Fifou, photographe du rap français, explore ses 20 ans d'"Archives" dans un livre

Photographe incontournable du rap français, Fifou compile ses 20 années de carrière dans l'ouvrage
Photographe incontournable du rap français, Fifou compile ses 20 années de carrière dans l'ouvrage

Booba, PNL, Aya Nakamura, Jul, SCH… tous sont passés devant son objectif. Chapeau noir visé sur la tête et appareil greffé à la main, à 39 ans, Fifou est le photographe à qui l'on doit les plus célèbres pochettes d'albums du rap français.

Surnommé "l’homme au 1000 covers", ce passionné - qui confie toutefois ne plus tenir à jour le nombre de ses productions - s’est hissé depuis le début des années 2000 au rang d’incontournable du rap hexagonal grâce à son style novateur et sa créativité débordante.

Une carrière longue de 20 ans, débutée dans un studio parisien et retracée en 560 pages dans l'ouvrage Archives, disponible ce jeudi en librairies. L’occasion de revenir sur le parcours de cet homme de l’ombre qui a su mettre en lumière le rap français.

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Première pochette officielle avec Kool Shen

"J’ai très vite su que je voulais travailler dans l’image et être dessinateur de bandes dessinées", assure Fifou au micro de BFMTV. C’est au lycée que ce passionné de rap fait ses premiers pas dans le milieu. À 16 ans, il tient une chronique sur la radio associative de Chelles, Vallée FM, un programme qui passe juste avant une émission dédiée au rap, animée par DJ Mars, créateur du label Time Bomb.

"J'avais mon book avec des croquis de rappeurs et j'allais voir les artistes à la sortie de la radio en leur proposant de les dessiner et de refaire leur logo. C'est comme ça, avant Instagram et Myspace que je me suis fait connaître", confie le photographe.

Lunatic, Oxmo Puccino, X-Men, tous les rappeurs les plus influents de l’époque se succèdent au micro de Vallée FM. Dans ces locaux, le lycéen fera également la rencontre de l’artiste Princesse Aniès, qui deviendra l’une de ses amies proches et sera la première à le faire entrer dans le monde du rap.
C’est en 2005 que Fifou réalise sa première pochette officielle. Sollicité par l’entourage de Kool Shen (NTM), le jeune photographe n’a jusqu’alors jamais réalisé de shooting en studio. Mais pas de quoi décourager cet autodidacte qui tire en une après-midi plus de 1000 photos du rappeur.

"Lors de cette session je me suis rendu compte que j'avais beaucoup de choses à apprendre. C'était un crash-test pour moi. Je n'avais aucune notion du matériel studio mais j’ai eu un espèce de déclic: je me suis dis que je pouvais le faire", explique Fifou.

Résultat, parmi les nombreuses photos prises par Fifou, seule une n’est pas floue. Kool Shen la gardera pour son single L’avenir est à nous, en feat avec Rohff et Dadoo. Le début de l’ascension pour le jeune photographe.

Le tout Paris underground

Rapidement, Fifou est de plus en plus sollicité par les artistes. Dans son 9m2 parisien converti en studio, ce passionné enchaîne les shootings et signe des centaines de pochettes d’albums. Sa force: sa disponibilité à toute épreuve et sa capacité d’improvisation face à tous les artistes avec qui il travaille.

"À l’époque, je ne comptais pas mes heures de travail, je bossais nuit et jour. Chez moi c'était comme chez le médecin, tu croisais des gens très connus comme des gens indépendants, des acteurs, des stylistes... C'était une espèce de factory parisienne ou le tout Paris underground et connu se croisait, c'était assez haut en couleurs", décrit-il.

De fil en aiguille, le photographe acquiert même une notoriété internationale: il tournera un court-métrage avec l’une de ses idoles, Snoop Dogg, à Los Angeles en 2013 et se retrouvera par hasard dans un appartement avec Mobb Deep à New York.

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Son talent et sa patte innovante permettent également à Fifou de collaborer avec les très demandés PNL. Sans jamais rencontrer les deux rappeurs, le photographe réalise la pochette de leur album Dans la légende, sorti en 2015, devenu un incontournable du rap français.

"Tout s'est fait via les réseaux. PNL ont été précurseurs de cette manière de travailler. Ça a été une nouvelle manière de créer visuellement pour moi et c'était un peu aussi mon retour à l'illustration", détaille Fifou.

De photographe à directeur artistique

Alors qu'aujourd’hui Fifou pourrait jouir pleinement de sa renommée et ne travailler qu’avec les gros poissons, le photographe reste avant tout un passionné de rap et garde,; chevillée au corps, l'envie de collaborer avec tout le monde.

"Que les artistes soient indépendants, en place, confirmés... je leur donne la même attention. Pour moi, ils sont tous des super héros de la culture rap et ils sont tous plus impressionnants les uns que les autres. Je serai autant passionné de bosser avec quelqu’un comme Naps qu'avec un nouvel artiste que personne ne connaît", assure le photographe.

Mais ce touche à tout souhaite étendre le champ de sa créativité. Avec certains artistes, il occupe désormais davantage un rôle de directeur artistique que de photographe. "Il y a beaucoup de sortie d'albums donc il faut tout de suite être identifiable et sortir du lot par rapport à tout ce qu'on peut voir dans le rap français", explique t-il.

Et d'ajouter: "Je travaille de plus en plus en 360 car aujourd'hui on est plus uniquement sur une pochette c'est une DA globale: derrière la cover il y a potentiellement un clip, une scénographie, du mershandising..."

L'après, ce fou d'images l'imagine dans la réalisation de clips, un exercice auquel il s'est déjà essayé notamment avec SCH et Dinos. "La vidéo pour moi c'est l'évolution naturelle de la photographie parce que tu as de plus en plus d'idées de mise en scène que tu ne peux faire forcément faire en photo. Faire des clips c'est quelque chose qui m'intéresse de plus en plus".

Article original publié sur BFMTV.com