"Prends-moi à sa place": la caissière sauvée par Arnaud Beltrame lors de l'attentat de Trèbes témoigne

"Prends-moi à sa place": la caissière sauvée par Arnaud Beltrame lors de l'attentat de Trèbes témoigne

Un acte héroïque. Julie Grand, hôtesse d'accueil, a confié à BFMTV le récit de sa prise d'otage dans un Super U à Trèbes, dans l'Aude, en 2018. La femme de 40 ans raconte sa peur, puis l'intervention du gendarme Arnaud Beltrame qui n'a pas réchappé à l'attaque, mais qui a permis de lui sauver la vie.

Son témoignage Sa Vie pour la mienne doit paraître mercredi 10 janvier prochain, avant que ne débute le procès pour les attentats successifs de Trèbes et de Carcassonne, prévu à partir du 22 janvier.

Coups de feu dans le supermarché

Le 23 mars 2018, le terroriste Radouane Lakdim, 25 ans, tue successivement une personne à Carcassonne, dans l'Aude, puis trois autres dans un supermarché de Trèbes.

Julie Grand est à l'époque hôtesse d'accueil dans cette grande surface. Ce qui débute par une banale journée de travail bascule rapidement dans l'effroi.

L'assaillant pénètre dans le magasin et tire des coups de feu dans les airs, avant de s'en prendre à deux personnes présentes sur les lieux. Un employé du magasin, Christian, boucher de 50 ans, et un client, Hervé, âgé de 65 ans.

"J'avais peur qu'une balle parte toute seule"

Julie Grand, de son côté, tente de se cacher, mais elle est vite retrouvée par Radouane Lakdim et se retrouve prise en otage.

"Je sentais le canon de l'arme qui tremblait sur mon crâne", confie-t-elle avec émotion à BFMTV.

"J'avais peur qu'une balle parte toute seule", se souvient-elle, persuadée qu'elle vit alors ses derniers instants. "Peut-être qu'on était arrivé au moment que le terroriste attendait, le moment de sa mort en martyr en essayant de faire le plus de dégâts possibles sur les forces de l'ordre", se dit-elle alors.

Arnaud Beltrame s'interpose

Mais alors que la situation semble sans espoir, un gendarme arrive sur place, il s'agit d'Arnaud Beltrame.

"On a d'abord entendu une voix forte et autoritaire qui a dit: 'Vos gueules les gars, reculez, je prends'", se souvient la quadragénaire.

"Dans les minutes qui ont suivi, il n'a pas cessé de répéter: 'la petite dame n'a rien fait, laisse la partir, prends-moi à sa place, je représente l'État, l'autorité'", assure-t-elle, témoignant du sens du sacrifice du militaire.

La caissière sort indemne du supermarché

Finalement, alors qu'Arnaud Beltrame se trouve au centre de la pièce, Julie Grand prend la parole. "J'ai dit: 'je vais m'avancer'. Je n'ai pas eu de réponse et je me suis avancée vers la porte", relate-t-elle.

L'angoisse ne la quitte alors pas pour autant. "J'avais très peur que le terroriste change d'avis et me tire dans le dos", se rappelle-t-elle.

Elle parvient malgré tout à quitter le supermarché sans encombre, accompagnée par une gendarme qui l'a fait sortir par les réserves, situées à l'arrière du magasin.

Arnaud Beltrame, en revanche, sera grièvement blessé par le terroriste et ne survivra pas à ses blessures. Il est promu au grade de colonel à titre posthume et reçoit un hommage national.

Vivre avec une "culpabilité"

Depuis, Julie Grand confie avoir dû apprendre à vivre en portant la responsabilité de la mort du colonel de gendarmerie. Mais dans les mois qui ont suivi les attaques, elle reçoit un courrier de la veuve d'Arnaud Beltrame.

"Elle me disait que je ne devais pas culpabiliser, qu'Arnaud avait le sens du devoir et qu'il avait agi en conformité avec ses valeurs. Elle me disait que je devais continuer à vivre", raconte-t-elle avec émotion.

Des paroles fortes qui ont aidé Julie Grand à se reconstruire, même si elle concède toujours des "formes de culpabilité", des années encore après les faits. "C'est très complexe", lâche-t-elle.

À la fin de ce mois de janvier, ce sera au tour de la justice de faire son travail et d'apporter peut-être des réponses à la quadragénaire et aux proches des personnes tuées au cours du procès. "Je l'attends comme une libération. Je sais que quand il sera terminé, j'aurai un poids en moins", lâche Julie Grand.

Article original publié sur BFMTV.com