Que changerait l'inscription de l'IVG, voulue par Macron, dans la Constitution ?

Le président de la République a annoncé qu'il allait envoyer un projet de loi constitutionnelle au Conseil d'État. Une promesse qui pourrait entrer en vigueur en 2024.

Mieux sécuriser ce droit. Emmanuel Macron a annoncé ce dimanche 29 octobre qu'il allait envoyer un projet de loi constitutionnelle pour "graver dans notre Constitution la liberté des femmes à recourir à l'IVG" (interruption volontaire de grossesse) au Conseil d'État la semaine prochaine.

Le chef de l'État s'était engagé le 8 mars dernier, journée internationale des droits des femmes, à présenter ce projet de loi, en réponse aux inquiétudes nées de l'annulation il y a un an et demi de l'arrêt garantissant aux États-Unis le droit d'avorter sur tout le territoire.

Une "liberté irréversible"

L'article, qui doit encore être voté, a déjà été écrit. Plus précisément, il s'agirait d'un nouvel alinéa, ajouté à l'article 34 de la Constitution.

"La loi détermine les conditions dans lesquelles s'exerce la liberté de la femme, qui lui est garantie, d'avoir recours à une interruption volontaire de grossesse", indique l'alinéa qui sera présenté au Conseil d'État.

Pour Emmanuel Macron, inscrire l'IVG dans la Constitution doit permettre de garantir qu'elle soit une "liberté irréversible" pour toutes les femmes qui le souhaitent.

Inquiétude née de la situation aux États-Unis

En clair, il s'agirait de sécuriser ce droit contre toute tentative de suppression. L'inquiétude est née en France après l'annulation il y a un an et demi de l'arrêt garantissant aux États-Unis le droit d'avorter sur tout le territoire américain et alors que le droit à l'avortement recule également dans certains pays européens, comme la Roumanie ou la Slovaquie.

En novembre 2022 déjà, La France insoumise (LFI) avait déposé à l'Assemblée nationale une proposition de loi visant à inscrire le droit à l'avortement dans la Constitution et qui a été votée par les députés, puis en février dernier au Sénat.

Dans ce texte, une nuance était cependant introduite: il était question de garantir "la liberté" d'avorter, plutôt que son "droit". Pour autant le texte n'était pas encore définitivement adopté.

Éviter le référendum

Lors de la dernière journée internationale des droits de femmes, le 8 mars, le chef de l'État s'était dit favorable à l'inscription de l'IVG dans la Constitution.

"Je souhaite que ce travail de rapprochement des points de vue reprenne pour aboutir dès que possible", avait-il ensuite rappelé le 4 octobre dernier, devant le Conseil constitutionnel, à l'occasion des 65 ans de la loi Veil.

Le président avait précisé à cette occasion vouloir "convoquer un Congrès à Versailles" sur ce sujet. Un moyen de faire adopter le texte de façon plus rapide, en évitant d'en passer par un référendum. Le gouvernement craint en effet que mettre le débat sur la place publique crée des divisions au sein de l'opinion.

Se prémunir d'une potentielle future remise en cause

Alors que l'accès à l'avortement ne semble pas remis en cause actuellement en France, les élus s'étaient voulus prudents. "Personne ne peut prédire l’avenir", avait clamé la députée LFI Mathilde Panot à l'Assemblée lors des débats sur le projet de loi.

Le recours à l'avortement est déjà garanti dans l'Hexagone par la loi Simone Veil, votée en 1975. Elle permet actuellement aux femmes d'interrompre leur grossesse jusqu'à 12 semaines d'aménorrhée.

Ce droit pourrait cependant être remis en cause en cas de changement de majorité à l'Assemblée, le changement de loi étant plus simple qu'un changement de la Constitution, plus rigide.

Un acte aussi "symbolique"

L'inscription du droit à l'avortement dans la Constitution aurait par ailleurs une portée "symbolique", selon certains experts.

"Notre constitution contient très peu de droits fondamentaux directement dans son texte et même nos catalogues de droits ne sont pas aussi fournis que d’autres Constitutions", indiquait la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina dans une tribune au JDD.

"Aussi, inscrire un droit fondamental des femmes directement dans le corps constitutionnel 'manifesterait l’attachement' du peuple français à ce droit", estimait-elle.

Les Français largement pour

Après la déclaration d'Emmanuel Macron du mois dernier, la Fondation des Femmes s'était "félicitée de la volonté d'avancer du président de la République", tandis qu'à l'inverse, Alliance Vita, qui milite notamment contre l'avortement, avait estimé que l'urgence était à "la prévention et pas à la constitutionnalisation".

Selon un sondage Ifop paru en juillet 2022, plus de 8 Français sur 10 (81%) se disent "favorables à l’inscription de l’accès à l’IVG dans la constitution française".

Article original publié sur BFMTV.com

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