Sur la fronde contre Corinne Diacre, Gaëtane Thiney comprend les Bleues

Joueuse phare de l’équipe de France féminine de football jusqu’à la Coupe du monde disputée à domicile en 2019, Gaëtane Thiney a perdu sa place peu de temps après, la faute à une prise de parole contre l’encadrement des Bleues et notamment la sélectionneuse Corinne Diacre (photo d’archive prise le 28 juillet 2019 durant le quart de finale France - États-Unis).

FOOTBALL - Elle réclamait une ou un sélectionneur qui « aime, emmène, fédère » ses joueuses, et cela lui a probablement coûté sa place. Alors que le poste de Corinne Diacre à la tête de l’équipe de France féminine de football ne tient désormais qu’à un fil après la fronde de plusieurs cadres des Bleues, la première à avoir parlé, Gaëtane Thiney, revient sa propre éviction et sur la dynamique du moment.

Car avant Amandine Henry, Eugénie Le Sommer, Sarah Bouhaddi, ou Wendie Renard, c’est bien Gaëtane Thiney qui s’est, la première, retrouvée sur la touche pour avoir dénoncé le fonctionnement de l’équipe de France. « Former des joueuses, c’est une chose. Former des championnes du monde, c’est autre chose… », dénonçait-elle ainsi en 2019 dans un entretien à l’AFP et à Canal+, déplorant les résultats médiocres des Bleues. Et de viser, en creux, la sélectionneuse, coupable « d’infantiliser » ses joueuses et de les empêcher de « s’exprimer » librement.

À l’époque, Gaëtane Thiney fustigeait ainsi, des années avant Wendie Renard, Kadidiatou Diani ou Marie-Antoinette Katoto, l’omerta régnant sous le maillot au coq : « Je suis épuisée de tout garder pour moi, j’ai envie de dire qu’il faut améliorer les choses. »

« Une croix sur la logique de Diacre »

Un an et demi plus tard, deuxième salve, cette fois dans les colonnes du média French Morning, qui s’adresse à la communauté des Français expatriés aux États-Unis. « Il n’y a aucune logique dans ce qui est fait depuis longtemps (chez les Bleues, ndlr). L’équipe de France telle qu’elle se fait maintenant fait plus de mal qu’autre chose. » Et d’ajouter, de manière on ne peut plus directe : « Est-ce que j’ai fait une croix sur l’Équipe de France ? Non, j’ai fait une croix sur la logique de Diacre. »

Et pour cause : après avoir été une actrice majeure (163 sélections et 58 réalisations avec les Bleues) de toutes les aventures internationales de l’équipe de France, jusqu’à la Coupe du monde à domicile en 2019, Gaëtane Thiney a fini par ne plus être sélectionnée du tout. En dépit pourtant de performances remarquables en championnat de France avec le Paris FC.

« J’ai une position délicate car je bosse à la FFF et je ne peux pas dire tout ce que je pense… », rappelait-elle tout de même auprès de French Morning en 2021. Ce qui ne l’empêche pas, en ce mois de mars 2023, de commenter dans les colonnes de L’Équipe, la situation dans laquelle se trouvent les Bleues. Un marasme inchangé depuis sa première prise de parole, si ce n’est que la rébellion menée par les cadres pourrait, enfin, faire bouger les lignes.

Une prise de parole salvatrice

« Pour l’avoir vécu, cela ne fait pas plaisir d’aller parler dans la presse de l’équipe de France », commente-t-elle donc ce lundi 6 mars. « Si on le fait, c’est un sacrifice, car on sait que derrière les retombées ne vont pas forcément être positives collectivement et individuellement », explique-t-elle, insistant sur la nécessité de « préserver l’institution ».

À cet égard, Gaëtane Thiney reconnaît la « souffrance » qui sous-tend la décision des joueuses actuelles de parler à leur tour. Mais elle évoque aussi « une prise de risque assumée ». Ce qu’elle justifie ainsi : « Quand une joueuse prend la parole, soit on se dit qu’elle est capricieuse, en fin de carrière, aigrie, qu’elle n’a plus le niveau, ou alors on se dit que c’est une personne qui aime la France et qui a envie que les choses avancent. »

En effet, pour la joueuse de 37 ans, le fait que ses cadettes aient suivi son exemple et réclamé une transformation du système est de bon augure pour la suite. « Il n’y a pas de ’république des joueuses’. Tout ce qu’on vient de vivre, on doit le voir très positivement en disant que cela ne doit plus arriver. » Car entre la Coupe du monde de l’été en Australie et en Nouvelle-Zélande, puis les Jeux olympiques de Paris en 2024, l’avenir d’une équipe de France enfin apaisée pourrait être radieux. Et voir le retour de Gaëtane Thiney pour un baroud d’honneur ?

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