Tierno Monénembo – « Réinventons-nous ! »

Comme l'a dit Frantz Fanon, « il ne s’agit pas de rejoindre le peuple dans ce passé où il ne se trouve plus ».   - Credit:DR
Comme l'a dit Frantz Fanon, « il ne s’agit pas de rejoindre le peuple dans ce passé où il ne se trouve plus ». - Credit:DR

« Nous les Maliens, nous passons notre temps à pleurer Soundiata », me disait, avec la douce ironie qui fut la sienne, l'écrivain Moussa Konaté. Je tentai jusqu'à sa mort de faire comprendre à mon ami que cela n'était pas le propre des Maliens, des Congolais ou des Éthiopiens. Ce sont les Africains dans leur ensemble qui idéalisent le passé et s'accrochent désespérément aux basques ou plutôt aux boubous de leurs ancêtres. Il faut dire que le présent est triste et les portes de l'avenir, lourdes à pousser. Mais le doux cocon d'hier protège-t-il des griffes d'aujourd'hui et des épines de demain ?

Rien n'est moins sûr. S'il est bon de revenir parfois aux temps anciens, d'en faire un tremplin pour mieux rebondir, il est dangereux d'y demeurer. C'est sans doute pour avoir constaté cette vilaine propension dans des pays pourtant réputés alors progressistes, comme l'Algérie, le Ghana et la Guinée (trois pays africains qu'il connaissait bien), que Frantz Fanon a écrit cette phrase qui devrait être inscrite au fronton de tous nos lycées : « Il ne s'agit pas de rejoindre le peuple dans ce passé où il ne se trouve plus. »

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La mémoire du passé n'exclut pas le présent

En attendant, le mal est fait : le culte de l'ancêtre a pris le pas sur ce que Romain Gary appelait « les promesses de l'aube ». Cela a abouti aux deux maux dont nous souffrons le plus aujourd'hui : le salafisme au nord, le tribalisme au sud du Sa [...] Lire la suite