XV de France: comment rebondir après la tuile Ntamack ?

XV de France: comment rebondir après la tuile Ntamack ?

Timing cruel pour Romain Ntamack et le XV de France. À moins d’un mois du coup d’envoi de la Coupe du monde (8 septembre-28 octobre), le Toulousain de 24 ans doit faire une croix sur la compétition. Le staff tricolore, qui s’était pourtant montré rassurant sur l’état de santé du Français après le match face à l’Écosse, va devoir faire sans son ouvreur numéro 1. Romain Ntamack s’était imposé à ce poste depuis trois ans, et avait notamment participé au Grand Chelem des Français, en 2022.

Un poste exigeant, au cœur du jeu

"Il incarnait le renouveau du XV de France de ces dernières années. Romain était l’une des pièces maîtresses de cette équipe. C’est une grosse perte", déplore David Skrela, ancien demi d’ouverture des Bleus (23 sélections entre 2001 et 2011). Pour lui, Ntamack n’est pas vraiment remplaçable au poste de numéro 10, une position qu’il connaît bien: "C’est un rôle qui demande beaucoup de qualités dans le jeu, évidemment, mais aussi de l’expérience. Pour être le chef d’orchestre de l’équipe, il faut connaître sur le bout des doigts ses coéquipiers pour les faire jouer le mieux possible. Il y a des liens qu’on ne crée pas à l’entraînement, et qui ne se développent qu’en jouant en match. Les potentiels remplaçants de Romain sont très bons, mais ils ont beaucoup moins joué avec les Bleus."

L’ancien joueur de Colomiers, du Stade français et du Stade Toulousain évoque également la connexion en charnière entre Romain Ntamack et le demi de mêlée Antoine Dupont: "Ils avaient construit un lien en jouant ensemble en sélection mais surtout en club toute la saison, à Toulouse. La charnière, c’est la courroie de l’équipe. C’est un duo qui doit se comprendre pour fonctionner, il faut communiquer, prendre des décisions rapides. On perd tout ce qu’ils ont bâti ensemble ces dernières années."

Un constat partagé par Yann Delaigue (20 sélections entre 1994 et 2005), numéro 10 passé par le Stade Toulousain notamment : "Dans une équipe, tous les ballons passent par les deux joueurs de la charnière. Ce sont eux qui trient, qui orientent la tactique de l’équipe. Il y aura moins d’automatisme avec le remplaçant de Romain, c’est sûr."

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Trois joueurs pour une place

Pour celui qu’on surnommait le "Petit Mozart", ce besoin de complicité en charnière pourrait faire de Thomas Ramos un remplaçant intéressant. Lui aussi est toulousain, et a déjà dépanné au poste de numéro 10, même s’il joue plus souvent en tant qu’arrière. "Il s’en sort très bien dans cette position. Il ne subit la pression qu’on peut ressentir à ce poste. Ramos–Dupont, on sait déjà que ça fonctionne. C’est donc une bonne option. Avoir deux Toulousains en charnière, c’est un plus", résume Yann Delaigue.

En plus de Thomas Ramos, le sélectionneur Fabien Galthié peut compter sur Matthieu Jalibert et Antoine Hastoy pour occuper le poste de demi d’ouverture. Depuis plusieurs années, le joueur de l’UBB est la doublure de Romain Ntamack dans la hiérarchie. C’est donc l’option la plus naturelle pour remplacer la star toulousaine. Une option qui demanderait quelques changements tactiques, d’après Yann Delaigue. "Matthieu a un profil totalement différent, beaucoup plus offensif. La France devrait changer son style de jeu avec lui. On ne peut pas lui demander de faire du Ntamack. Si Jalibert joue, il faut qu’il joue comme il sait jouer."

Les chances de sacre compromises ?

Le forfait de Romain Ntamack aura évidemment un impact sur le jeu du XV de France. Cette blessure peut également parasiter l’esprit des joueurs d’après Christophe "Titou" Lamaison, deuxième meilleur marqueur de l’histoire des Bleus (380 points en 37 sélections, entre 1996 et 2001): "Le groupe perd un joueur très important. Il va falloir être fort mentalement. Surtout, il ne faut pas qu’une peur de la blessure s’installe dans la tête des joueurs. C’est ma crainte. Le groupe doit se relever et ne pas trop y penser ."

Malgré tout, Christophe Lamaison tient à rester positif. L’ancien demi d’ouverture fait confiance aux potentiels remplaçants de Ntamack et voit les Français aller loin dans la compétition : "On va le faire. Une des réussites de Fabien Galthié, c’est d’avoir triplé voir quadruplé tous les postes de l’équipe. Il peut composer trois équipes quasiment du même niveau. Le staff a des solutions. Finalement, c’est pour Romain que c’est le plus dur. Je partage sa peine, je lui souhaite un prompt rétablissement."

Globalement, "Titou" Lamaison estime que ce genre de blessure fait partie du rugby et que d’autres équipes y feront face. L’ex-numéro 10 a lui-même vécu un épisode similaire à celui d’aujourd’hui, il y a 24 ans : "En 1999, on perd 9 joueurs juste avant la Coupe du monde. Thomas Castaignède, le numéro 10 titulaire de l’équipe se blesse juste avant la Coupe du monde. C’est moi qui l’ai remplacé."

Sur ce tournoi, le XV de France va finalement réaliser l’un des plus grands exploits de son histoire en battant les All Blacks en demi-finale à Twickenham (43-31), avant de s’incliner face à l’Australie en finale (35-12). Face à la Nouvelle-Zélande, Christophe Lamaison a inscrit un essai, deux drops, trois pénalités, et quatre transformations. De quoi redonner un peu d’espoir aux supporters du XV de France.

Article original publié sur RMC Sport