Le fou rire de Kylian Mbappé rappelle le devoir d’exemplarité des stars

Paris Saint-Germain's French forward Kylian Mbappe shares a laugh during a press conference at the Parc des Princes stadium in Paris on September 5, 2022 on the eve of the UEFA Champions League football match between Paris Saint-Germain and Juventus Turin. (Photo by FRANCK FIFE / AFP)

FRANCK FIFE / AFP

Kylian Mbappé est accusé d’avoir failli à son devoir d’exemplarité en rigolant après une question sur l’écologie.

SPORT - Pour Kylian Mbappé, c’est un premier (gros) couac en matière de communication dans sa (jeune) carrière. Présent en conférence de presse avec Christophe Galtier, lundi 5 septembre, il maîtrisait son sujet, comme d’habitude. Jusqu’à son fou rire quand un journaliste a demandé à son entraîneur si le PSG envisageait de faire ses déplacements courts en TGV, et non en jet, comme l’a suggéré le directeur général de Voyages SNCF, Alain Krakovitch. Une réaction qui a provoqué la colère de plusieurs personnalités, rappelant en bloc à Kylian Mbappé son devoir d’exemplarité.

David Belliard, adjoint écologiste à la mairie de Paris, l’a ainsi rappelé sur RMC : « Ce sont des réactions de gens qui gagnent des millions d’euros. Ils représentent Paris, la France, et ceux qui croient en cette équipe (...) Lorsqu’on est le PSG, on a un devoir d’exemplarité. » Il accuse le joueur et son entraîneur de faire preuve de « mépris et de déni face à la question des dérèglements économiques. »

Même son de cloche du côté Fatoumata Koné, elle aussi élue à la mairie de la capitale, en tant que présidente du Groupe écolo Paris, qui insiste : « Une équipe comme celle du PSG a un réel pouvoir d’influence et un devoir d’exemplarité. » Quant à Olivier Faure, le premier secrétaire du Parti socialiste, il appelle le joueur et son entraîneur à utiliser leur « influence hors du commun pour que s’engage la transition écologique. »

Une immense popularité

« Quand ils [les stars] font des écarts et qu’ils ne sont pas aptes à répondre à des questions, on ne leur pardonne pas », analyse Maxime Travert, un chercheur dans le sport et la jeunesse de l’université d’Aix-Marseille, contacté par Le HuffPost. Il juge l’influence de Kylian Mbappé très importante : « Il suffit de regarder comment il est suivi sur les réseaux sociaux. » Il est le footballeur français qui compte le plus grand nombre d’abonnés sur Instagram : 72,5 millions.

D’autres chiffres confirment son immense popularité. En décembre 2021, un sondage Ifop le plaçait à la 19e place du classement des personnalités préférées des Français. Il est 6e chez les jeunes hommes de 15 à 24 ans. Dans tous les cas, il en était le premier sportif.

Selon une autre enquête relayée par Le Parisien et menée par Semrush, un spécialiste mondial du marketing digital, il est le deuxième sportif le plus recherché sur Internet de l’année 2021 en termes de requêtes mensuelles moyennes. Juste derrière Lionel Messi, mais devant Cristiano Ronaldo ou Neymar.

Un grand pouvoir d’influence

« De nombreux jeunes l’ont choisi comme exemple à cause d’une sorte de proximité : ils s’identifient à son parcours, son comportement ses valeurs, le milieu d’où il vient… Kylian Mbappé n’a pas décidé d’être un exemple, il a été choisi », explique Maxime Travert. Ce qui implique une contrepartie : le joueur doit contrôler son comportement, sa tenue ou son langage, selon l’enseignant-chercheur.

« Il a une forme de responsabilité. Ceux qui l’identifient comme un modèle vont prendre les mêmes positions… » Le risque, que les jeunes reproduisent un comportement qui n’est pas attendu par la société. « Mbappé devient un moyen de justifier une position pas forcément collectivement admise. Il devient un alibi. Un gamin qui s’est totalement identifié peut se dire : ’Mbappé montre bien que le climat n’est pas un problème fondamental.’ »

Pourtant, ce pouvoir d’influence pourrait être utilisé à bon escient. Pour la climatologue Valérie Masson-Delmotte, interrogée mardi 6 septembre au micro de Léa Salamé sur France Inter, Kylian Mbappé ferait un excellent ambassadeur de la cause climatique : « Les propos qu’il peut avoir, les gestes qu’il fera, auront une influence très largement supérieure à ce que les scientifiques peuvent dire ou faire (...) Il y a plein de scientifiques qui seraient ravis d’échanger avec les footballeurs au PSG et ailleurs pour partager les connaissances et susciter leur action. »

Un joueur pourtant engagé

Surtout, Kylian Mbappé fait d’ordinaire très attention à son image et commence à prendre des engagements. Il a refusé, au printemps dernier, de s’associer à certaines campagnes publicitaires de l’Équipe de France. Trois marques étaient dans son viseur : Coca-cola et KFC, souvent accusés de promouvoir la malbouffe, et Betclic, un site de paris en ligne.

En décembre 2020, Kylian Mbappé était l’un des Parisiens qui a poussé ses coéquipiers à quitter la pelouse du match entre le PSG et Istanbul Basaksehir après les propos racistes du quatrième arbitre. Dans une interview pour L’Obs, parue en 2021, il s’est positionné « contre la violence », à la suite du tabassage de Michel Zecler. À l’instar de Lebron James ou de Marcus Rashford, il estime « qu’un grand sportif se doit d’être engagé » et assure connaître « le poids de mes mots et de mes actes. »

Pour Maxime Travert, c’est donc tout à fait normal qu’il soit interrogé sur le dérèglement climatique : « À partir du moment où Kylian Mbappé a choisi de s’engager sur certains sujets, il ne faut pas qu’il soit étonné s’il est questionné sur tous les domaines sociaux, politiques ou culturels. »

Footballeurs et écologie

Ce fou rire de Kylian Mbappé, qu’il soit de l’ordre de la maladresse ou du mépris, intervient en outre dans un contexte où les footballeurs et les stars en général sont « de plus en plus scrutés sur les réseaux sociaux », selon Maxime Travert. « C’est là qu’on repère le moindre écart. » D’ailleurs, à l’origine de la polémique, il y avait une vidéo postée par Marco Verratti, milieu de terrain du PSG, dans le jet sur le trajet retour après un match à Nantes.

En juillet, c’est Karim Benzema qui se faisait reprendre pour sa carte postale peu écologique dans un clip de vacance posté sur Instagram. Lionel Messi, lui, s’est fait alpaguer par l’association Attac pour l’utilisation de son jet privé, qui a réalisé plus de 50 vols depuis début juin et aurait produit 1 502 tonnes de CO2. Ces polémiques autour de l’impact environnemental des footballeurs sont mal reçues, surtout après un été qui aura éveillé la conscience écologique de beaucoup de Français.

À voir également sur le HuffPost : Mbappé insulté par les fans du Real Madrid après leur victoire en Ligue des Champions

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