Terrorisme: la "filière tchétchène" dans le radar des services de renseignement

Terrorisme: la "filière tchétchène" dans le radar des services de renseignement

Le 12 mai 2018, Khamzat Azimov, 20 ans, tue un homme et blesse plusieurs passants avec un couteau de cuisine, en plein cœur du quartier de l'Opéra à Paris. Le 16 octobre 2020, Abdoullakh Anzorov, 18 ans, assassine Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie dans un collège de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines). Le 13 octobre dernier, Dominique Bernard, lui aussi enseignant, meurt après avoir été attaqué par Mohammed Mogouchkov, 20 ans, dans le lycée Gambetta d'Arras (Pas-de-Calais).

Le point commun entre ces trois assaillants? Ils sont tous originaires du nord du Caucase, notamment de Tchétchénie, d'Ingouchie ou d'autres républiques autonomes en Russie. Une "filière tchétchène" qui inquiète les services de renseignements. Selon les informations de BFMTV, une soixantaine d'individus, originaires du nord du Caucase, font actuellement l'objet d'un suivi très actif par les autorités françaises.

Une attention particulière demandée aux préfets

D'autant qu'entre 2018 et 2020, sept dossiers de terrorisme mettaient en cause des individus originaires du nord-Caucase, selon une note de la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI) que BFMTV a pu consulter.

Et d'autres ont pris part à des projets d'attentats déjoués, comme à deux reprises en 2019 contre la communauté homosexuelle et la même année contre l'Élysée - un dossier pour lequel le frère de l'assaillant d'Arras a notamment été condamné.

Tout récemment, en septembre 2023, trois mineurs, dont deux Tchétchènes de 16 ans, soupçonnés de préparer une attaque contre une représentation israélienne en Belgique, ont été interpellés.

Après l'attaque d'Arras, le gouvernement avait affiché sa volonté d'expulser le plus rapidement possible les individus fichés S faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Et la consigne avait été passée aux préfets de porter une attention accrue aux "ressortissants du Caucase sur la tranche 16-25 ans".

"Un traumatisme générationnel"

La plupart de ces jeunes individus ont grandi et étudié en France et parlent français, après avoir fui les conflits de leur région avec leurs parents, au début des années 2000. S'ils sont mieux intégrés socialement que leurs aînés, ils ont développé un discours anti-français, s'inquiète la DGSI dans sa note.

"Ils ont été bercés par les récits des conflits en Tchétchénie, des conflits à forte dimension religieuse", avait expliqué Jean-Charles Brisard à BFMTV.com, mi-octobre.

"Ce sont les enfants de personnes qui ont vécu une guerre atroce et qui traînent un bagage lourd. Il y a aussi une dimension psychologique qui joue dans les parcours de ces jeunes, avec un traumatisme générationnel qui s’opère sans qu’on ne leur donne les moyens de sortir de cet endoctrinement", avait commenté auprès de BFMTV.com Sarah Perret, maître de conférence spécialisée dans l'anti-terrorisme à l'Institut catholique de Lille et chercheuse associée à l'ENS Paris.

Une radicalisation via les réseaux sociaux

C'est à partir de 2013 que la propagande de Daesh a commencé à cibler les populations russophones. À cette époque, de nombreux jeunes d'origine nord-caucasienne se sont radicalisés sur Internet. Depuis, 70 ressortissants du Caucase ont quitté le territoire français pour rejoindre les rangs de l'organisation terroriste en Irak.

Chamil Albakov, consul honoraire de la République techétchène d'Itchkérie en France, pointe lui aussi la propagation des discours extrémistes sur les réseaux sociaux.

"Certains de nos jeunes se retrouvent sous l'influence de ces extrémistes qui propagent des idées anti-France et anti-démocratique sur les réseaux sociaux", estime le consul honoraire sur BFMTV.

Aujourd'hui, environ 40.000 Nord-Caucasiens vivent sur le territoire français.

Article original publié sur BFMTV.com