Cette statue de Napoléon nu qui faisait honte à l'empereur

Napoléon en Mars désarmé et pacificateur, d'Antonio Canova (1806). | Jörg Bittner Unna via Wikimedia Commons
Napoléon en Mars désarmé et pacificateur, d'Antonio Canova (1806). | Jörg Bittner Unna via Wikimedia Commons

Non, Napoléon Bonaparte n'était pas aussi petit que les Anglais ont voulu le faire croire au monde. Ils en savent pourtant quelque chose: voilà deux siècles qu'à Londres, la colossale silhouette de l'empereur représenté en dieu pacificateur, nu comme un ver à l'exception d'une feuille de vigne, tenant au creux de sa main un orbe surmonté d'une Victoire ailée, accueille les visiteurs chez le duc de Wellington.

Le chef-d'œuvre signé Antonio Canova mesure 3,45 mètres de hauteur. Comment a-t-il atterri là? L'histoire débute en 1802, quand la France et la Grande-Bretagne signent le traité d'Amiens. L'Europe est en paix, pour la première fois en une décennie. Napoléon souhaite tirer parti de l'occasion pour s'auréoler du prestige de son rôle d'unificateur. Les réseaux sociaux n'existant pas encore, l'opération de communication doit être confiée à des artistes.

Certes, Jacques-Louis David avait parfaitement répondu au brief en peignant en 1800 son célèbre Bonaparte, Premier consul, franchissant le Grand Saint-Bernard. Plusieurs versions avaient été réalisées en guise de dossier de presse, dont une dans le New Jersey –pas dans le salon de Tony Soprano, non, mais chez Joseph Bonaparte, frère de l'empereur. Mais cette fois, Napoléon veut frapper plus fort en confiant la tâche à Antonio Canova, réputé pour être le meilleur sculpteur de l'époque.

Canova piano va sano

L'ironie se glisse décidément partout dans cette histoire: le sculpteur vénitien vient alors d'être nommé inspecteur des beaux-arts à Rome et dans les États pontificaux par le pape Pie VII. Canova a quasiment carte blanche et la permission d'opposer un veto à l'exportation d'œuvres. On imagine qu'il ne nourrit pas que de l'admiration pour Napoléon: en 1796, c'est en effet le jeune général Bonaparte qui avait été chargé par le Directoire d'aller faire son marché dans les musées et collections privées en Italie.

La…

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