"On doit les écouter": Brigitte Macron et Mika prennent la parole pour briser l"omerta" autour du harcèlement scolaire
"Il faut qu'on les entende." À trois jours de la journée nationale contre le harcèlement scolaire, Brigitte Macron et Mika se sont rendus ce lundi 6 novembre dans un lycée parisien pour rencontrer des victimes de ce fléau. C'est au sein même d'une salle de classe que l'ancienne professeure de français et le chanteur ont accordé un entretien exclusif à BFMTV.
Qualifié d'"extrêmement dangereux" par la première dame, le harcèlement scolaire est largement sous-évalué en France, selon une étude de l'Ifop publiée ce mardi. Un élève sur cinq dit avoir été victime de violences répétées et pour 16% des victimes, le harcèlement, principalement groupé, dure plus d'un mois.
Le chanteur né au Liban - qui a fait une partie de sa scolarité en France et au Royaume-Uni - a lui-même été harcelé à l'école. C'est pourquoi, il en a fait un combat. "J'ai dû vivre avec. Le harcèlement isole (...) Désormais, j'ai 40 ans, j’ai trouvé une manière de faire ma vie, je suis heureux. Mais j'ai eu ça dans mon passé et je ne vais pas le cacher, je vais en parler", a-t-il clamé sur notre antenne.
L'école "de moins en moins défaillante"
Face à la hausse des cas de harcèlement, Brigitte Macron ne s'est quant à elle pas montrée défaitiste. En prenant l'exemple de l'artiste engagé pour "une bonne cause", elle a commenté: "Maintenant, la parole est ouverte. Avant, on ne le disait pas." Elle a alors pointé du doigt une "omerta que tout le monde s'impose": la "peur des conséquences" d'une prise de parole. "Quand une chose est sue, elle va exploser (...) Mais après le bruit, il y a la guérison."
Selon l'ancienne professeure, l'école est "de moins en moins défaillante" pour accompagner les victimes. Pourtant, ces derniers mois, plusieurs cas d'élèves harcelés ont marqué l'opinion publique, mettant en évidence des dysfonctionnements du système.
Un parent sur 3 se dit d'ailleurs "très insatisfait" de la gestion de ces situations, tandis qu'ils sont 1 sur 2 à se dire "insatisfaits." Par exemple, la famille de la jeune Lindsay, qui s'est suicidée à 13 ans dans le Pas-de-Calais en mai dernier, a publiquement désigné le principal du collège comme l'un des responsables du décès de l'adolescente. Reçue en juin par le ministre de l'Éducation nationale de l'époque Pap Ndiaye, la mère de Lindsay avait ensuite déploré le manque de "sincérité" du ministre.
Le lendemain de la rentrée scolaire, un autre adolescent s'est donné la mort à Poissy, dans les Yvelines. Les parents de Nicolas, 15 ans, s'étaient plaints l'année précédente auprès de l'établissement du harcèlement que subissait leur fils. Ils avaient alors reçu un courrier au ton menaçant envoyé par le rectorat de Versailles. Le nouveau ministre de l'Éducation Gabriel Attal avait qualifié ce courrier de "honte" et ordonné une enquête administrative.
Pour Brigitte Macron, les quelque 120 courriers "dits de réprobation" envoyés à des familles par le rectorat de Versailles ne sont "pas acceptables". "On doit les écouter. À partir du moment où il y a l’expression d’une souffrance, il faut l’écouter. Il y a forcément quelque chose, donc il faut l’examiner."
"On n'oubliera jamais Lucas"
Autre cas marquant de ces derniers mois: Lucas, 13 ans, qui s'est suicidé dans les Vosges. "Cet enfant, il restera avec nous", s'est rappelé Brigitte Macron.
Lundi, la cour d'appel de Nancy a décidé de relaxer quatre collégiens poursuivis pour harcèlement à l'origine de son suicide. La Cour a relevé le caractère "odieux" de propos qui avaient été tenus par les prévenus "entre le 1er septembre 2022 et début octobre 2022", mais elle souligne "l'absence d'effet démontré" de ces propos "sur la santé mentale de Lucas". Une décision qui a "anéanti" la mère de l'adolescent.
"Nous respectons les jugements mais ça n'enlève pas que Lucas, on en parle. Lucas, il est avec nous. Lucas, on ne l'oubliera jamais, jamais. Et ça, c'est excessivement important", a-t-elle partagé sur notre antenne.
"La maman, ce qu'elle doit ressentir aujourd'hui, c'est incommensurable en douleur", a-t-elle également déclaré.
Mettre en place "des éléments de langage"
Le gouvernement a annoncé depuis l'été une série de mesures contre ce "phénomène massif" devenu une priorité de Gabriel Attal, la Première ministre promettant une "mobilisation générale".
"Il faut que les enfants entendent leurs droits mais il faut aussi qu’ils entendent leurs devoirs", a estimé Brigitte Macron.
Elle a alors plaidé pour un meilleur accompagnement du corps enseignant qui passera par la "mise en place des éléments de langage". "C'est ce que fait en ce moment Gabriel Attal et je trouve ça très bien. À partir du moment où on a un conducteur, on sait où aller et comment y aller."
Le première dame a utilisé la métaphore d'un "paquebot" et ses "trois commandants". Le premier, Jean-Michel Blanquer, ministre de l'Éducation de 2017 à 2022 "qui a mis en place le programme de lutte contre le harcèlement à l'école (pHARE). Le deuxième, Pap Ndiaye, celui "qui l'a généralisé". Et le troisième, Gabriel Attal qui "est parti tout de suite sur le sujet".
"Je lis les lettres qu'on m'envoie"' au président
Engagée depuis plusieurs années dans la lutte contre le harcèlement en milieu scolaire, Brigitte Macron a assuré que son mari considérait le sujet comme "essentiel". "On parle de tout. Je n'ai pas besoin de faire pression, c'est un sujet qu'il fait sien", a-t-elle expliqué.
Elle a ensuite confié: "Ce matin, il était très content. Il m'a dit: 'Surtout, tu leur dis à quel point c'est ma préoccupation.' Je ne l’influence pas, il n’a pas besoin de moi pour ça."
En janvier dernier, Brigitte Macron confirmait recevoir un total de 20.000 lettres par an, dont "beaucoup de courriers sur le harcèlement". Sur notre antenne, elle a indiqué qu'elle lisait à Emmanuel Macron les lettres qu'on lui envoyait sur le sujet. "Je l'alerte beaucoup sur la violence que les enfants se prennent en ce moment. Elle est partout, elle est dans le monde."