, pour « violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique ». Il suit en cela les démarches entamées de leur côté par Clément Lanot et Florian Poitout, deux autres journalistes indépendants ayant également été victimes de violences policières au même moment.

Pierre Tremblay a été blessé après avoir été violemment bousculé par un policier de la Brav-M, ce qui l’a fait chuter au sol, alors qu’il filmait l’interpellation musclée de Youssouf Traoré qui a eu lieu en marges du rassemblement qui avait été interdit. Blessé à ce moment, Youssouf Traoré a ensuite été transporté à l’hôpital, ce qui a provoqué deux autres enquêtes ouvertes à l’IGPN pour cette raison. Vous pouvez voir une partie de ces images dans le reportage du HuffPost à voir en tête d’article et que nous avons diffusé le jour-même.

« À ce moment-là, un membre de la Brav-M fonce sur moi », avait raconté Pierre Tremblay à nos confrères de Télérama. « Il me dit : ’’Reculez ! ». On voit sur une vidéo que j’obtempère, je m’arrête, j’ai même le temps de faire un pas en arrière. Et pourtant, je me prends quand même un coup. Je tombe sur mon poignet droit. Résultat : une entorse, trois semaines d’immobilisation et une semaine d’arrêt de travail. » La scène a été filmée par des témoins, et l’ONG Index a diffusé ce moment où Pierre (en t-shirt vert) reçoit un coup de bouclier et chute au sol, à la 4e seconde de la video ci-dessous.

Pierre Tremblay est actuellement blessé au poignet, avec une incapacité reconnue médicalement à faire son travail de journaliste vidéaste, en raison de cette blessure. Le jour même des faits, nous avions dénoncé sur Le HuffPost des violences « scandaleuses et inacceptables » exercées contre un journaliste dans le cadre de son travail. Une enquête administrative a été lancée par ailleurs le dimanche 9 juillet par la préfecture de police.

« Visé en tant que journaliste »

« J’ai décidé de porte plainte car cette agression constitue une atteinte grave à mon droit d’informer le public et à la liberté de la presse en France », commente Pierre Tremblay ce jeudi 13 juillet, avec le plein soutien de la direction du HuffPost dans cette démarche.

« J’ai le sentiment que j’ai été visé en tant que journaliste, comme mes confrères Clément Lanot et Florian Poitout, quelques secondes avant moi », continue-t-il. « Je suis journaliste professionnel depuis 10 ans en France. J’ai couvert sur le terrain presque tous les grands événements d’actualité et mouvements sociaux durant cette période (gilets jaunes, mobilisation contre la réforme des retraites, etc.). Je sais comment filmer dans des situations tendues, parfois violentes, sans gêner le travail des forces de l’ordre. Malgré tout, je constate une détérioration des relations entre la police et la presse, surtout en raison des méthodes controversées de la Brav-M, cette brigade créée dans la foulée du mouvement des gilets jaunes. Pour moi, il est impératif que cette procédure judiciaire reconnaisse cette agression inacceptable envers moi-même et la liberté de la presse dans ce pays ».

Pour Stéphane Maugendre, avocat de Pierre Tremblay ayant travaillé sur le dossier ces derniers jours, « on sent très clairement que ce sont les professionnels de l’information qui ont été visés. Il y a des indices concordants, des témoignages par des professionnels, et des vidéos qui montrent en détail ce qu’il s’est passé. Je n’imagine pas 30 secondes que le parquet ne poursuive pas l’enquête, au vu des éléments qui sont déjà dans le dossier, et que des poursuites ne soient pas diligentées envers les membres de la Brav-M responsables de ces actes. C’est assez rare que dans une manifestation, certes interdite mais très calme, on ait autant de violences à l’égard de trois journalistes », souligne-t-il.

Ces démarches judiciaires seront par ailleurs appuyées par l’association Reporters Sans Frontières. Son secrétaire général Christophe Deloire, avait réagi dès le jour des faits : « Mettre au sol des journalistes pour les empêcher de prendre des images d’une interpellation est une violation inacceptable de la liberté d’informer. La fatigue des forces de police n’excuse en rien ces violences répétées contre des journalistes. »

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