"Je vais la faire comme Coulibaly": l'appel au 17 diffusé pendant le procès des attentats de Trèbes et Carcassonne

Quelques minutes après avoir entendu le témoignage de Julie, l'hôtesse de caisse du Super U de Trèbes prise en otage par l'assaillant des attentats de Trèbes et Carcassonne, c'est l'appel passé par la jeune femme à la police qui a été diffusé, ce vendredi 26 janvier, devant la cour d'assises spéciale de Paris.

Le 23 mars 2018, après avoir tué trois personnes - un sur un parking à Carcassone et deux dans le supermarché, le terroriste, Radouane Lakdim, prend cette femme en otage, âgée de 39 ans à l'époque, et lui demande de composer le 17.

"Il faut assumer les conséquences"

La jeune femme s'exécute. "Je m’appelle Julie L, je travaille au Super U de Trèbes, je suis pris en otage par un monsieur armé", déclare-t-elle d'une voix calme et très posée.

"Il a une arme sur votre tête?", lui demande la voix au téléphone. "Oui", répond Julie. "Il est seul? Oui". "Il a un pistolet ? Oui". "Il a un pistolet ou un fusil?", reprend la voix. "Un pistolet, un couteau et deux grenades", enchaîne l'hôtesse. Radouane Lakdim détaille alors ses armes.

"Vous êtes seule?", lui demande la policière. "Je suis seule mais y’a du monde dans le magasin", explique Julie. "Dans quel secteur? L’accueil". "Il écoute? Non", répond la jeune femme. Derrière, Radouane Lakdim prend le téléphone et explique qu’il est un soldat de Daesh, avant de saisir le téléphone et de crier: "Je vous attends moi au Super U de Trèbes. Si vous avez des couilles, jusqu’à la mort, je vous attends".

"Vous avez bien compris? Vous bombardez nos frères, il faut assumer les conséquences", ajoute l'assaillant dans le combiné, avant de crier "Allah Akbar" et de tirer. Puis Radouane Lakdim reprend: "On va négocier, là", déclare-t-il avant de prier.

"Œil pour œil"

La jeune femme a posé le téléphone, comme lui a conseillé la femme qui a pris son appel. On entend de la musique, des prières prononcées par le terroriste et quelques éclats de voix. "Je vais la faire comme Coulibaly", ajoute-t-il.

"J’ai 40 ans, j’ai une toute petite (fille) mignonne", dit Julie, d’une voix très calme, à l'assaillant.

Radouane Lakdim se met à lui raconter son périple meurtrier. "J’en ai fait quatre: deux pédés ce matin, je leur ai mis une balle dans la tête", clame-t-il.

La jeune femme reprend son téléphone et explique à l'opératrice qu'elle vient de recevoir un coup de téléphone de la gendarmerie de Trèbes. "Je vais le prendre", dit-elle à l'opératrice. "OK, mais ne raccrochez pas", lui conseille son interlocutrice, ce que fait Julie. Le terroriste prend alors l'appel avec la gendarmerie nationale.

"Là, j’ai une otage. Je veux faire un échange. Avec Salah Abdeslam (l'un des terroristes du 13-Novembre, alors emprisonné en France, NDLR). Vous l’amenez et on échange. C’est pour les bombardements. Œil pour œil", explique-t-il d'une voix surexcitée.

"Allah Akbar", crie une nouvelle fois le terroriste dans le combiné, avant de retourner à ses prières. Quelques minutes plus tard, on entend à nouveau Julie. "Je pars doucement", répète-t-elle trois fois d'une voix douce et posée. "Merci", enchaîne-t-elle. "Tu veux que je ferme (...) D'accord".

"Bien, c’est tout", conclut le Président, après plus d'une heure et demie d'enregistrement diffusé dans une salle d'audience complètement silencieuse. L'audience reprendra lundi matin. La famille d'Arnaud Beltrame, le lieutenant-colonel de 44 ans tué par le terroriste après avoir pris la place de Julie, sera alors entendue.

Depuis ce lundi, et pendant un mois, sept personnes de l'entourage de Radouane Lakdim - six hommes et une femme - sont jugées pour "association de malfaiteurs terroriste criminelle", pendant un mois. L'assaillant, Radouane Lakdim, lui, avait été tué lors de l'assaut du GIGN dans le supermarché.

Article original publié sur BFMTV.com