Ne pas annuler son rendez-vous chez son médecin pourrait coûter cher

Le Sénat examine une proposition de loi visant à sanctionner financièrement les patients faisant faux bond aux médecins sans raison légitime.

SANTÉ - Poser un lapin à son médecin pourrait bientôt coûter cher. Ce mardi 14 février, les sénateurs examinent en première lecture la proposition de loi Rist qui vise à améliorer l’accès aux soins, en luttant notamment contre l’augmentation du nombre de rendez-vous médicaux non honorés.

Le texte ouvre à la voie à une indemnisation des professionnels de santé ainsi qu’à une pénalisation financière des patients « indélicats ». Objectif ? Mettre en place un dispositif « dissuasif et responsabilisant » afin de « redonner du temps médical utile aux médecins » explique la sénatrice LR Corinne Imbert, rapporteure de ce projet de loi.

28 millions de lapins posés par an

Cet article de la proposition de loi fait suite à une demande de nombreux syndicats de médecins qui évoquent le chiffre de 28 millions de rendez-vous non-honorés en 2022. Un chiffre à relativiser selon la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) qui recommande « la plus grande prudence sur ces données », et évoque un taux d’annulation de rendez-vous se situant plutôt entre 3 et 4%.

Pour l’heure, on ignore le montant de l’amende en cas d’absence ou d’annulation tardive (moins de 24h avant le rendez-vous). Le texte prévoit cependant de modifier le code de la santé publique afin que la convention médicale détermine les modalités et les conditions d’indemnisation du médecin. Elle devra aussi fixer les conditions dans lesquelles les sommes versées sont mises à la charge du patient qui « fait faux bond sans raison légitime ».

« Une mesure absurde »

La piste d’un recouvrement effectué par l’Assurance maladie est la plus privilégiée. En effet, le texte envisage la suppression de remboursements ultérieurs versés au patient au titre d’autres prestations. En somme : si vous manquez votre rendez-vous chez votre médecin, vous risquez de ne pas vous faire rembourser le détartrage que vous avez effectué deux semaines plutôt.

« Une mesure absurde en matière de santé publique et en totale contradiction avec la réduction des inégalités sociales de santé » dénonce l’association de patients France Assos Santé. « L’idée d’une sanction financière est une mauvaise solution au problème » résume la fédération qui réclame « la suppression pure et simple » de ce qu’elle qualifie de « taxe lapin ». Cette dernière déplore que le texte, porteur de « progrès concrets sur l’accès aux soins », ait été « scandaleusement raboté par les sénateurs en commission ».

Car la proposition de loi Rist, votée à l’unanimité à l’Assemblée nationale en première lecture, - avec l’abstention du RN et de LR - vise également à élargir les missions des infirmiers en pratique avancée (IPA), un statut créé par la loi Touraine de 2016 puis un décret en 2018.

Un accès direct aux professionnels du paramédical

Les patients pourraient ainsi se rendre chez ces soignants sans passer par un médecin - sans ordonnance donc - mais toujours dans le cadre d’un « exercice coordonné » avec ce dernier. La proposition de loi ambitionne également d’autoriser l’« accès direct » aux kinésithérapeutes et orthophonistes exerçant dans des établissements de santé.

Sauf qu’en commission, les sénateurs ont retoqué ces propositions, de sorte à « garantir la sécurité des soins » et « conserver le rôle central du médecin dans la coordination et le suivi des patients ». Ces derniers ont évoqué un calendrier « particulièrement inapproprié » de l’examen de ce texte, alors que « les négociations de la prochaine convention médicale battent leur plein ».

Le collectif « Médecins pour demain » et les syndicats UFML et FMF appellent par ailleurs les médecins libéraux à faire grève ce mardi. Une manifestation est prévue cet après-midi entre le ministère de la Santé et le Sénat afin de réclamer des hausses de tarifs et s’opposer à cette proposition de loi.

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