Violences conjugales: Adrien Quatennens a-t-il toujours un avenir politique?

Après son retrait des fonctions de coordinateur de la France insoumise, le député, que certains imaginaient prendre la relève de Jean-Luc Mélenchon, est dans la tourmente. Plusieurs députés le voient continuer sa carrière politique.

Une pause dans une carrière en pleine ascension ou une chute définitive? La question est ouverte pour Adrien Quatennens qui s'est retiré dimanche de la coordination de la France insoumise après avoir reconnu des violences conjugales sur son épouse.

"On a un grand sentiment de gâchis. C'est l'un des plus brillants de sa génération, de notre groupe à l'Assemblée, en plus d'être un très bon camarade. On ne réalise pas vraiment", résume, affecté, un élu insoumis auprès de BFMTV.com.

Un avenir prometteur jusqu'ici

Le député du Nord est dans la tempête depuis mardi dernier et la révélation par Le Canard enchaîné d'une main courante déposée par son épouse, en pleine procédure de divorce. Dans la foulée, le couple se fend d'un communiqué, appelant au respect de leur vie privée pour "retrouver le chemin de l'apaisement". De quoi laisser espérer pour cet intime de Jean-Luc Mélenchon que l'affaire fasse peu de bruit.

Mais dimanche dernier, le parlementaire poste un texte sur Twitter dans lequel il reconnaît lui avoir "saisi le poignet" "dans un contexte de rupture de communication" avec sa femme, avant d'évoquer d'autres faits.

"Dans un contexte d'extrême tension et d'agressivité mutuelle", précise encore Adrien Quatennens, il affirme avoir donné une gifle à sa femme, décidant d'en "tirer les conséquences politiques" en annonçant son retrait de son poste à la France insoumise.

Son retrait du parti, "une évidence"

De quoi stopper net une ascension politique fulgurante pour celui que beaucoup voyait en mesure de succéder au patron de la France insoumise à la tête du mouvement, puis se lancer dans la course à l'Élysée.

"Le fait qu'il se mette en retrait a été une évidence pour nous, comme pour lui. Dès que nous avons connu la situation, nous en avons fait une action politique", assure le député Hadrien Clouet.

Le parti n'avait pas vraiment le choix. Très engagé dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, il était contraint d'agir rapidement.

Plusieurs affaires de violences sexuelles ont concerné ses représentants, de Taha Bouhafs, candidat aux législatives dans le Rhône, qui a dû abandonner, après des accusations d'agression sexuelle à Éric Coquerel, le président de la Commission des finances, mis en cause par l'ancienne Gilet jaune Sophie Tissier pour un comportement "outrancier, harcelant". Si Taha Bouhafs n'est pas visé par la justice pour ces faits, le parquet de Paris a ouvert une enquête pour harcèlement et agression sexuels à l'encontre d'Éric Coquerel.

Des membres de la Nupes demandent son retrait à l'Assemblée

La question se pose désormais de celle de l'éventuel retrait d'Adrien Quatennens du groupe de la France insoumise à l'Assemblée nationale, comme le demandent plusieurs députés écologistes, comme Sandrine Rousseau ou Aurélien Taché, membres de la Nupes.

Au sein même des insoumis, des voix s'élèvent pour aller plus loin et décider collectivement des suites à donner. "Ce sont ses mots, pas les miens", a déclaré la députée Clémentine Autain dans Le Parisien, après les propos de soutien de Jean-Luc Mélenchon à Adrien Quatennens.

"Je demande à ce que tout cas de violence ou d'agissements sexistes impliquant des députés LFI donnent lieu à une discussion au sein du groupe politique LFI, afin que l'ensemble des députés décide collectivement des suites politiques adéquates", a également avancé la députée Pascale Martin sur son compte Twitter.

"La jurisprudence Abad et Darmanin"

Mathilde Panot, la présidente du groupe LFI prend la parole ce mardi matin lors d'une conférence de presse et pourrait annoncer le retrait temporaire de son collègue. C'est qu'il faut tenir la Nupes alors que certains députés écologistes veulent s'appuyer sur "la jurisprudence Abad et Darmanin".

La France insoumise, tout comme Europe Écologie-Les Verts avaient en effet jugé que ni le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, ni le ministre des Affaires sociales, Damien Abad, ne pouvaient rester à leur poste en étant visé par des accusations de viols. (Gérald Darmanin a bénéficié d'un non-lieu par réquisitoire en 2022. La plainte déposée contre lui pour "abus de faiblesse" a été, elle, classée sans suite. Damien Abad, qui a quitté le gouvernement en juillet dernier, est accusé de viols par 4 femmes et visé par une enquête pour "tentative de viol"NDLR).

"Ça n'a rien à voir. On parle de personnalités accusées de viols. Il faut atterrir à un moment, on ne peut pas tout mélanger", défend un élu, proche d'Adrien Quatennens.

"Faire un travail sur lui" pour pouvoir revenir

Sur les bancs de la France insoumise, on attend désormais que la justice avance. Il semble peu probable que la procédure ouverte par le parquet de Lille n'aboutisse, alors que la femme d'Adrien Quatennens a fait savoir auprès de BFMTV qu'elle ne comptait pas donner de suite judiciaire à l'affaire.

"La question de son retour politique, avec la possibilité de s'exprimer largement aura lieu quand sa femme retrouvera une sécurité morale et qu'Adrien se sentira utile pour faire avancer la cause et qu'il aura fait un travail sur lui pour que cela ne se reproduise pas", analyse encore un député insoumis.

La présidente du groupe LFI à l'Assemblée nationale a déjà ouvert la porte à cette option, assurant sur RTL dimanche ne "pas penser qu'un homme, même s'il a commis à un moment un acte de violence, est un homme qui est violent à vie, que ce serait naturel". De quoi laisser augurer une suite pour l'avenir politique d'Adrien Quatennens.

Article original publié sur BFMTV.com

VIDÉO - Visé par une main courante, Adrien Quatennens quitte sa fonction de coordinateur de La France insoumise