Europe : "faire la paix est un risque", souligne Macron

Le chancelier allemand Olaf Scholz accueille le président français Emmanuel Macron pour une réunion conjointe franco-allemande au palais Schloss Meseberg, près de Berlin, le 28 mai 2024 (Odd ANDERSEN)
Le chancelier allemand Olaf Scholz accueille le président français Emmanuel Macron pour une réunion conjointe franco-allemande au palais Schloss Meseberg, près de Berlin, le 28 mai 2024 (Odd ANDERSEN)

"Faire la paix est un risque", a estimé mardi Emmanuel Macron, tirant des parallèles entre les guerres qui ont déchiré l'Europe il y a des siècles et le conflit en Ukraine, qui sera au coeur de discussions avec le chancelier Olaf Scholz pour clore sa visite en Allemagne.

Au lendemain d'un copieux programme dans l'ex-Allemagne de l'Est, Emmanuel Macron a reçu à Münster, à l'autre bout du pays, le prix international de la paix de Westphalie, au titre de son engagement européen.

La paix de Westphalie signée en 1648 à Münster, et qui a mis fin à la guerre de Trente Ans en Europe, n'est pas sans écho avec l'actualité, a-t-il relevé.

"Faire la paix est un risque (...) Et ce qui est plus compliqué quand on a commencé à faire la guerre, c'est qu'il faut trouver les voies et moyens de continuer à parler à l'ennemi pour, à un moment, signer une paix", a-t-il souligné.

Le prix, qu'il devait recevoir l'an dernier, lui avait été initialement décerné pour son dialogue avec le président russe Vladimir Poutine afin de tenter d'empêcher puis stopper l'offensive russe en Ukraine en 2022.

Ces échanges avaient suscité beaucoup d'incompréhension après le début de la guerre,notamment dans l’est de l’Europe. Mais le dirigeant français a depuis rompu tout contact avec le maître du Kremlin.

- Aider Kiev -

"Recevoir un prix pour la paix en temps de guerre. Au début, je l'ai mal pris", a souri le président dans son discours de remerciement, avant d'estimer qu'il y avait des leçons à tirer de ces traités signés il y a 376 ans.

A la peine face à l'offensive russe, Kiev doit participer les 15 et 16 juin à un sommet pour la paix en Ukraine prévu en Suisse. La Russie, qui n'a pas été conviée, juge "absurde" la tenue de cet événement en son absence.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, en visite lundi à Madrid, a appelé l'Occident à "user de tous les moyens" pour contraindre la Russie à la paix.

Le soutien à l'Ukraine et le renforcement de la défense européenne seront parmi les thèmes d'un conseil des ministres franco-allemand en fin d'après-midi à Meseberg, près de Berlin.

Pour la troisième et dernière journée de sa visite d'Etat en Allemagne, Emmanuel Macron y retrouvera le chancelier Olaf Scholz et de nombreux sujets qui fâchent dans la relation franco-allemande.

L'Allemagne, qui a annoncé en avril l'envoi d'un système Patriot supplémentaire, presse ses alliés européens à suivre son exemple pour aider Kiev à renforcer sa défense anti-aérienne.

En difficulté sur les fronts est et nord-est, l'Ukraine réclame aussi depuis des mois de pouvoir frapper les positions et les bases arrières en territoire russe avec des armements occidentaux. Mais Américains et Européens ont refusé jusqu'ici par crainte d'une escalade.

Contrairement à Washington, Paris et Londres, Olaf Scholz refuse même de livrer à Kiev des missiles de longue portée (jusqu'à 500 kilomètres) Taurus.

- "Trop timides" -

Le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, a toutefois estimé qu'il était "temps de reconsidérer" ces restrictions envers l'Ukraine qui lui lient "les mains dans le dos".

Emmanuel Macron a suscité le désaccord de certains partenaires européens, dont l'Allemagne, en n'excluant pas l'envoi de militaires français sur le sol ukrainien.

S'il se dit disposé à étudier la pertinence du "bouclier antimissiles" prôné par le chancelier en Europe, il doute aussi que cela "protège totalement" face à la Russie et plaide pour une réflexion stratégique qui intègre aussi la "dissuasion nucléaire".

Mardi matin à Münster, le président français a de nouveau appelé à un "sursaut" des Européens pour relever les défis sécuritaires et économiques qui menacent le continent.

"Aujourd'hui, nous, Européens, nous sommes trop divisés, trop lents et trop timides", a regretté le chef de l'Etat qui a aussi mis en garde sur la pérennité des garanties de sécurité américaines pour l'Europe.

"Notre chance, c'est que notre partenaire américain est à nos côtés, mais, en fonction des aléas politiques, est-ce que ça durera à travers les décennies, je n'en suis pas sûr", a commenté le président renouvelant ses appels en faveur d'une architecture de sécurité européenne.

vl-smk/cm