« Barbie » de Greta Gerwig : on n’en pouvait plus de la promo et pourtant on a adoré le film

« Barbie » se moque des propres clichés de la plus célèbre des poupées, comme ses pieds arqués.
« Barbie » se moque des propres clichés de la plus célèbre des poupées, comme ses pieds arqués.

CINÉMA - Après une overdose de rose pendant des mois de promotion, Barbie aurait pu décevoir. Mais le film tant attendu, qui sort ce mercredi 19 juillet, est à la hauteur de son marketing démesuré. La comédie déjantée de Greta Gerwig n’essaie ni de convaincre que Barbie est féministe, ni qu’elle est bonne à jeter à la poubelle.

La réalisatrice tient la promesse de la bande-annonce : « Si vous aimez Barbie, ce film est pour vous. Si vous détestez Barbie, ce film est pour vous ». Pendant près de deux heures, on a ri à en avoir mal au ventre, on en a pris plein les yeux devant les décors incroyables de Barbieland et on a eu envie de danser avec Margot Robbie et Ryan Gosling sous une boule disco.

Esthétiquement, Barbie est aussi parfait et soigné que la poupée. Certaines scènes, notamment les numéros de danse, n’apportent rien à l’histoire mais sont si bien réalisées qu’on en redemande. Ryan Gosling est hilarant en Ken et fera taire tous les critiques sur son choix de casting. Il arrive à émouvoir en surjouant la bêtise et captive l’attention à chacune de ses apparitions.

Barbie paradoxe

Avec la réalisatrice féministe Greta Gerwig (Lady Bird, Les Filles du docteur March) derrière la caméra, Barbie ne pouvait évidemment pas se contenter d’être beau et de se taire. Sous couvert de blagues et de situation absurdes, le film critique le sexisme de la poupée et plus généralement le patriarcat.

Le message est d’autant plus efficace que le ton sur lequel il est délivré reste léger. De quoi faire rire même les plus sceptiques dans la salle. Même le monologue d’America Ferrera sur la difficulté d’être une femme, dans lequel beaucoup de spectatrices se reconnaîtront, trouve vite une utilité dans le scénario et évite de tomber dans la tirade activiste.

Barbie réussit surtout l’exploit de reconnaître ses propres paradoxes et de s’en servir. Lorsque la poupée jouée par Margot Robbie est censée être en pleine crise existentielle, pas maquillée et supposément laide, Greta Grewig ironise sur le choix de son actrice, qui illustre tous les canons de beauté de la société occidentale.

Mattel n’est pas épargné

Le plus gros paradoxe et le plus habilement exploité reste celui du financement du film. Barbie est produit par Mattel mais l’entreprise de jouet en prend pour son grade. Sa noble mission d’inculquer aux petites filles qu’elles peuvent être chirurgiennes, astronautes ou présidentes, mais en talons de 12 centimètres, est ridiculisée.

En plus du physique irréaliste de Barbie, le film se moque aussi des autres poupées problématiques de Mattel (Midge l’amie enceinte, Skipper et sa version « puberté » dont les seins gonflent, Ken Sugar Daddy…). Il aborde la ringardise de Barbie aux yeux de la nouvelle génération de jeunes filles, qui dénoncent le sexisme mais aussi le consumérisme polluant promu par la poupée.

Mais tout en tapant sur les doigts de Mattel, le film lui donne un gros coup de projecteur, à l’écran comme à travers ses produits dérivés. Il rend hommage à la créatrice de Barbie, Ruth Handler. Et les fausses publicités insérées entre certaines scènes ont beau être ironiques, elles nous donnent quand même envie d’acheter « Barbie dépression ».

De la même manière qu’on peut avoir aimé jouer avec une Barbie et reconnaître qu’elle véhicule des stéréotypes nocifs pour les femmes, on peut donc réaliser un excellent film et en mettre plein les poches de l’entreprise que l’on pointe du doigt.

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