Européennes 2024 : le Rassemblement national multiplie les coups médiatiques pour faire sa liste

Jordan Bardella photographié le 3 mars à Marseille lors du meeting de lancement de sa campagne européenne.
CHRISTOPHE SIMON / AFP Jordan Bardella photographié le 3 mars à Marseille lors du meeting de lancement de sa campagne européenne.

POLITIQUE - Jordan Bardella va-t-il ouvrir sa liste pour les européennes 2024 jusqu’aux membres du Rassemblement national ? Si cette question paraît un brin exagérée, force est de constater que le parti lepéniste accumule les « prises de guerre » recrutées hors de ses bases en amont du scrutin. Dernier en date, celui ce mardi 9 avril de Matthieu Valet, ancien chef adjoint de la brigade anticriminalité (BAC) du Val-de-Marne et porte-parole du Syndicat indépendant des commissaires de police.

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« Marine Le Pen et Jordan Bardella me donnent la formidable occasion de porter les couleurs de mon institution au Parlement européen », a déclaré cet habitué des plateaux de télévision, qui démentait il y a quelques semaines sa volonté de rejoindre le RN, malgré les rumeurs insistantes et un discours sécuritaire et migratoire aligné sur celui de Marine Le Pen.

Avant lui, ont été annoncées dans des conditions similaires les arrivées de l’essayiste Malika Sorel, de l’ancien avocat de la Manif pour Tous Alexandre Varaut et de l’ex-dirigeant de Frontex Fabrice Leggeri. Et selon le parti à la flamme, bien décidé à égrainer les candidats au compte-gouttes pour ménager l’effet médiatique, d’autres noms sont à venir. Car il en va des européennes, mais pas seulement.

Une large place à la société civile

« Pour assumer une alternance qui soit une véritable alternative, l’opinion attend que des fractions de l’élite, on va dire des personnalités éminentes - scientifiques, économiques, administratives, etc. -, annoncent leur disponibilité », théorisait en février dans Le Figaro le sondeur Jérôme Sainte-Marie, lui-même recruté par le RN pour assurer la formation de ses cadres, dans une tribune sous forme d’appel du pied aux candidats aux ralliements.

Au mois de novembre, Le Parisien chiffrait à un tiers de la liste la place dévolue à ces nouveaux profils. Auprès du quotidien, une source parlementaire s’en amusait : « Bardella veut faire une liste CNews de gens vus à la télé ». À sa décharge, il n’est pas le seul, puisque l’animatrice Christine Kelly a été approchée par Éric Zemmour et Éric Ciotti pour ces mêmes élections. Reste qu’un tiers issu de la société civile, ça représente tout de même 25 places dans un scrutin où, au regard des sondages, le RN peut espérer obtenir 29 sièges.

Or, on imagine bien que c’est une place éligible qui est promise à ceux qui mettent leur carrière entre parenthèses et offrent leur notoriété à un parti bien heureux d’apparaître comme une force d’attraction permettant de donner corps à la promesse de « rassemblement » figurant dans son nom. Et ce, tout en diversifiant ses profils dans le but d’acquérir l’image d’une formation « de gouvernement ». Ce qui, mécaniquement, pose la question de la place accordée aux eurodéputés sortants, dont certains affichent un profil ayant de quoi gêner cette quête de crédibilité.

Des précédents peu reluisants

Si Thierry Mariani, envoyé pour remplacer pour Jordan Bardella lors du premier débat des élections européennes, est certain de rempiler malgré une russophilie assumée dont se passerait bien le RN, tous ne seront pas reconduits. Et pour l’instant, c’est le flou qui domine. « La liste est encore en cours de construction, et elle ne sera pas dévoilée en intégralité avant plusieurs semaines », expliquait début mars le directeur de campagne du RN pour les élections européennes Alexandre Loubet, au moment où Le HuffPost cherchait à savoir si l’eurodéputée RN Virginie Joron, égérie des antivax, serait réinvestie.

En attendant, le RN a jusqu’au vendredi 17 mai 18 heures pour déposer sa liste. D’ici cette date, la formation de Jordan Bardella ne manquera pas de feuilletonner les ralliements, puisque c’est une véritable tradition au sein du parti à la flamme. Comme le rappelle Libération ce mardi, Marine Le Pen a tout le temps mis en avant des personnalités de « ralliements » censées démontrer la caducité de son infréquentabilité politique.

Du préfet Christophe Bay en 2022 (épinglé par la presse), à l’acteur Franck de Lapersonne en 2017 (qui a claqué la porte du FN) en passant par l’« essayiste » Hervé Juvin en 2019 (condamné pour violences conjugales), le FN (puis le RN) s’est toujours félicité de ces coups médiatiques, même si la plupart ont fini par mettre Marine Le Pen dans l’embarras. Là réside le principal risque de cette stratégie pour le RN, en pleine ascension sondagière : attirer des profils opportunistes et finalement peu fiables, comme la lumière aguiche les moustiques. À Jordan Bardella de faire mieux que Marine Le Pen en la matière.

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