Zéro artificialisation nette des sols : que risque Laurent Wauquiez en annonçant se retirer du dispositif

 Laurent Wauquiez, photographié le 21 mai 2022 à Sarlat. (Photo par Jean-Pierre BOUCHARD/Gamma-Rapho via Getty Images)
Jean-Pierre BOUCHARD / Gamma-Rapho via Getty Images Laurent Wauquiez, photographié le 21 mai 2022 à Sarlat. (Photo par Jean-Pierre BOUCHARD/Gamma-Rapho via Getty Images)

POLITIQUE - « L’État de droit, ce sont les règles que nous choisissons d’appliquer ». Ainsi parlait Laurent Wauquiez en 2016, lorsque le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes accordait encore de l’importance aux principes qui régissent le fonctionnement de notre démocratie. En annonçant ce samedi 30 septembre qu’il sortait sa région du dispositif « zéro artificialisation nette » (ZAN), pourtant voté dans la loi climat résilience adoptée en 2021, le candidat putatif à l’élection présidentielle de 2027, prend le contre-pied de sa propre définition, puisqu’il décide de déroger aux règles adoptées par la représentation nationale.

Une représentation nationale composée, rappelons-le, de 925 parlementaires issus de tout le territoire, comptant par ailleurs un Sénat où sa famille politique est majoritaire.

« C’est une loi »

Pour rappel, la loi Climat et résilience confie aux régions la tâche de se fixer un objectif de réduction de la bétonisation des terres à travers leur document de planification (Sraddet), pour atteindre le « zéro artificialisation nette » en 2050. Dans un premier temps, l’objectif est de réduire de 50 % l’artificialisation des sols d’ici 2031.

C’est donc de ce dispositif que Laurent Wauquiez veut extraire la région Auvergne-Rhône-Alpes. « À croire que, selon lui, la loi s’applique de manière sélective », a dénoncé le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu. « Le zéro artificialisation nette, ce n’est pas une lubie (...) c’est une loi », a renchéri auprès de l’AFP Sarah El Haïry, Secrétaire d’État chargée de la biodiversité.

« Vous ne pouvez pas être un élu de la République et vous soustraire aux lois votées par le Parlement, ça n’existe pas », a réagi la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet. Porte-parole du gouvernement, Olivier Véran a estimé que Laurent Wauquiez s’exposait à des « sanctions » en cas de non-respect de la loi.

Mais que risque-t-il réellement ? Disons-le tout de suite, Laurent Wauquiez ne risque pas grand-chose. Voire rien du tout. Puisque les sanctions prévues en cas de non-respect du calendrier ZAN concernent surtout les communes, qui pourraient subir un gel des autorisations d’urbanisme pour le PLU et la carte communale, voire une suspension de l’ouverture de zones à urbaniser.

« Ça n’a absolument aucun sens »

Auprès du HuffPost, un avocat spécialiste des questions d’urbanisme est particulièrement perplexe sur la pertinence de l’annonce faite Laurent Wauquiez. « Décider unilatéralement de sortir du dispositif ZAN, ça n’a absolument aucun sens sur le plan juridique. Puisqu’une région n’a pas toute seule la main sur cet objectif, qui est partagé avec l’État et les communes », décrypte cet expert du droit de l’environnement préférant rester anonyme.

« En l’état actuel, il n’y a pas d’arsenal juridique qui permet à une région d’en sortir, et il n’y a pas non plus grand-chose pour sanctionner une région qui le ferait, puisque ça n’existe pas. On est dans un débat qui dépasse le juridique », insiste notre interlocuteur, qui voit dans la déclaration faite par Laurent Wauquiez « une annonce davantage politique de la part d’une personnalité souhaitant se placer pour 2027 » qu’une « décision qui a vocation à se concrétiser ».

Pour rappel, après l’adoption du texte climat résilience, une deuxième loi visant « à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux » a été promulguée cet été. D’initiative sénatoriale, donc assez éloignée de « l’incarnation d’une technocratie administrative » dénoncée par Laurent Wauquiez, celle-ci était portée par le sénateur du Vaucluse Jean-Baptiste Blanc. Un élu LR de la même famille politique que le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes.

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