Affaire Pilarski : le parquet demande un procès pour Christophe Ellul, le compagnon de la victime

Le parquet de Soissons demande que Christophe Ellul soit jugé par un tribunal correctionnel pour "homicide involontaire". Le compagnon de la victime était en effet le propriétaire du chien qui a provoqué la mort de la jeune femme.

Une certitude. Curtis, le chien de Christophe Ellul, est bien le responsable de la mort d'Elisa Pilarski, cette jeune femme de 29 ans, enceinte de six mois au moment des faits, retrouvée morte en 2019 dans une forêt dans l'Aisne. Et pour la justice, son propriétaire est indirectement responsable du drame.

Le parquet de Soissons a indiqué avoir pris des réquisitions pour demander que Christophe Ellul, le compagnon de la victime, soit jugé par un tribunal correctionnel pour "homicide involontaire". Un réquisitoire qui était loin d'être gagné, selon une source proche du dossier.

Le 16 novembre 2019, à 13h16, Elisa Pilarski appelle une première fois son compagnon, qui se trouve ce jour-là à l'aéroport de Roissy. La jeune femme est en train de promener Curtis, un American Pitbull Terrier, qui appartient à Christophe Ellul. Les investigations et expertises montrent quà ce moment-là le chien s'en prend à celle qui le promène en forêt de Retz. Elisa Pilarski est alors mordue à la jambe et au bras.

Christophe Ellul quitte son travail, parcourt la distance entre son emploi et la forêt. Il retrouve son chien, puis le corps de sa compagne enceinte. Au final, il mettra plus d'1h30 à donner l'alerte. Lors de ses premières auditions, l'homme de 45 ans, à l'époque, assure avoir vu des chiens de chasse, participant à une chasse à courre. Mais les expertises sont formelles: Curtis est le seul animal à avoir attaqué Elisa Pilarski, s'acharnant sur la victime jusqu'à causer sa mort. Ce jour-là, il ne portait pas de muselière.

Le 4 mars 2021, Christophe Ellul est mis en examen pour "homicide involontaire". La jurisprudence considère en effet que la faute incombe au propriétaire de l'animal, même si celui-ci est absent. Le juge d'instruction qui a repris le dossier estime alors qu'il existe suffisament d'éléments à charge pour démontrer que par "maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le réglement", il a involontairement causé la mort de sa compagne. À celà s'ajoute une faute caractérisée.

Autant d'éléments repris par le parquet de Soissons, et que BFMTV a pu consulter. En l'état, la faute caractérisée attribuée à Christophe Ellul est celle d'avoir, en conscience, fait courir un risque à sa compagne. Le ministère public en veut, notamment pour preuve, le message adressé par le mis en cause à sa compagne à son arrivée sur les lieux, "je vais le faire piquer". Aux yeux de la justice, ce sms, comme d'autres éléments, atteste qu'il avait conscience de la dangerosité de son chien.

"Pleinement informé de l'intention d'Elisa Pilarski de promener Curtis, ce dernier n'a pourtant nullement tenté de la dissuader, ni formulé de mise en garde ou recommandation en dépit des risques (...)", écrit le parquet.

Autres circonstances aggravantes, Curtis, chien d'attaque dit de catégorie 1, a été introduit illégalement en France, en provenance des Pays-Bas, sans autorisation. L'animal avait l'objet d'un dressage au mordant, une technique interdite sur le territoire national qui s'apparente à de la maltraitance animale. Le jour des faits, il est également acquis que Curtis ne portait pas de muselière. Des circonstances qui font passer la peine encourue de 5 à 10 ans de prison.

Désormais, les avocats de Christophe Ellul et de la famille d'Elisa Pilarski ont un mois pour réagir à ces réquisitions. Toutefois, le juge d'instruction pourrait attendre avant de prendre sa décision final. Deux recours formulés par les proches de la victime n'ont toujours pas été tranchés par la cour d'appel d'Amiens. L'un porte sur la compétence du juge d'instruction qui avait mis en examen Christophe Ellul.

La famille d'Elisa Pilarski estime que Christophe Ellul savait que la jeune femme avait été attaquée et dénonce le fait qu'il ait mis plus d'1h30 pour appeler les secours. D'autres éléments attesteraient qu'il a modifié les lieux à son arrivée, rajoutant notamment une muselière à côté de Curtis. Le deuxième recours visa ainsi à ce que Christophe Ellul soit mis en examen, et donc jugé, pour omission de porter secours et dissimulation.

Article original publié sur BFMTV.com