"Vice-Versa 2": le pari de Pixar pour renouer avec le succès

Très attendue, la suite de Vice-Versa, plongée dans l'inconscient de la jeune Riley, désormais adolescente, sort ce mercredi 19 juin neuf ans après le carton mondial du premier volet. Déjà en salles aux Etats-Unis et dans d'autres pays depuis vendredi dernier, le film bat tous les records au box-office mondial.

Le film d'animation, qui marque le retour de Joie, Tristesse, Colère, Peur et Dégoût, a réalisé le meilleur démarrage de l'histoire pour un film d'animation, avec 295 millions de dollars de recettes au box-office mondial. Aux Etats-Unis, il s'agit aussi du meilleur démarrage pour un film depuis Barbie en juillet 2023.

Pour mener à bien ce projet, il a fallu au réalisateur Kelsey Mann et au producteur Mark Nielsen quatre ans de travail et 10 versions différentes du scénario. Ils se sont appuyés notamment sur les compétences de 150 animateurs, soit la plus grosse équipe d'animation jamais réunie par Pixar en 28 films.

Situé plusieurs années après le premier film, Vice-Versa suit les premiers pas de Riley dans l'adolescence. Un chamboulement majeur se produit au sein du quartier général: l’arrivée de nouvelles émotions. Joie, Tristesse, Colère, Peur et Dégoût ne savent pas comment réagir lorsqu'Anxiété débarque, accompagnée d'Ennui, Embarras et Jalousie.

Kelsey Mann a souhaité pour ce nouveau film "de nouvelles émotions plus sophistiquées": "Pete Docter m'a dit que le monde de Vice-Versa avait le potentiel pour accueillir une autre histoire. Il m'a tout de suite dit qu'il n'avait pas d'idées mais que j'étais la bonne personne pour trouver ces idées."

"La chose la plus cool quand on travaille avec Pete est qu'il nous laisse être nous-même", s'enthousiasme le réalisateur, rencontré au Festival d'animation d'Annecy. "Pete aurait pu m'imposer une histoire. Ce n'est pas du tout ce qui s'est passé. Il m'a donné carte blanche."

L'anxiété s'est imposée naturellement comme héroïne de cette nouvelle aventure. "C'est un sujet qui me touche personnellement", glisse Kelsey Mann. "Je sais ce que c'est de vivre avec de l'anxiété. Je sais aussi que beaucoup de personnes peuvent s'y identifier. Surtout les adolescents."

Comme pour Vice-Versa, Pixar a fait appel à des experts en psychologie. "Ils nous ont permis de comprendre les émotions qui arrivent à cet âge. On voulait des émotions liées à la conscience de soi car c'est une période de la vie où on prête beaucoup d'attention à la manière dont les autres parlent de nous", analyse le producteur Mark Nielsen.

Pour déstabiliser Joie, Kelsey Mann a imaginé Ennui, "l'émotion la plus cool", blasée de tout, vautrée sur un divan et jouée dans la version française, mais aussi dans la version originale par Adèle Exarchopoulos. "On voulait un personnage plus sophistiqué que Joie. On voulait qu'elle soit intimidée par Ennui et que ce personnage ait un accent français, un vrai."

Mais c'est Anxiété, personnage survolté et orange, qui lui vole la vedette. "Pour l'imaginer, on s'est inspiré d'une forme aussi simple que celle d'un éclair puis on a construit le personnage à partir de ça", précise Kelsey Mann.

Vice-Versa 2 sort dans un contexte compliqué pour le studio. Le 21 mai, la filiale de Disney a commencé à licencier 14% de ses salariés. Environ 175 personnes sont concernées, soit moins que ce qui avait été initialement anticipé lorsque le groupe américain avait expliqué, en début d'année, vouloir réduire les coûts de Pixar.

Longtemps intouchable dans la galaxie Disney, Pixar s'est retrouvé en difficulté après l'échec de Buzz l'Eclair en 2022. Après avoir multiplié la production de contenus pour la plateforme de streaming Disney+ (Cars: Sur la route, Bienvenue chez Doug), le studio va se concentrer sur la production de longs métrages d'animation.

"Je travaille chez Pixar depuis 33 ans et je crois que nous n'avons jamais connu une période d'agitation et d'incertitude comme celle que nous vivons actuellement, ce qui est plutôt excitant", a tenté de rassurer Pete Docter, directeur artistique du studio, dans les colonnes d'Entertainment Weekly. "Je sais que c'est étrange de dire cela."

Selon les informations de Cartoon Brew, site spécialisé dans le cinéma d'animation, la situation est plus inquiétante qu'il n'y paraît. De nombreux vétérans de Pixar, souvent en poste depuis plus de 15 ans, ont été remerciés. La mémoire du studio disparaît: "C'est une énorme perte de savoirs pour le studio", a estimé la revue.

Comme l'a rappelé également sur X (ex-Twitter) le réalisateur Frank Abney, animateur sur Toy Story, Coco et Soul dans les années 2010, "Pixar était un endroit génial où travailler quand j'y étais. C'était l'un des rares endroits à vraiment investir dans les gens et à les garder longtemps." Cette époque est désormais révolue, déplore-t-il.

Mais après le succès de Vice-Versa 2, le studio espère poursuivre ce retour en grâce en 2025 avec Elio, sur un petit garçon en mal d'intégration dans son école qui se retrouve ambassadeur de la Terre auprès de civilisations extraterrestres. Sans oublier en 2026 un cinquième volet de Toy Story, déjà prêt à battre de nouveaux records.

Article original publié sur BFMTV.com