Covid-19 : pourquoi le Chili se confine alors qu'il est un leader de la vaccination ?

Le Chili vaccine massivement sa population

Plus de 33% des Chiliens ont reçu au moins une dose de vaccin. Pourtant le pays vient de décider d'un nouveau confinement strict.

Plus de 80% des Chiliens de nouveau soumis à un confinement total, sans même la possibilité de sortir le week-end pour acheter des produits de base. Une mesure prise pour faire face à une brutale recrudescence des infections depuis plusieurs semaines, et qui sature les hôpitaux.

Le taux d'occupation des unités de réanimation est désormais de 95%. Le nombre d'infections recensés chaque jour approche le pic de la première vague, enregistré en juin dernier dans le pays, qui enregistre près de 23 000 morts depuis le début de la pandémie.

Évolution du nombre de cas par million d'habitants au Chili.
Évolution du nombre de cas par million d'habitants au Chili.

Si la décision d'un nouveau confinement n'a malheureusement rien d'étonnant pour endiguer une flambée des cas, la situation sanitaire du pays intrigue certains, qui remettent en doute l'efficacité du vaccin. Car cette flambée des cas intervient alors que le Chili est un des leaders mondiaux en terme de vaccination.

Un Chilien sur trois a reçu une dose de vaccin

Avec plus d'un Chilien sur trois (33,4%) ayant reçu une dose de vaccin contre le Covid-19, le Chili est l'un des pays les plus avancés en terme de vaccination, uniquement devancé par Israël (60,3%) et le Royaume-Uni (43,8%), et loin devant la France (11,1%).

Part des habitants ayant reçu une dose de vaccin contre le Covid-19.
Part des habitants ayant reçu une dose de vaccin contre le Covid-19.

Au Chili, deux vaccins sont injectés depuis le début de la campagne le 24 décembre, d'abord au personnel soignant et depuis le 3 février aux personnes les plus âgées ou exposées. Pfizer et le vaccin Coronavac du laboratoire chinois Sinovac, efficace à 79% après deux doses selon le laboratoire, contre 94% pour Pfizer et 82% pour AstraZeneca.

"Rien d'anormal"

Un reconfinement alors que la vaccination progresse qui étonne certains, qui y voient une inutilité du vaccin mais qui "n'a rien d'anormal" pour le généticien Axel Kahn, qui rappelle que seuls 17% des Chiliens ont reçu les deux doses de vaccin.

"Le vaccin Coronavac est très peu efficace avec une seule dose, comparé aux vaccins injectés en France. Donc il faut considérer que seuls 17% des Chiliens sont protégés aujourd'hui", nous précise le généticien. Le vaccin le plus injecté en France, Pfizer, a une efficacité pouvant atteindre jusqu'à 90% 21 jours après la première dose, et celui d'AstraZeneca de 76%, trois semaines après la première dose.

"Le Chili loin de l'immunité collective"

Le vaccin Coronavac nécessite deux doses, espacées de 28 jours, pour atteindre 79% d'efficacité selon les données du laboratoire, 50% selon une vaste étude menée au Brésil. "Les personnes vaccinées aujourd'hui au Chili ne seront protégées qu'à la fin avril", rappelle Axel Kahn, qui souligne qu'une campagne de vaccination n'a pas d'effet immédiat sur l'épidémie, quel que soit le vaccin utilisé.

La vaccination progressive n'est pas le seul élément qui explique la situation au Chili ."On sait que pour bloquer totalement un pic ou une reprise épidémique, il faut atteindre une immunité collective. Avec 17% de personnes ayant reçu deux injections, le Chili est loin de pouvoir compter seulement sur la vaccination pour lutter contre cette deuxième vague", rappelle Axel Kahn.

Les premiers effets de la vaccination attendus en avril

Pour rappel, l'immunité collective, soit la part de la population devant être protégée contre une maladie pour qu'elle régresse, est estimée à environ 60 à 70% pour le SARS-COV-2, selon les modèles. Les autorités sanitaires espèrent que les premiers effets de la vaccination se feront sentir en avril, notamment sur les lits en réanimation.

Enfin, rappelle le généticien, le vaccin Sinopharm comme tous les autres vaccins, a été développé depuis la souche d'origine du SARS-COV-2, avant le développement des différents variants que l'on connait aujourd'hui. "Or, le Chili est proche du Brésil, où circule un variant qui réduit l'efficacité des vaccins et peut entrainer la réinfection de malades qui avaient contracté le virus sous sa forme d'origine. On peut craindre que le variant brésilien circule activement au Chili et réduise l'efficacité de la campagne vaccinale".

L'effet du variant brésilien ?

Jeudi dernier, 45 cas du variant brésilien ont été détectés au Chili. Un variant qui circule dans toute l'Amérique latine, on estime qu'au Pérou, le variant brésilien est la cause de 40% des contaminations enregistrées ces derniers mois à Lima.

Le variant sud-africain, proche du variant brésilien, a par exemple conduit l'Afrique du Sud à abandonner la vaccination avec AstraZeneca, trop peu efficace. Il n'existe aucune étude menée directement sur l'efficacité du vaccin Coronavac face au variant brésilien. Mais une étude menée au Brésil, dont on ignore si elle comportait des cas de variant brésilien, rapporte une efficacité d'environ 50% du vaccin chinois.

D'autres éléments sont également avancés pour expliquer cette flambée des cas malgré l'avancée de la vaccination. Les vacances d'été viennent de s'achever au Chili, et ont donné lieu à des déplacements dans tout le pays pendant plusieurs semaines, ce qui a pu favoriser la diffusion du virus, à l'instar de la France l'été dernier, qui a connu un rebond de l'épidémie dès le mois de septembre.

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