Le phénomène de "noyade sèche" existe-t-il vraiment ?

Il y a plusieurs années, l'OMS a décidé de ne plus employer le terme "noyade sèche".

Chaque été, de nombreux parents s'inquiètent des risques de "noyade sèche", un phénomène qui tient pourtant de la légende urbaine. Explications.

C'est un fléau qui inquiète les parents chaque été : la noyade sèche. Selon la rumeur, il s'agirait d'une noyade à retardement qui toucherait principalement les enfants, qui meurent plusieurs heures, voire plusieurs jours, après avoir bu la tasse. Cette noyade dite "sèche" surviendrait donc après la baignade, sans eau dans les poumons et sans le moindre signe d'alerte et fait donc très peur aux parents.

Mais cette notion de noyade sèche est trompeuse, à tel point que l'OMS a décidé de ne plus l'utiliser. En effet, l'institution spécialisée de l'Organisation des Nations unies (ONU) définit la noyade "comme une insuffisance respiratoire aiguë résultant d'une immersion ou d'une submersion en milieu liquide, l'eau le plus souvent". Une définition qui vient mettre fin à l'utilisation du terme "noyade sèche".

Une légende venue des États-Unis

Ce terme qui vient des États-Unis (ndlr : dry drowning) et s'est répandu dans les médias sur les réseaux sociaux en 2017, lorsqu'un petit garçon de 4 ans nommé Frankie Delgado est décédé plusieurs jours après avoir bu la tasse, alors qu'il se baignait dans une eau très peu profonde. Depuis ce drame, ce récit de noyade à retardement indétectable s'est largement répandu et affole désormais de nombreux parents.

Pour le Professeur Pierre Michelet, chef de service des urgences de l'Hôpital de la Timone (Marseille) et spécialiste de la noyade, cette notion de noyade à retardement est un mythe : "C'est faux, ça n'existe pas, il y a des signes annonciateurs auxquels il faut être attentif lorsque quelqu'un, en particulier un enfant, a ingurgité ou inhalé de l’eau, même très peu. Il y a un continuum entre l'événement lors de la baignade et l'aggravation éventuelle. La noyade sèche ne survient pas comme ça", indiquait le spécialiste à Sciences et Avenir. S'il est bien possible de mourir quelques jours après avoir bu la tasse, il ne s'agit pas d'une noyade sèche mais plutôt d'une complication liée à une noyade, avec ou sans gravité. Comme le rappelle Santé publique France, une noyade sans eau dans les poumons et sans aucun signe d'alerte n'existe pas.

Une inflammation pulmonaire et non une noyade

Preuve en est avec le cas de Frankie Delgado, dont l'autopsie a révélé plus tard qu'il n'est pas mort d'une noyade, mais des suites d'une myocardite, une inflammation du tissu musculaire du cœur, et qu'il n'avait pas d'eau dans les poumons. Malheureusement, il était déjà trop tard au moment de l'autopsie, le mythe de la noyade sèche était lancé et avait déjà fait le tour du monde.

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Quelques signes doivent alerter

Interrogé par Midi Libre, le Dr François-Xavier Moronval, responsable du Centre d'Enseignement des Soins d'Urgence des Vosges, rappelle qu'une noyade, c'est "quand on avale beaucoup d’eau et que les poumons ne sont plus oxygénés." Il tient donc à rassurer les parents qui s'inquièteraient en vue des vacances de cet été : "Cela n’arrive jamais que quelqu'un boive la tasse, se sente parfaitement bien, puis décède 3 jours plus tard. Cette légende de la noyade sèche n'a qu'une finalité : inquiéter inutilement les parents !".

Dans le cas où un enfant boit la tasse, il faut le surveiller dans les heures qui suivent car les risques existent tout de même et quelques signes doivent alerter. Une toux persistante, de la fièvre ou une gêne respiratoire sont des signes qui doivent alerter car ils peuvent mener à une infection pulmonaire.

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