Coupe du monde de rugby: pourquoi Wayne Barnes, arbitre de la finale, est détesté en Nouvelle-Zélande et en Afrique du Sud

Coupe du monde de rugby: pourquoi Wayne Barnes, arbitre de la finale, est détesté en Nouvelle-Zélande et en Afrique du Sud

Le Mondial 2023 n’en a peut-être pas fini avec les histoires d'arbitrage. Si Ben O’Keeffe a fait l’objet de nombreuses critiques après les succès de l’Afrique du Sud contre la France en quart de finale (29-28) et (un peu) face à l’Angleterre (16-15) en demi-finale, l’officiel néo-zélandais ne pourra pas diriger la finale où les Springboks défieront la Nouvelle-Zélande ce samedi au Stade de France (21 heures). Pour officier lors de choc entre les All Blacks et les Boks, World Rugby a opté pour Wayne Barnes.

Du haut de ses 44 ans, l’Anglais fait partie de références du rugby mondial. Aussi célébre que décrié, sa prestation sera particulièrement observée. Surtout quand on sait qu’il a déjà reçu des menaces de mort de la part des fans néo-zélandais et des supporters sud-africains par le passé.

>> Toutes les infos sur la Coupe du monde en France

Barnes sous protection après le quart France-Nouvelle Zélande de 2007

Devenu le plus jeune arbitre international en 2005, à seulement 25 ans, Wayne Barnes va connaître son premier fait d’armes lors du quart de finale du Mondial 2007 entre la France et la Nouvelle-Zélande à Cardiff.

Si les fans des Bleus ont gardé un bon souvenir de cette soirée galloise, ceux des All Blacks pestent encore contre l’arbitre après l’essai victorieux de Yannick Jauzion à douze minutes du terme (20-18) et le carton jaune reçu par Luke McAllister. Un essai tricolore pourtant entaché d’un en-avant sur l’avant-dernière passe de Damien Traille pour Frédéric Michalak.

Dans la foulée de ce match gagné par les Bleus, la page wikipédia de l’officiel a été prise d’assaut pour annoncer sa mort. Si les réseaux sociaux n’étaient pas encore développés à l’époque, les menaces physiques contre l’Anglais avaient alors poussé l’IRB (ancien nom de World Rugby) à accorder un soin particulier à sa protection.

Après cette rencontre, et compte-tenu du parcours du XV de la Rose jusqu’en finale, Wayne Barnes n’a plus officié en tant qu’arbitre principal pendant le tournoi et s’était contenté de la zone technique pendant la demie Argentine-Afrique du Sud, le tout sous la surveillance de gardes du corps, comme le notait alors le New-Zeland Herald, afin de décourager une potentielle vengeance de la part de supporters de la Nouvelle-Zélande. Pire, dans sa biographie écrite et parue en 2012, l’ancien sélectionneur des All Blacks Graham Henry avait même émis l’hypothèse d’une conspiration contre son équipe.

"Il savait que si une situation comparable s’était produite dans d’autres sports, elle ferait l’objet d’une enquête. Mais il existait une pureté heureuse dans le rugby, ou du moins c'est ainsi que tout le monde voulait le percevoir", écrivait alors Bob Howitt au sujet du ressenti de Graham Henry dans des propos retranscrits dans la presse locale. "Il n’était même pas politiquement correct de suggérer que les arbitres du match auraient pu favoriser une équipe."

Les All Blacks déjà arbitrés par Barnes en 2015 et 2019

En 2011, quatre ans après ce quart polémique entre les Bleus et la Nouvelle-Zélande, Wayne Barnes n’avait pas arbitré le moindre match des All Blacks. Ni pendant les poules, ni lors de la phase à élimination directe. Lors de la compétition remportée par les Néo-Zélandais à domicile, l’Anglais s’était contenté d’un seul match clé, celui pour la troisième place entre l’Australie et le pays de Galles.

Le temps semble avoir porté ses fruits puisque Wayne Barnes a ensuite dirigé les All Blacks sans encombre en 2015 lors du match à enjeu contre l’Argentine (26-16) pendant les poules puis en 2019 à l’occasion de la rencontre pour la troisième place face au pays de Galles (40-17). Deux succès des partenaires de Beauden Barrett qui sont peut-être venus apaiser les tensions entre les supporters kiwis et Wayne Barnes.

Barnes et ses proches menacés après les critiques d’Erasmus

Pas sûr, en revanche, que les fans de l’Afrique du Sud aient déjà oublié le dernier match de leur équipe arbitré par Wayne Barnes. Là encore, tout ne s’était pas passé à merveille lors du test-match remporté en novembre 2022 par la France contre les protégés de Rassie Erasmus (30-26).

Après une rencontre particulièrement engagée et marquée par les expulsions de Pieter-Steph du Toit et Antoine Dupont, le directeur du rugby sud-africain avait épinglé toutes les erreurs commises selon lui par l’arbitre.

Mais les publications particulièrement ironiques de Rassie Erasmus sur les réseaux sociaux avaient finalement dépassé son ambition puisque des internautes mal intentionnés avaient menacé de mort et cyber-harcelé Wayne Barnes et ses proches.

Sa compagne Polly avait même été menacée d’agression sexuelle. De quoi pousser le technicien à prendre la défense de l’arbitre en demandant aux suiveurs des Springboks de garder leur calme.

Barnes a pensé à arrêter mais dirigera la finale du Mondial

La situation avait atteint un tel niveau de tension que le coach sacré champion du monde en 2019 avait écopé d’une suspension de deux matchs pour ses critiques jugées disproportionnées par World Rugby. Wayne Barnes, lui, a même pensé à raccrocher après cet incident comme il l’avait expliqué dans le podcast The Good, The Bad and The Rugby.

"Ce n’est même pas une ligne qui a été franchie, c’est allé tellement au-delà que l’on ne peut même pas voir la ligne, avait ainsi expliqué l’Anglais dans des propos relayés par le site Ruck. […] Je fais des sacrifices mais c’est un sacrifice familial et je me suis dit que j’avais un autre travail à faire. Je suis associé dans un cabinet d’avocats et ils sont désireux que je revienne travailler à plein temps."

Wayne Barnes a finalement maintenu le cap et a continué à arbitre au niveau international. Pendant le Mondial 2023, l’Anglais a dirigé les débats lors du carton des All Blacks face à l’Uruguay (73-0) dans le groupe A puis lors du quart de finale contre l'Irlande (28-24).

S’il a dirigé deux matchs de la poule B où se trouvait l’Afrique du Sud, l’officiel n’a pas encore eu droit à ses retrouvailles avec les Springboks. Ce sera le cas dimanche en finale de la Coupe du monde. Une rencontre qui constituera l’apothéose de sa riche mais controversée carrière d’arbitre. Un match au sommet entre la Nouvelle-Zélande et les Springboks qui sera à nouveau scruté de toutes parts.

Article original publié sur RMC Sport