Lancer de nains, Carragher en Quasimodo, Rooney déchaîné... Les pires "Christmas parties" de l'histoire en Premier League

Tottenham (1960) : Nuage de noix et boîte de saucisses

La première "Christmas Party" qui a mal tourné au pays de Sa Majesté. À une époque où la dépravation et les frasques ne rythmaient pas les réveillons de Noël, Tottenham va rompre de manière brutale avec sa traditionnelle convivialité. Lors d’un repas organisé par les Spurs, l’ambiance se dégrade après quelques verres de trop. Au milieu des cibles choisies : le manager et les jeunes du club. "Cecil Poynton, notre entraîneur, a été accueilli par un nuage de noix, des boîtes de saucisses, le forçant à battre retraite, les mains sur la tête, dos à l'assemblée", se souviendra la légende Jimmy Greaves. "C'était de la nourriture gratuite pour tout le monde. Puis c'est vrai, les joueurs de l'équipe réserve, prêts à tout pour avoir une bonne conduite, étaient comme des cibles faciles." Un baptême du feu à n’en pas douter inoubliable pour eux.

Chelsea (1991) : Vinnie Jones et le lancer de nains

Sur les pelouses du Royaume, Vinnie Jones s’est construit une sulfureuse réputation à coups de tacles par derrière, de "fuck off" assénés à l’encontre du corps arbitral et de menaces sans ambivalence à l’égard de ses adversaires. Ancien chef de troupe du célèbre "Crazy Gang" de Wimbledon, le Gallois débarque avec sa grande gueule à Chelsea en 1991. Et ses manières pour le moins iconoclastes, aussi. Pour marquer de son empreinte la formation londonienne, le milieu de terrain s’autoproclame organisateur en chef de la Christmas Party. Organisée dans un pub de l’ouest à Londres, la soirée s’achève avec un improbable concours de lancer de nains. L’objectif étant alors de scotcher le plus longtemps possible les nains sur des cibles géantes dans un château gonflable recouvert de colle gluante. Un tournoi de fléchettes à taille humaine, en somme. Surréaliste.

"Vinnie était complètement saoul, et odieux avec eux. Moi, j'ai sympathisé", révélait il y a quelques années Tony Cascarino passé par les Blues de 1992 à 1994. "Mais lorsque je leur ai demandé ce qu'ils faisaient dans la vraie vie, l'un d'eux m'a répondu : 'Ferme ta gueule, tu ne vas pas commencer avec ta pitié à la con, c'est à cause de connards comme toi qu'on ne trouve pas de boulot'. Ils étaient plus lourds que je ne le pensais. J'ai réussi une fois à bien les lancer, mais je ne me souviens pas comment. D'ailleurs, je sais ce que vous vous dites, comment peut-on faire une chose pareille?" La question reste encore aujourd’hui en suspens.

Newcastle (1998) : Un "Secret Santa" au goût amer

Depuis presque toujours, "Secret Santa" a pour vocation d’arracher des sourires à Noël. Une tradition typiquement anglo-saxonne lors de laquelle les membres d’un groupe s’offrent mutuellement des cadeaux après un tirage au sort anonyme. En décembre 1998, les Magpies décident de se prêter au jeu pour animer les fêtes de fin d’année. Et les joueurs anglais entendent marquer le coup avec des présents uniques pour chaque étranger.

Ainsi le défenseur italien Alessandro Pistone reçoit un véritable cœur de mouton sanguinolent en raison de son manque d’engagement sur les prés, le milieu géorgien Temuri Kestabia se voit attribuer une brosse à cheveux pour sa calvitie tandis que l'Écossais Duncan Ferguson récolte l'uniforme complet du détenu, bariolé noir et blanc, en référence à son séjour carcéral en 1995. Enfin, clou du spectacle de cette scène ahurissante, le milieu allemand Dietmar Hamann déballe son cadeau pour découvrir une réédition de Mein Kampf, ouvrage écrit par Adolf Hitler. Des plaisanteries malvenues au sein d’un groupe à la cohésion déjà ébranlée. Cette saison-là, le Newcastle de Ruud Gullit finira à une pâle 13e place en Premier League.

Liverpool (1998) : Carragher, le Quasimodo de ses dames

En 1988, Steve McMahon croyait certainement avoir offert la "part" la plus mémorable dans l’histoire de Liverpool avec une soirée déguisée peu commune. En voyant débarquer l’un de ses coéquipiers vêtu d’un costume du Ku Klux Klan – organisation prônant la suprématie de la race blanche aux États-Unis –, le milieu anglais s’insurge: "Mais tu ne peux pas entrer comme ça. John Barnes est black, merde! Et il est à l'intérieur." Avant de s’apercevoir, estomaqué, qu’il est en train de parler à... Barnes, qui lui répond: "Non, il est ici connard !" Sauf que dix ans plus tard, Jamie Carragher a mis la barre encore plus haut.

Avant de devenir un consultant éminent et respecté en Angleterre, l’Anglais a été un jeune plein de fougue. En décembre 1998, il décide de remettre au goût du jour la soirée déguisée à l’occasion de Noël avec un sacré programme en perspective: "Je vais organiser une soirée de Noël avec le bossu de Notre-Dame, des sex-toys, quelques strip-teaseuses et de la crème fouettée." Promesse tenue lors de la "Christmas Party". À l’arrivée des strip-teaseuses, le défenseur des Reds se déleste de tous ses habits de Quasimodo dans une ambiance survoltée. Gêné par la tournure des événements, Michael Owen se réfugie dans un coin à l’abri des regards tandis que Paul Ince, "inquiet", préfère rester au côté du DJ. La sauterie sera ensuite relatée – photos à l’appui – dans le The News of the World avec un compte rendu savoureux de quatre pages. Sans savoir si Carragher avait, ce jour-là, trouvé sa Esmeralda.

West Ham (2001) : La pissotière Hayden Foxe

Avec son allure passe-partout, il était destiné à connaître une carrière dans l’anonymat le plus complet. Mais, non, Hayden Foxe a bien malgré lui eu son heure de gloire en décembre 2001. Arrivé une saison plus tôt pour arborer la tunique de West Ham, l’Australien va devenir la grande attraction de ce que le quotidien anglais London Evening Standard appellera les "animaux de West Ham". Alors que l’horloge n’affiche même pas encore minuit, le défenseur a déjà fait du club londonien Sugar Reef son terrain de jeu. Dans le carré VIP, il s’enfile allègrement des bouteilles de champagne rosé pour plus de 2000 euros. Avant de déraper. Agrippé aux barres des strip-teaseuses, Foxe commence son show en enlevant son pantalon et en prenant la boîte de nuit pour une pissotière géante. Au point de venir, aussi, se soulager sur la tête d’un jeune appartenant à l’équipe réserve des Hammers qui, dans son malheur, s’était déjà vomi dessus.

"Il n’y a pas eu de bagarres, de cris ou de mauvais traitements, s’est-il expliqué par la suite. Mais ce que j’ai fait été mal et complètement démesuré". Beaucoup plus critique, le manager du club, Glenn Roeder, ne se privera pas pour descendre publiquement ses joueurs, leurs incartades ayant fait les choux gras de la presse britannique : «"Je suis très déçu par le comportement de mes joueurs, nous vivons dans une société où tout est permis. Mais vraiment, putain, je me rends compte aujourd'hui à quel point ce monde n'est jamais descendu aussi bas." Et Hayden Foxe, sans doute un peu plus que les autres.

Leicester (2001) : Godemiché et gifle chocolatée

À l’aube de cette Christmas Party qui deviendra l’une des plus cultes dans l’histoire de la Premier League, Leicester est miné par la morosité. En décembre 2001, les Foxes sont enlisés dans la zone de relégation avec seulement trois victoires décrochées en championnat. Histoire de renforcer la cohésion au sein d’un groupe désuni, Dennis Wise a l’inspiration douteuse d’offrir à Robbie Savage un nounours vêtu du maillot du club, empalé sur un godemiché accompagné de ce commentaire pour le moins explicite : "Prends ça, puisque tu es la seule pute à porter un maillot de Leicester en ce moment."

La réplique de celui qui a été formé au sein la mythique Class of 92 de Manchester United s’avère cinglante. Une gifle avant de badigeonner le visage de "Dennis the Menace" de chocolat. "Il s'est permis de faire cela parce qu'il "couchait" avec Dave Bassett notre manager, s’est par la suite justifié Savage. Dennis m'a fait un cadeau et j'ai riposté en lui offrant un autre cadeau. C'est aussi simple que cela." De curieuses amabilités qui n’ont pas eu l’effet escompté puisque Leicester a été relégué au terme de cette saison.

Manchester City (2004) : Le cigare de "Joey le fou"

Ses innombrables coups de sang et punchlines ont nourri sa légende. "Bad Boy" patenté en Angleterre, le volcanique Joey Barton a plus d’une fois franchi la ligne jaune. Sur les terrains comme en dehors. Et peu importe la prétendue magie de Noël. En 2004, à Manchester City, la "Christmas Party" bat son plein jusqu’à ce que le facétieux Joey Barton entre en scène. Quelque peu éméché, le milieu de terrain anglais s’amuse à faire des trous dans les vêtements de ses coéquipiers avec un cigare allumé. Loin de se démonter, Jamie Tandy, un jeune de l’équipe réserve des Cityzens, réplique en utilisant un briquet pour mettre le feu au tee-shirt de Barton.

Il n’en fallait pas plus pour que ce dernier pète un plomb. En guise de vengeance, l’ancien Marseillais éteint son cigare dans l’œil de Tandy. Résultat des courses, Barton récoltera une amende de 75 000 euros et 80 000 euros de dommages et intérêts. Sa victime, elle, ne se remettra jamais véritablement de ce triste épisode et passera tout près de la case prison après une agression sur sa maîtresse. "C'est la faute de Joey, racontera-t-il des années plus tard. Il a détruit ma vie, mes espoirs et mes rêves. L'agression de Barton a fait de moi un homme violent." Peut-être, mais ne comptez pas sur "Joey le fou" pour avoir le moindre remord.

Tottenham (2009) : Du green de golf au comptoir du pub

Sa réputation de bon vivant ne l’empêchait pas d’être prévoyant afin d’éviter les dérives. En décembre 2009, alors à la tête de Tottenham, Harry Redknapp, décrète l’interdiction des "Christmas Parties" au sein du giron londonien. Pour apprendre, tel un cocu naïf, qu’une petite sauterie avait été organisée quarante-huit heures plus tôt par Robbie Keane. Prétextant une partie de golf dans son Irlande natale pour raffermir les liens avec seize autres de ses coéquipiers, l’attaquant obtient l’aval de son manager et loue un jet privé pour l’occasion.

Sauf que le coach anglais ignore en réalité la suite du programme concocté. Après avoir foulé les greens irlandais, les Spurs ont d’abord abondamment étanché leur soif dans un pub durant l’après-midi. Puis la soûlerie s’est étirée toute la nuit dans un night club à Dublin. Une petite virée qui provoquera l’ire de Redknapp, excédé d’avoir été dupé et de découvrir les photos de cette débauche dans la journée. Chaque joueur présent recevra une amende salée de 20 000 £, toutes les sommes étant reversées à des œuvres caritatives. La punition réservée à l’instigateur Robbie Keane sera même un peu plus lourde : un prêt forcé au Celtic deux mois plus tard.

Manchester United (2007) : Les démons mancuniens sont de sortie

Une beuverie orgiaque complètement hallucinante. La plus sidérante jamais organisée sur les terres de Sa Majesté. À l’aube du réveillon de Noël, le Manchester United de Sir Alex Ferguson livre une lutte âpre avec Chelsea pour acquérir la couronne nationale. Le groupe mancunien vit bien et l’heure est à la joie. Le goût de la fête chevillé au corps, Rio Ferdinand cornaque la soirée à l’hôtel Great John Street dans le centre-ville de Manchester. Au menu : de l’alcool à tout-va, cinq danseuses burlesques à plumes, deux artistes travestis de cabaret et, surtout, des rabatteurs sollicités pour faire venir quatre-vingt-dix filles ramassées sur le pavé. Le marathon de picole va durer plus de quinze heures pour les jusqu’au-boutistes et les plus acharnés. Invité à Zurich pour une cérémonie de la FIFA, Cristiano Ronaldo n’est heureusement pour lui pas présent tandis que les Français Évra et Saha prennent vite la poudre d’escampette au regard de la tournure des événements.

" Les bouteilles de champagne se vidaient à une vitesse ahurissante, rapportera plus tard un témoin, sous couvert d’anonymat, dans le Daily Mail qui se délectera de cette beuverie orgiaque. La plupart des joueurs étaient totalement ivres et ils se passaient les filles comme des morceaux de viande. " Wayne Rooney en tête qui, passablement éméché, aurait abordé sans le savoir une journaliste du Daily Mirror. En y mettant les formes, évidemment : "Je suis habillé comme Justin Timberlake ce soir, et vous serez ma Beyoncé. Je parie que vous étiez la plus méchante à la fac, hein. Vous avez déjà fait des triplettes ? Vous savez : deux filles et un garçon." Un autre témoin affirmera lui avoir assisté à une "orgie immonde" au cours de laquelle "Wazza" se distinguait en hurlant "comme une hyène". Forcément, la virée a fini par déraper. Le jeune Danny Simpson a déclenché une rixe qui a nécessité l’intervention de la police ainsi que du service de nettoyage pour débarrasser les tessons de bouteilles jonchant le sol. Mais c’est Jonny Evans, dix-neuf ans à l’époque, qui s’est retrouvé en Une des tabloïds. Accusé de viol par le petit ami d’une demoiselle qui l’avait emmené dans une chambre d’hôtel, le défenseur nord-irlandais passe vingt-quatre heures en garde à vue avant d’être relâché faute de preuves concrètes.

Si l’affaire est rapidement classée sans suite, Alex Ferguson ne l’entend pas de cette oreille. Exaspéré par le retentissement de cette mauvaise publicité, le manager écossais poussera son fameux "hairdryer" lors du retour des joueurs au centre d’entraînement de Carrington. "Il était fou de rage, soufflera au Mirror un membre du staff des Red Devils. À la reprise de l’entraînement, les joueurs longeaient les murs, la tête basse, à part Ronaldo qui se marrait ! Ils les a convoqués un par un et tout le monde a immédiatement compris qu’il ne faudrait surtout jamais recommencer…" Ils n’en ont pas eu l’occasion puisque, depuis, il n’y a plus jamais eu de Christmas Party à Manchester United.

Article original publié sur RMC Sport