Des triangulaires ou un désistement ? La consigne d’Attal est diversement interprétée en Macronie

Gabriel Attal le 30 juin 2024 à Matignon.
LUDOVIC MARIN / AFP Gabriel Attal le 30 juin 2024 à Matignon.

POLITIQUE - Consigne sujette à interprétation. En dépit de la volonté de clarté affichée par le Premier ministre dimanche dans la cour de Matignon, la ligne donnée dans les triangulaires Ensemble/NFP/RN n’est pas si limpide pour tous les candidats. En témoignent ce lundi 1er juillet les multiples configurations qui émergent moins de 24 heures plus tard.

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Selon Gabriel Attal, la lutte contre le RN « passera par le désistement de nos candidats dont le maintien en troisième position aurait fait élire un député Rassemblement national face à un autre candidat qui défend comme nous les valeurs de la République ». Le chef du gouvernement en sursis mise sur un report de voix en direction du seul adversaire en lice face au RN.

Certains ont entendu le message plus ou moins rapidement et se sont désistés : les ministres-candidates Sabrina Agresti-Roubache, Marie Guévenoux et Fadila Khattabi sont dans ce cas. Albane Branlant candidate dans la Somme face à François Ruffin ou le député sortant dans la Loire Quentin Bataillon ont pris la même décision. « Un choix lourd et difficile », a salué Gabriel Attal lors d’une réunion avec les candidats. Mais volontairement ou non, sa consigne est suffisamment floue pour laisse libre cours aux interprétations qui peuvent encore évoluer d’ici mardi 18h et la clôture des candidatures pour le second tour.

Le dilemme de la candidature face à LFI

Depuis Matignon, Gabriel Attal a appelé au retrait en faveur d’un candidat « qui défend comme nous les valeurs de la République ». Sans plus de précision. Y inclut-il les candidats LFI, dont le républicanisme est régulièrement contesté dans son camp ? Non, affirment les ministres Aurore Bergé et Bruno Le Maire qui redisent leur opposition à un désistement en faveur d’un candidat investi par les insoumis. Ils sont sur la même ligne que l’ex-patron du groupe Renaissance Sylvain Maillard ou que les alliés Édouard Philippe voire François Bayrou qui veut des décisions au cas par cas.

Conséquence directe sur le terrain : dans le Val-de-Marne, le porte-parole de Renaissance Loïc Signor, troisième, annonce se maintenir avec le soutien du parti « pour ne pas laisser les électeurs orphelins d’un représentant des valeurs républicains ». En face, le candidat soutenu par Marine Le Pen arrivé deuxième et l’insoumis Louis Boyard, largement en tête. Le même argument est brandi dans la 2e circonscription de la Somme, où Hubert de Jenlis refuse de se désister face à l’Insoumise Zahia Hamdane, arrivée en tête mais talonné par le candidat du RN. « Si un candidat social-démocrate était mieux placé que nous pour battre le RN, nous nous serions désistés », assure-t-il dans un communiqué. Dans l’Aveyron (2e), Samuel Deguara fait de même face à un candidat insoumis arrivé deuxième et une candidate RN arrivée en tête. Idem dans les Alpes-Maritimes, où Graig Monetti, adjoint du maire Horizons de Nice, estime être « le plus à même de rassembler » face à Éric Ciotti, député sortant en tête au premier tour. Il est pourtant 4 points derrière le candidat LFI Olivier Salerno et alors que Ciotti les devance largement.

Et quand ce n’est pas un candidat insoumis c’est parce que le candidat de gauche a fait alliance avec LFI. Voilà par exemple ce qu’invoque la ministre Dominique Faure, dans la 10e circonscription de Haute-Garonne. Elle est arrivée en 3e position (29 %) derrière la candidate RN Caroline Falgas-Colomina (30,4 %) et le socialiste Jacques Oberti, nettement en tête (36,2 %). « J’ai 22 800 électeurs qui ont voté pour et je vois mal comment je leur donnerais comme seul choix de voter RN ou LFI », a argumenté la ministre, estimant que le socialiste « est lié par une alliance avec LFI ». L’alliance PS-LFI est aussi évoquée par Dominique Da Silva, député sortant du Val-d’Oise (7e) pour ne pas quitter la course.

« Seuls à pouvoir » et réserves de voix

Parfois, c’est au nom de la statistique que certains refusent de s’éclipser. Quitte à se maintenir face à des candidats socialistes, écologistes. Car en ne précisant pas si les désistements devaient être systématiques, quel que soit l’ordre d’arrivée, Gabriel Attal laisse à chacun le soin d’estimer si leur maintien risque de favoriser l’élection d’un candidat RN.

Autre cas en Charente-Maritime où la sortante Anne-Laure Babault (MoDem) refuse elle aussi de se retirer, en dépit de sa troisième place et de l’avance de près de 10 points de la candidate RN Karen Bertholom. L’élue MoDem appelle l’écologiste Benoît à « se retirer en responsabilité », estimant qu’elle « est la seule à pouvoir faire face au RN car la seule à avoir des réserves de voix ». Alors même que Benoît Biteau est arrivé deuxième.

Anne-Laurence Petel, députée sortante, se maintient dans les Bouches-du-Rhône où le RN est arrivé en tête et face à un candidat socialiste arrivé deuxième. « Je suis la seule à pouvoir rassembler les voix démocratiques et républicaines » qui « ne voteront jamais pour Jean-David Ciot », a plaidé l’élue.

Il faudra attendre mardi 18h pour connaître les scénarios exacts dans chaque circonscription. Si des candidats se sont maintenus en dépit des directives des états-majors, d’autres ont fait le choix de se retirer, comme le candidat Horizons dans la 4e de Seine-Maritime pour laisser le champ libre à l’insoumise Alma Dufour. Selon un décompte AFP, au moins une centaine de désistements ont été enregistrés ce lundi en fin d’après-midi.

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